[Interview] David Kimelfeld, pour le projet de l’expérience et de l’efficacité – Partie 2

David Kimelfeld est l’actuel président de la métropole. Rival de Gérard Collomb, il se représente en tant que tête de liste avec « Ensemble Avant Tout ». Le Lyon Bondy Blog l’ a rencontré.

 

On constate sur la Métropole des loyers et des prix de l’immobilier qui ont explosés, ce qui poussent les classes populaires à s’exiler de plus en plus loin. Est-ce que vous avez un projet vis-à-vis de cela ? 

Je crois que d’abord, il faut s’intéresser à la source. C’est finalement le coût du foncier et le coût de la construction. Bien sûr qu’après, que ce soit pour louer ou pour vendre, il faut d’abord acheter du foncier et construire. Je préfère d’abord que l’on s’attaque à la source. On a fait un office foncier solidaire que l’on a mis en place et qui permet de lisser le foncier dans la durée. Ce qui nous permet d’avoir des coups à la sortie qui sont tenables et avec des prix qui sont de l’ordre de moins 20 à 30% du marché actuel. On arrivait dans des opérations où le coup foncier était supérieur aux coûts de construction. Ce n’est pas tenable et logique. Vous n’avez rien fait, et vous avez un coup qui est supérieur à l’acte de faire matériellement après. On a commencé à faire dans les zones d’aménagements concernés type Gratte-Ciel. Quand on choisit les promoteurs, on fixe des règles comme ne pas aller au-delà d’un prix de vente que l’on fixe ensemble. 

 

Certains ne sont-ils pas réfractaires à ces exigences ? 

Non, une fois que les règles du jeu sont posées, pour eux le problème ce n’est pas le prix de la vente, c’est la marge. S’ils achètent du foncier moins cher, des fois, il gagne peut-être plus d’argent à vendre à 4.7000 euros le m² qu’à 10.000 euros le m².  Le prix de vente n’est pas un indicateur de la marge, donc ils sont aussi très favorables à ça. Il faut savoir qu’eux aussi souffrent d’un prix du foncier qui a explosé et de la spéculation, parce que c’est un pari pour eux, parce qu’à chaque fois il faut sortir des opérations qui sont toujours plus compliquées, donc il y a des risques de marges fragiles. De ce fait, ils sont très favorables à travailler avec nous. Et la dernière chose est de mettre un budget important sur l’acquisition de foncier. La Métropole achète plus de terrain qu’elle ne le faisait. On mettait 50 millions d’euros par an, il faut aller bien au-delà pour pouvoir de faire en sorte de maitriser du foncier qui soit sous la puissance publique, ce qui permet après de faire baisser la pression de spéculation.

 

Nous parlions tout à l’heure de l’Est lyonnais, est-ce qu’il y a des zones dans la Métropole où il faudrait acheter du terrain ?

Les zones possibles sont réparties sur l’ensemble du territoire de la Métropole. Cela se fait en fonction des opportunités qui vont se présenter. On a deux choses à faire : mettre la main sur du foncier pour du logement et pour de l’activité économique. On a estimé que l’on a besoin à l’échéance du prochain mandat de 20 hectares de foncier supplémentaire. Il s’agit de mettre la main dessus ou d’être en collaboration avec le privé. 

 

Et dans ce cas-là, vous loueriez à des entreprises ou des PMEs par exemple ? 

Bien sûr, ou cela peut être vendu à un opérateur, mais on est maitre du prix. On a un droit de préemption à condition que derrière, on puisse produire du logement social. On ne peut pas préempter pour n’importe quoi. Il y a un projet derrière.

 

Il a aussi la question de la gestion de l’eau, êtes-vous pour la reprise en régie de la gestion de l’eau, comme certains candidats ? 

J’ai posé une règle, la décision doit être prise sur le prochain mandat. Je trouve que c’est important. C’est un débat démocratique, et il faut qu’on l’ait. Il faut que ça soit le prochain exécutif qui le choisit. Beaucoup de travaux ont été faits pour préparer cette décision-là, des commissions se sont réunies à plusieurs reprises. Tout le monde sera en capacité de faire le choix en fonction de la connaissance du dossier. 

Il faut qu’en premiers lieux l’on ait une autorité organisatrice de la distribution de l’eau qui soit sous contrôle de la Métropole.  C’est comme la gestion des transports, il faut que ça reste sous maitrise publique pour pouvoir avoir une maitrise sur les tarifs si on veut mettre une tarification sociale. Cela peut consister à dire qu’il y ait un minimum vital de l’eau, qui est en même temps vertueux parce que vous ne dépensez pas pour l’eau, et qu’au-dessus de cette consommation minimum vitale cela devient beaucoup plus cher pour la préserver. Il faut que l’on puisse être en capacité de continuer à investir sur le réseau, puisqu’il y a encore du réseau à changer et à améliorer. À partir de là, il faut une autorité organisatrice. C’est ça le plus important. Après que cela se passe en régie ou pas, à ce stade-là, ce n’est pas ça qui m’importe. 

D’ailleurs, on le voit bien, dans un certain nombre de villes où de collectivité cela s’éloigne de la position idéologique. On voit des mairies de droites qui ont choisi la régie, des mairies de gauche qui ont choisi de gauche la délégation du service public. Tout cela aujourd’hui est plus sur le fond que sur la forme. Après je sais bien que certains le brandissent comme un étendard de reconnaissance, mais si vous avez une régie qui fonctionne mal et qui ne garantit pas les ressources en eau, vous ne serez pas plus avancé. C’est plus sur le fond que sur la forme que je me prononcerai, car il faudra se prononcer. 

 

Sur la question du sport, notamment féminin, vous êtes en train de monter un projet avec l’ASUL Vaulx-en-Velin Handball, est-ce qu’il doit se développer vraiment dans toute la Métropole ?

Oui, parce que l’on a montré tout d’abord que c’est ce qu’il se passe. Ceux qui disent qu’il ne faut jamais accompagner le sport de haut niveau, je pense qu’il faut le faire de manière mesurer, mais il se trompe. Ça met un coup de projecteur ! Je pense que la coupe du monde de football féminin n’est pas étrangère qu’il y ait de jeunes filles ou des enfants qui rentrent dans les clubs. C’est un phénomène qui n’est pas que spécifique aux femmes d’ailleurs. Quand il y a la coupe du monde homme, on le voit bien dès qu’il y a un coup de projecteur sur un sport et en plus des succès français, cela donne envie aux gens. On l’a vu sur d’autres sports, et il faut continue à le pousser. Il se trouve que l’on a la chance d’avoir à Lyon, en tous cas sur La Métropole, des équipes féminines sur beaucoup de sports et plutôt bien positionnées. Bien sûr que nous souhaitons accompagner cela. Je pense que peut-être les femmes abordent la compétition différemment des hommes. On le voit sur le foot, elles passent moins de temps que les hommes sur le terrain à se rouler par terre. Par exemple, sur le basket féminin, ce que je trouve très agréable, c’est qu’il y a un jeu beaucoup plus fluide. Les matchs durent moins longtemps, car c’est moins heurté, plus fluide et plus technique. Chaque sport amène une particularité, donc c’est un plus. Dans le travail que l’on doit mener dans l’égalité femme-homme, c’est important d’accompagner le sport féminin. Je pense que c’est une offre supplémentaire pour de jeunes filles, jeunes ou moins jeunes, sur l’ensemble du territoire. 

 

Vous avez parlé de revenus de bases pour les jeunes de 18-25 ans, pourriez-vous en dire plus ? Est-ce que les étudiants en feraient partie ?

Ils peuvent en faire partie à condition, qu’ils soient aussi dans la précarité. C’est-à-dire que nous avons fixé dans un premier temps un chiffre, sur lequel nous n’avons pas trop de doute de ne pas nous tromper, qui est de 1.000 jeunes de -25 ans. On a une première cible, ce sont les jeunes qui sortent de la protection de l’enfance. On voit bien qu’une bonne partie à 18 ans et 1 jour se retrouve avec un baluchon, tout seul. C’est un vrai sujet. On évalue aujourd’hui par an 300 jeunes qui sortent de ces dispositifs-là, en étant dans une très grande précarité. Cela fait partie des publics que l’on a ciblés. Bien sûr, il y a aussi les jeunes apprentis, les jeunes travailleurs, les jeunes sans emplois.

 

Pour élargir par rapport aux étudiants, est-ce que vous souhaitez faire quelque chose pour ceux qui pourraient être juste au-dessus de ce seuil de précarité ? 

On a proposé un certain nombre de choses. D’abord, il faut construire plus de logements étudiants. Dans notre programme logement, il y a un certain nombre de propositions. Deuxièmement, on a indiqué pour les jeunes en précarité apprentis ou étudiant une prime d’aide à l’installation. C’est un petit coup de pouce, 300 euros environs. J’ai déjà parlé des abonnements étudiants sur les transports. Dans le cadre des logements étudiants, ce n’est pas seulement construire des logements neufs, cela peut être aussi de la rénovation de logement vacant. 

 

Dans les projets immobiliers dont vous avez parlé précédemment, vous voulez réserver une partie à des logements étudiants ? 

Oui, on a fixé à 50.000 logements nécessaires sur le mandat. Là-dedans, il y a une partie fléchée logement étudiant. 

 

Il y a aussi la question du référendum métropolitain, selon quel critère voyez-vous la mise en place de cela ?

On a dit plusieurs choses. On pense qu’il faut favoriser les initiatives citoyennes. La première des choses est de réserver un budget annuel pour accompagner des projets citoyens. On a listé à 35 millions d’euros par an et sur l’ensemble du territoire. La deuxième chose est de faire en sorte que, à partir d’un certain nombre de signatures, des questions soient portées aux débats du conseil de la métropole. C’est à dire, vous avez X signatures, on sera obligé de le mettre au débat. Puis, le troisième volet c’est du referendum d’initiative citoyenne à partir d’  » x  » milliers  de signatures sur des questions diverses et variées. 

 

Si on a bien compris, là où vous écartés un peu des écologistes, c’est de ne pas écarter « écologie » et « monde de l’entreprise », comment fait-on pour garder de l’attractivité à la Métropole tout en améliorant notre qualité d’air, de vie et de circulation ?

Pour moi, il y a deux choses. Tout d’abord, c’est de ne pas opposer transition écologique avec le social, et aussi avec l’entreprise. Comment fait-on ? On répond tout d’abord à ces questions-là, parce que les clefs de l’attractivité c’est d’une part l’écosystème économique, et d’une autre les problématiques de nos concitoyens au quotidien. C’est d’abord avant tout en faisant ça que l’on répond à l’attractivité. On y répond aussi en dopant un certain nombre de filières. On va mettre en place des pôles entrepreneuriaux, mais les deux choses ne sont pas opposées, elles sont complémentaires. Je donnais un autre exemple qui était celui de l’éco-rénovation. On pourrait donner un autre qui s’adresse aux grandes entreprises industrielles : quand dans la vallée de la chimie on dit qu’il faut récupérer « la chaleur fatale », toute l’énergie qui part en fumée, pour la récupérer, la retraiter et la réinjecter dans les réseaux de chauffage urbains. C’est avant tout avec de grandes entreprises que l’on peut faire cela. Ce n’est pas avec les PMEs. Il ne faut donc pas opposer les deux. Je suis plus le candidat de l’équilibre et du rassemblement, je n’ai pas de problème aux relations aux entreprises. Je pense qu’il faut travailler avec elles et ce sont deux bons exemples, l’éco-rénovation et l’énergie, qui montrent que tout ça ne s’oppose pas, et qu’aux contraires tout cela doit être ensemble.

 

Et qu’est-ce que vous répondez à vos conçurent qui disent que la population de la Métropole doit rester stable, et que l’on ne doit surtout pas chercher à augmenter celle-ci ? 

Tout d’abord, je leur dis que l’économie planifiée n’existe pas. On peut avoir des politiques publics extrêmement fortes et dynamiques, mais de là à penser qu’ils vont réussir à fermer les portes et que le dernier rentré ferme la porte, c’est une vue de l’esprit. Deuxièmement, si l’on veut garder de la dynamique, il faut que l’on continue à tirer les entreprises sur ce territoire-là. Puis il y a des entreprises qui meurent, des entreprises qui naissent, ou d’autres qui partent. Il faut continuer de faire en sorte d’attirer des entreprises et bien sûr qu’avec ça, on attire aussi du monde, des talents. Seulement, il faut le faire de la manière la plus mesurée possible. Il faut aussi surtout que l’on puisse répondre à cet enjeu en construisant du logement, en investissant d’une manière extrêmement forte, ce que l’on n’a pas fait suffisamment les dernières années.

Après sur le sujet, il y a deux écoles. Il y a Gérard Collomb qui dit qu’il n’y a pas de crise du logement. Il le dit dans la presse. On peut toujours faire la méthode Coué, mais cela a des limites. Si, il y a une crise du logement, et ce n’est pas honteux de le constater. Ce qui serait honteux, c’est de laisser croire qu’il n’y en aurait pas une, et de ne rien faire. 

Nous on dit qu’il y en a une, et il faut poser un certain nombre de décisions. Bruno Bernard dit qu’il y a des logements vides à Saint-Etienne, les gens n’ont qu’à aller vivre là-bas. Je n’ai personnellement rien contre Saint-Etienne, mais ce n’est pas comme ça que cela se passe. On ne décide pas à la place des gens là où ils vont aller habiter. Il faut avoir des politiques publiques extrêmement dynamiques.

 

Et ceux qui critiquent le fait que ces entreprises soient attirées par l’hypercentre et qu’il faudrait les diluer sur l’ensemble de la Métropole ?

C’est autre chose, à condition que l’on fasse du développement multipolaire. C’est à dire que par exemple pour le quartier de la Saulaie, à Oullins, là où il y a le technicentre, on va faire en sorte que dans ce quartier il y ait des activités productives, du tertiaire, mais aussi du logement et du loisir pour faire en sorte que le développement soit multipolaire. Cela est fait pour que les gens n’aient pas à se déplacer sans cesse pour aller d’un secteur à l’autre. Hier dans notre débat, Collomb avait dit : « comprenez, les gens ont besoin de se déplacer parce que les gens ont besoin d’aller au spectacle ou au cinéma ». On n’est pas condamné pour aller au cinéma d’aller dans le centre de Lyon ! Si on a un développement multipolaire, on peut avoir des salles ailleurs. Il en existe déjà. On ne peut pas lire la métropole uniquement par la ville centre et que toutes les fonctions soient dans la ville centre. 

De la même façon, on a un projet de développement sur le bord de Saône, vers le quartier de Gorge de Loup, avec une forte capacité de développement multipolaire avec un collège, une piscine, des activités tertiaires, du logement, des commerces. Il va avoir la même chose au vallon des hôpitaux à Saint-Genest-Laval et l’arrivée du métro à développer, mais à condition d’avoir de la mixité sociale et des fonctions au sein de ces quartiers. 

 

Avez-vous commencé à réfléchir sur la question des alliances ? Vous aviez dit que « personne ne pourrait gagner seul ».

Tout le monde est tourné vers le premier tour. Je pense qu’il y a des gens qui ne pourront pas gagner. Je pense que c’est le cas pour Gérard Collomb, car il n’a pas la capacité de rassembler au-delà de son propre score. Je pense avoir un projet équilibré, qui prend en compte le volet social et le volet économique. C’est le projet du rassemblement. C’est le projet de l’expérience et de l’efficacité parce qu’il va falloir la remettre en route tout de suite la Métropole. Bruno Bernard explique que nous avons à faire « des états généraux ». On ne va pas passer toute notre vie à faire des « états généraux”. Il va falloir la remettre en route rapidement. C’est le fruit de l’expérience et de l’efficacité avec gens autour de moi en matière d’équipe qui sont des gens d’expériences et qui arrivent aussi. Il y a un alliage entre les deux qui va nous permettre d’avancer d’une manière forte. Je pense être celui qui peut rassembler, mais on est d’abord concentré sur le premier tour évidemment. 

Je rappelle juste des chiffres assez marquants, le 16 février 2014, il y a un sondage qui sort : Gérard Collomb fait 37% dans un sondage. Il était en octobre à 42%. Aujourd’hui, il est à 23-24%. À l’époque, il y avait l’alliance avec EELV. Par rapport à d’autres maires sortants comme Estrosi qui est 51%, ou Johanna Roland à Nantes qui est à 37 ou 35%, on ne peut pas dire qu’il soit dans la forme olympique décrit depuis des semaines ! 

L’alternative à cela, c’est soit je suis en tête, soit EELV est en tête, pour le premier tour. Puis on verra.


 

 

 

La rédaction

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