Mehdi vient de la banlieue et est passionné de vin. Pour vivre sa passion jusqu’au bout, il a décidé de devenir vigneron.
Quand je rencontre Mehdi avec mon comparse Azzedine, je me dis qu’il a tout sauf une tête de vigneron. C’est qu’on se les représente un peu âgés, au teint rougeot, avec une bonne enveloppe charnelle. Eh bien Mehdi, c’est tout le contraire : il est jeune, 26 ans, mince, avec un joli teint ! Atypique, il l’est aussi par son parcours de vie. Tout petit, il vivait à Vénissieux, aux Minguettes, dans les tours aujourd’hui détruites, puis à Rilleux-la-Pape dans une tour aussi qui vient d’être détruite ; à croire que le sort s’acharne sur lui… Alors comment ce jeune banlieusard en est-il arrivé à la vigne, lui qui ne vient pas d’une famille de vignerons et qui, précise t-il, n’a « aucune connaissance du vin » ?
La réponse est simple : quand on goûte au vin et qu’on l’aime jusqu’à l’adorer, on peut s’y intéresser davantage, telle est l’explication de Mehdi. Pour cela, il prépare depuis deux ans un brevet de responsable d’exploitant agricole, tout en poursuivant des études d’économie/gestion. En ce samedi de septembre superbement ensoleillé, Mehdi nous accueille très gentiment, en train de vendanger ses vignes de Chirouble dans le Beaujolais. Il fait ça depuis l’âge de 15 ans, et cela se voit qu’il a du métier : entouré de son équipe et dont certains sont ses amis tel que Charlot, chargé de vider le raisin dans la cuve du camion, il dirige l’activité avec savoir-faire.
D’abord le raisin récolté doit être en bon état – pas de déchets permis – et le jeune homme n’utilise pas de pesticides. Cette exigence lui vaut d’avoir l’une des meilleures vendanges du coin car son raisin est de belle qualité et a un degré d’alcoolisation élevé. Serait-ce du vin bio ? Un brin écolo, Mehdi ? La qualité du vin n’en est, selon notre expert, que bien meilleure mais il ne détient pas le label bio car n’en remplit pas totalement le cahier des charges.
Quand l’opportunité s’est présentée il y a deux ans, le jeune homme n’a pas hésité à acheter 1 400 pieds de vigne soit 1,4 hectare, et à rejoindre la coopérative regroupant 40 vignerons ; ceux-ci lui réservèrent un très bon accueil, car les jeunes se font rares dans cette branche – les enfants ne voulant pas reprendre l’exploitation des parents – et certains l’ont même pris pour un fou. Je ne m’aventurerai pas à vous restituer les détails de la fabrication du vin, mais ce que j’en retiens globalement c’est que la coopérative vinifie le raisin, le met en bouteille, permet aussi de le vendre plus facilement. Celui-ci sera prêt pour avril ; attention cela n’a rien à voir avec le « beaujolais nouveau » qui fera sa bruyante apparition prochainement (que de choses apprises…).
Mehdi a une autre passion : la politique. Il a un autre rêve : faire un jour de l’huile d’olive dans le sud. Loin de la banlieue, Mehdi n’est plus un « banlieusard », il a tracé son propre chemin, le chemin d’un homme libre et passionné.
Auteurs : Fouzia Othman et Azzedine Faresse