Candidat des verts à la présidence de la Métropole de Lyon, Bruno Bernard est l’un des favoris de cette course. Le Lyon Bondy Blog l’a rencontré.
Partie 1 à retrouver ici.
Concernant la sécurité, vous souhaiteriez rajouter des caméras dans l’espace public ?
Ce n’est pas notre compétence. Pour les caméras, c’est une compétence municipale. À Lyon et à Villeurbanne, ce que portent nos candidats est de laisser les caméras existantes. À Villeurbanne, nous souhaitons augmenter de 25 % dans le budget sécurité, ce qui fait un million d’euros. Nous voulons aussi travailler avec les citoyens pour discuter avec eux des solutions : plus de policiers municipaux, plus d’éducateurs…
On a des éducateurs dans la compétence Métropole du département que l’on a repris. Sur ce sujet, on va améliorer les choses. De mémoire, sur Villeurbanne il n’y en a que six. On ne peut pas dire que l’on va faire des actions en termes de prévention avec six personnes à Villeurbanne sur une population de 150 000 habitants.
Vous avez déjà été chef d’entreprise. Comment garder le dialogue avec les entreprises et améliorer l’attractivité sans faire venir plus de monde ?
Je ne souhaite pas améliorer l’attractivité. La ville est naturellement attractive. Je veux créer de l’emploi et aider l’économie de proximité. C’est-à-dire redonner du sens à l’économie. Tout ce que l’on fait en termes de transport ou de voirie, c’est de l’emploi. Pour les travaux, nous ferons autant d’emplois en faisant des pistes cyclables qu’avec l’anneau des sciences qui serait fait par une entreprise privée d’un grand groupe français ou européen.
Sur la rénovation publique des bâtiments, et je pense que Béatrice Vessiller (candidate à la mairie de Villeurbanne NDLR) vous en à parler, Écoreno’v en est déjà entre 180 et 200 millions d’euros de travaux effectués. Cependant, les entreprises sont du secteur régional. On veut accélérer cela et aller beaucoup plus loin, par exemple le faire sur les bâtiments de bureau. C’est encore de l’emploi local.
Sur notre politique des déchets, nous souhaitons réduire nos incinérations par deux. Cela passe à coup égal, notamment par le développement du budget de sensibilisation. Cela peut créer de l’emploi local. On peut créer 5 000 emplois sur la filière déchets sans que rien ne nous coûte : on fait de l’économie sur l’incinération et de l’humain pour expliquer que 50 % qui devraient être triés n’ont pas besoin de finir à l’incinérateur. Avec les entreprises que j’ai rencontrées, cela se passe très bien.
Vous n’êtes pas « anti-entreprise » ?
Pas du tout. D’ailleurs en discutant avec les entreprises, leur anticipation est souvent meilleure que certains politiques. En plus, elles savent que pour recruter demain, elles doivent changer de comportement, de management et intégrer certains principes environnementaux comme la manière dont vont se déplacer leurs employés. Il y a plein de jeunes dans les écoles d’ingénieurs qui ne veulent pas passer le permis. Si vous leur expliquez qu’il faut une voiture pour aller travailler, cela va être difficile de les recruter.
Quand Total fait une offre de stage, ils ont du mal à trouver du monde. C’est ça la réalité d’aujourd’hui. Les entrepreneurs savent compter, ils savent faire. Nous allons mettre en place un schéma d’achat responsable à la métropole puisque nous sommes un gros acheteur dans nos marchés publics. On va se donner le temps pour créer ce schéma. Je pense qu’il faut un an. S’il faut six mois de plus, on les prendra. On le créera avec les entreprises, mais aussi avec les citoyens, pour orienter nos achats.
D’une part en termes d’insertion, parce qu’il y a des clauses aujourd’hui. Mais quand je parle avec certains entrepreneurs lyonnais, ils me disent qu’en réalité « tout le monde s’en fout ». Il faut imposer des clauses environnementales et responsabiliser les entreprises pour aider les coopératives, qui ont des modes de gestion différents, à accéder à ces marchés. Quand je discute avec le secteur du bâtiment de ce sujet, pour les rénovations thermiques on demande aux prescripteurs du neuf pour les matériaux. On le leur impose et on les empêche de prendre des matériaux recyclés ! Dans le bâtiment, nous avons beaucoup de déchets qui peuvent être réutilisés. Il y a beaucoup de sujets où il faut que l’on autorise les matériaux recyclés dans un premier temps, puis les imposer dans un deuxième temps. Naturellement pour les bilans carbone, c’est excellent. Même économiquement, c’est pas mal, et pour les entreprises nous favorisons l’économie de proximité.
Comment allez-vous pousser vers une consommation locale ?
Sur l’agriculture, nous avons 350 exploitations agricoles sur la Métropole. Aujourd’hui, on a de 6 à 7 % de celles-ci en bio. Pas terrible ! 95 % de ce qui est produit n’est pas consommé sur la Métropole. C’est exporté. Naturellement, notre but est d’aider ces agriculteurs à passer en bio, de transformer des cultures moins consommatrices d’eau aussi. On va les aider en leur garantissant des débouchés dans nos cantines bio que l’on va mettre en place avec les AMAP et les circuits courts. C’est-à-dire garantir les achats avant la production.
Il y aura aussi sûrement des outils de production à modifier, ce qui est très compliqué. Nous allons voir, y compris avec la subvention directe, comment transformer ces exploitations. Nous avons aussi la volonté de récupérer du foncier agricole. Cela existe déjà dans le Val-de-Saone. Il y a le syndicat Mixte qui a déjà récupéré du foncier agricole et cela permet à des nouveaux de s’installer ce qu’ils ne pourraient pas faire.
Dans la transmission des entreprises dans ce secteur, c’est compliqué. Par exemple, le fermier qui arrête, il a encore des choses à se faire payer et il veut souvent garder son logement sur place. C’est compliqué. L’investissement de départ est très lourd. En plus de cela, quand vous débutez, les terres ne vous rapportent rien du tout. Ce n’est donc pas idiot d’avoir un dispositif foncier qui permet de préserver, continuer, et même améliorer ce secteur-là.
Par exemple, quand les agriculteurs ont besoin de personnes pour faire les vendanges, pourquoi ne pas favoriser les jeunes dans les banlieues ?
Si c’est très bien. Après cela doit exister ou déjà avoir été essayer. Nous allons essayer d’étendre le dispositif zéro chômeurs à d’autres territoires et de négocier avec l’État puisque c’est une situation nationale qui nous donne à nous la Métropole les possibilités de le mettre en place. Quand on enlève 80 chômeurs à Saint-Jean, on fait quelque chose d’exceptionnel. À l’échelle du quartier, cela commence déjà à avoir un impact très positif, et je trouve ça bien plus intéressant qu’aller mettre une tour à Part-Dieu !
Par rapport aux personnes âgées, elles ont aussi le problème de foncier, notamment des EPAHD qui ont un coût onéreux. Que peut faire la métropole ?
C’est toujours pareil. Il y a la compétence de la ville, et la compétence métropole. Sauf erreur de ma part, on ne gère pas beaucoup d’EHPAD au niveau métropolitain. Nous travaillons sur plusieurs choses comme mieux occuper les logements qui sont à moitié ou aux trois quarts vides. Parfois, vous avez de grands logements avec une seule personne dedans. C’est-à-dire savoir comment aider à mettre une plateforme de relation pour l’intergénérationnelle avec étudiants ou autres, contre service ou non, pour louer une chambre, etc. Il y a des chambres disponibles tout de suite, mais cela n’est pas si simple. Au niveau juridique, il faut qu’il y ait un bail, une protection pour créer le lien. Ensuite, il faut l’accompagner, car cela n’est pas si simple de partager un logement. Nous avons quand même une piste pour agir vite.
Par rapport aux écrans publicitaires dans l’espace public, vous souhaitiez les retirer. Est-ce toujours d’actualité ?
On doit le voter en début de mandat, mais nous voulons interdire les écrans numériques publicitaires sur l’espace public, là où Gérard Collomb veut l’autoriser. Je ne dis pas que je vais supprimer toutes les pubs, mais je dis que l’on doit arrêter d’en rajouter pour consommer des smartphones, des parfums… et ce ne sont jamais nos entreprises locales qui font de la pub.
La gestion de l’eau est un thème qui revient régulièrement dans les projets écologistes, comment souhaitez-vous la gérer ?
Pour l’eau, c’est assez simple. Le premier point, c’est la préservation de la ressource. Cela passe par mettre les agriculteurs en bio, par replanter les arbres sur les champs captant, respecter la biodiversité. Deuxième chose, nous souhaitons mettre en place avec les citoyens une tarification sociale et progressive. C’est-à-dire que l’eau du robinet que vous avez besoin pour boire, logiquement, elle est gratuite.
Par contre celle que vous devez utiliser pour remplir votre eau de piscine, elle doit coûter un bras. Je caricature, mais l’idée est là. L’aspect social est que l’accès à l’eau doit être garanti pour les plus pauvres et après les premiers mètres cubes gratuits mettre en place une tarification qui coûte très cher quand l’on est en excès de consommation. Cela ne veut pas dire que globalement, c’est plus cher, mais ça veut dire que l’on rééquilibre les choses avec une régie publique. Cela a été fait à Grenoble quand pour la première fois nous avons pris la ville ou à Paris en 2001 quand nous l’avons imposé à Delanoë. C’est une question philosophique. C’est un bien commun, pas une marchandise. Autant on peut faire des DSP et discuter, comme avec Keolis et les transports en commun, mais sur l’eau, c’est un principe philosophique.
Combien de temps cela mettrait-il selon vous pour le mettre en place ?
Le contrat actuel est fini en 2022 ou 2023, ce sera au lendemain. La dernière, on nous a expliqué que nous n’étions pas prêts. Maintenant, nous le sommes. J’assume à un moment donner d’avoir un principe. Je suis quelqu’un de très pragmatique, mais là, c’est philosophique. On n’est pas là pour se faire de l’argent avec, et c’est beaucoup plus logique pour la préservation de la ressource d’avoir la main dessus.