A Sidi Bouzid, l’une des villes à l’origine de la révolution tunisienne, Paolo et Rafika ont résidé dans la »Maison des Jeunes » durant quelques jours. Ils ont rencontré Anis, un membre d’une radio local, SBZ one Radio.
Le déclenchement de la révolution
« Tout était spontané. De jour en jour, il y avait de plus en plus de confrontations avec l’Etat. Déjà en 2008 à Gafsa (date des premiers soulèvements). On ne savait pas ce qui s’y passait. Il y avait la censure, Facebook a été fermé jusqu’à la visite de Condoleezza Rice ».
Durant ces évènements, une nouvelle page Facebook a été créée pour permettre à la radio de continuer à diffuser l’information, les animateurs ayant pris des pseudos pour ne pas prendre de risque : « Beaucoup de vidéos ont été diffusées. Nous avons travaillé avec Al Jazeera. Nous avions de l’expérience, un savoir-faire. Le système Ben Ali optait pour la désinformation afin de faire peur aux gens, il y avait beaucoup de rumeurs, d’intox. Le troisième jour, il y a eu près de soixante arrestations ».
La répression s’intensifiant dans la ville, il y a eu alors un changement de stratégie assez surprenant de la part des jeunes qui affrontaient la police: « La journée on discutait avec les forces de l’ordre, on prenait un café. On parlait foot surtout. On parlait de tout sauf des affrontements. A la tombée de la nuit, on brulait un pneu, c’était le signal de départ ».
Selon Anis, il n’y a plus de censure totale mais elle est toujours présente. C’est pourquoi il a décidé avec ces amis d’ouvrir leur formation en journalisme à d’autres citoyens : « Nous avons fait beaucoup de reportages. Nous avons suivi des formations de journalisme. Nous avons invité des citoyens à participer aux formations. La moitié des membres n’était pas de la radio. On a voulu ouvrir nos formations aux autres ». Plus de 40 000 personnes sont sur leur page Facebook.
Le journalisme-citoyen est devenu en Tunisie l’un des moyens presque exclusif pour garantir la liberté d’expression. La presse traditionnelle ayant été discréditée pour son soutien à l’ancien régime, y compris durant la révolution (des matchs de foot et des dessins animés y étaient diffusés en boucle !).
Rafika Bendermel