Sous la menace de l’expulsion, l’Amphi C devient un symbole

L’Amphi C de Bron qui accueille depuis 15 jours une cinquantaine de réfugié·e·s cristallise les attentes des réfugié·e·s, des étudiant·e·s, de leurs sympathisant·e·s mais aussi de leurs opposant·e·s. Nous avons déjà parlé de cette initiative dans cet article. Aujourd’hui, plusieurs centaines d’étudiant·e·s, mais aussi de sympahtisant·e·s se sont rassemblé·e·s pour soutenir les réfugié·e·s, alors que la situation était critique.

Hier, coup d’éclat : Nathalie Dompnier, Présidente de l’Université Lyon 2, qui avait jusqu’alors témoigné de son soutien à l’initiative via un communiqué étonnamment favorable, est revenue en arrière. Auparavant, elle dénonçait avec les étudiant·e·s l’inaction sidérante de la région et de la ville. Selon plusieurs personnes rencontrées sur place, ce revirement serait dû à des pressions de Gérard Collomb et du Préfet Stéphane Bouillon, ancien Directeur de Cabinet de Claude Guéant. Elle a demandé à ce que soit évacué l’amphithéâtre le 1er décembre à 17h, sous peine de faire intervenir les forces de l’ordre.

Entrée de l’Amphi C. Crédits Marta Sobkow

Une solution unanimement rejetée

Les étudiant·e·s ont refusé car la solution de relogement proposée par la préfecture ne leur semble pas suffisante. Une ancienne étudiante de Lyon 2 en explique les raisons :

« La proposition de relogement est de seulement 10 jours, ça n’est vraiment pas suffisant. D’autant plus qu’il y a les OQTF (ceux qui ont reçu une obligation de quitter le territoire français) qui ne seront pas pris en charge. »

Un étudiant en histoire ajoute : « ils proposent ensuite de faire un tri, par une association, entre ceux qui sont réfugiés politiques et ceux qui sont réfugiés économiques. Mais ça, c’est un élément de langage du gouvernement qui est controversé et  vraiment problématique parce qu’on voit bien quand on se penche sur les parcours de vie, qu’il y a une multiplicité de causes qui vont faire que quelqu’un se résout à la migration. » Actuellement, le but des étudiant·e·s est de tenir l’amphithéâtre pour que tou·te·s les réfugié·e·s puissent dormir au chaud. De ces moments, Baptiste en garde des rencontres qui « ré-humanisent , et le plaisir d’avoir réussi à faire quelque chose de concret. »

 

Des journées rythmées par les échanges

Même si sur certaines tâches ils ont du s’organiser, tout a été mis en place pour créer un lieu de vie. Les douches étaient prises dans les salles de sport, et des matelas ont été posés dans les amphithéâtres. Deux étudiantes en sociologie rapportent que la participation a été au rendez-vous, même de la part des étudiants de Lyon 3, pourtant situés à plus de 30 minutes de trajet de leur campus. Elles-mêmes ont dormi une nuit dans l’Amphi, avec une vingtaine d’autres étudiant·e·s, par solidarité avec les réfugié·e·s. Le jour, des activités de théâtre étaient mises en place, des cours de dessins, des parties de foot. Si les occupant·e·s ont l’air fatigué·e·s d’une longue mobilisation, et d’avoir hérité d’une responsabilité qui devrait être celle de structures mieux organisé·e·s, ils continuent d’être indigné·e·s.

Pancarte dans le Hall. Crédits Marta Sobkow

Pour Daouda, la colère de ne pas être respecté

Daouda est originaire de Guinée. Il a la chance d’avoir trouvé une famille pour l’accueillir, mais il est toujours sans papiers. Il est venu aujourd’hui pour soutenir les autres réfugié·e·s. Bien qu’il soit passé en Espagne et en Grèce, il a toujours voulu venir en France car il parle le Français et se sent chez lui en France. Pour sa part, il espère pouvoir commencer des études de droit, il a déjà commencé à s’inscrire. Ce qu’il souhaite, c’est avoir un logement pour lui et pour les autres personnes qui l’accompagnent, car plus que de l’argent ou de la nourriture, c’est ce qui permet selon lui de rester digne, et de commencer ensuite à travailler.

Autocollants sur une des portes près de l’amphi C. Crédits Marta Sobkow

« Le gouvernement français a colonisé notre pays, et continue encore d’exercer du pouvoir. Les pays africains continuent d’être exploités par des grands industriels, comme Bolloré par exemple. Ils prennent toutes les richesses en corrompant nos dirigeants injustes, et nous rendent pauvre. Ensuite, une fois arrivés en France parce qu’on a fuit la misère, on nous traite comme si on n’était pas humains, à la Préfecture on nous parle mal. »  « Mais j’ai connu pire dans mon pays, j’ai déjà vu la mort, et je suis prêt à rester ici. Quand quelqu’un mourra de froid, ils comprendront qu’on est prêt à tout pour rester en France ».

 

MAJ  2.12.2017 : Nathalie Dompnier a annoncé que l’amphithéâtre sera finalement expulsé Mercredi à 17h. Source : Ens de Lyon en lutte.

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