Nathalie Arthaud : « Transformer la société, c’est une perspective révolutionnaire »

Dans le cadre des élections européennes qui se dérouleront au mois de juin, la liste « Lutte Ouvrière » sera conduite par Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier. Le parti a organisé un meeting à Lyon ce vendredi 23 février pour présenter les candidats de la métropole lyonnaise : Michel Piot, Nadia Bouhami et Delphine Briday. Lors d’un entretien téléphonique, elle présente son programme au Lyon Bondy Blog.

Bonjour Mme Arthaud, revenons sur l’actualité de ce samedi. Que pensez-vous du comportement du président de la République au salon de l’agriculture?

Nathalie Arthaud : C’est un beau parleur qui aime s’écouter. Il est absolument clair qu’il n’apporte aucune solution aux petits agriculteurs dont la colère est légitime. On ne peut être qu’écœuré par son show. Je crois quand même qu’il s’est pris les pieds dans les tapis. 

Iriez-vous au salon de l’agriculture?

N.A : Je ne compte pas y aller. Franchement, vu le cirque politique que c’est devenu cette année, cela n’aurait aucun sens. 

Vous serez tête de liste (LO) pour les élections européennes de juin 2024. Quel sera le programme de votre parti ?

N.A : Comme à notre habitude : nous mettrons en avant les intérêts des travailleuses et des travailleurs. Leurs besoins d’avoir un salaire digne. On entend dire aujourd’hui que les agriculteurs n’arrivent pas à vivre de leur travail. On peut en dire autant quand on est ouvriers intérimaires, aide à domicile, employés. Aujourd’hui, le Smic (Salaire minimum de croissance, ndlr) est devenu un salaire plancher en quelque sorte, qui permet juste de sortir la tête hors de l’eau et qui nous condamne à  la pauvreté. Nous dénoncerons cela : l’exploitation, les cadences, les licenciements et les suppressions d’emploi qui font qu’aujourd’hui, c’est de plus en plus difficile. Maintenant, il faut faire le travail de deux ou trois personnes.

Nous mettrons en avant lors de cette campagne, les intérêts quotidiens des travailleurs face au super-profit réalisés et annoncés semaine après semaine. Nous affirmerons également la nécessité de reprendre conscience de notre capacité à changer la société. Il va falloir contester le capitalisme qui broie non seulement les travailleurs, les petits agriculteurs, les petits commerçants et les artisans, mais qui détruit également la planète et qui nous amène de guerre en guerre.

Est-ce que nous arrivons à la fin du système capitaliste?

N.A : On arrive à un moment où on ne peut que constater sa faillite, notamment au niveau économique. Avec des inégalités ahurissantes, avec ce système qui fait que plus on n’est parasite, plus on est éloigné du travail, de la production plus on s’en met plein les poches. Alors que cela même qui sont indispensables au fonctionnement de la société et qui se relèvent  les manches tous les jours, on dû mal à vivre. On est en faillite au niveau de cette crise climatique. Regarder les tensions au niveau international : c’est la guerre à tous les étages, c’est la guerre économique à l’échelle de la planète. Sans cesse, on nous explique qu’il faut partir en guerre pour les matières premières, qu’il faut faire la guerre commerciale. La guerre économique avec la Chine bat son plein et puis cette guerre régulièrement, elle se traduit en guerre tout court. 

Est-ce que la France ne mène pas une guerre contre les petites gens?

N.A : Le capitalisme, c’est ça ! C’est la lutte de classes car tout simplement le grand patronat, la grande bourgeoisie, le grand capital pour s’enrichir, doit exploiter le monde du travail donc cela c’est le béaba du capitalisme depuis qu’il existe. Simplement, il y a eu aussi des moments de développement et de croissance des travailleurs, qui ont réussi à se battre et à arracher un certain nombre de droits et un certain niveau de vie. Mais aujourd’hui, on est en train de reculer à toute vitesse alors que ce sont des sommes phénoménales et astronomiques qui s’accumulent aujourd’hui dans les mains de grands patrons .

D’après divers sondages pour les européennes, le Rassemblement National est pronostiqué à plus de 30%. Est-ce que la France est en train de basculer vers l’extrême droite ?

N.A : Moi je la combats, cette politique-là ! C’est le geste de désespoir. Après avoir cru dans des politiques divers et variés, beaucoup regardent ceux qui n’ont jamais été au pouvoir. Et puis, tout cela se double aussi d’une volonté de se recroqueviller sur soi-même, de fermer les frontières. Tout ça ne peut pas être une solution. On le voit très bien, notamment en Italie, avec la copie conforme des Le Pen. Giorgia Meloni gouverne exactement comme n’importe quelle gouvernement de droite. Elle revoit les droits des travailleurs italiens, elle sacrifie comme tous les gouvernements les travailleurs face au profit. D’ailleurs les Le Pen feront la même chose au niveau de la France. 

Vous faites campagne pour les européennes, vous traversez toute la France. Quel sera votre message pour attirer de nouveaux électeurs?

N.A : Moi je crois qu’il faut réaliser qu’aujourd’hui, on peut pas se battre petit bout par petit bout. D’abord, on se bat sur son droit au logement, pour son droit à la retraite, la question du racisme et puis après on se bat pour l’environnement. Je pense qu’il faut réaliser que tout est lié. Finalement tous ces combats ont une cause commune. Cette cause commune, c’est que les dirigeants actuels ne jurent que par la soif du profit. Ils ne jurent que par ça, que par leur guerre économique, qu’ils imposent à toute la société. Donc, on se sortira de tout ça et de toute cette domination, de tout ce chaos, qu’en contestant ce capitalisme. Les travailleurs en ont le pouvoir car précisément ils sont confrontés au quotidien tous les jours face au diktat patronal de ce grand patronat. 

Ce qui va me distinguer des autres candidats, c’est que je continuerais à affirmer la nécessité de changer l’ensemble du système capitaliste, de le renverser, et je m’adresserai aux travailleurs pour leur dire qu’à travers vos luttes vous pouvez changer cela. 

Comment allez-vous faire pour ce changement et renverser le capitalisme,  expliquez-nous?

N.A : Il faut que le monde du travail réalise la force qu’il constitue. Le pouvoir finalement. Regardez les agriculteurs qui expliquent qu’ils nourrissent le pays. Vous savez sans les ouvriers qui travaillent dans les abattoirs, sans  les ouvriers dans l’agro-alimentaires, sans les ouvriers agricoles, sans les caissières de supermarché, les paysans ne nourrissaient qu’eux-mêmes. En réalité, c’est l’ensemble du monde du travail qui est indispensable. Il faut (les travailleurs et les travailleuses, ndlr) qu’ils contestent ceux qui dirigent notre pays et qu’ils combattent pied à pied toutes les décisions par choix en affirmant fièrement qu’ils feraient mille fois mieux que les patrons actuels des multinationales. Parce qu’eux auraient la préoccupation de répondre d’abord au besoin de la population et qu’ils ne chercheraient pas à enrichir quelques milliers de très très riches. C’est cette perspective là que nous voulons faire entendre. Transformer la société, c’est une perspective révolutionnaire.

Le pouvoir commun va-t-il être dur à mettre en place avec 66 millions de Français?

N.A : Il faudra également le mettre en place à l’échelle de la planète. Moi, je pense que cela se fera au travers de révoltes générales. De la même façon que les révoltes qui ont embrasées tout le Maghreb. Vous vous souvenez du « Printemps arabe », de toutes ces révoltes de masse qui ont fait tâche d’huile. Il faut que ces révoltes soient organisées derrière un objectif, renverser le système capitaliste.

Etienne Aazzab

La rédaction

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