Après avoir quitté les Républicains, Emmanuelle Haziza s’est lancée dans les élections municipales de Villeurbanne sans étiquette. Rejoint par Bruno Bonnell pour la métropole, elle est déterminée à changer Villeurbanne. Le Lyon Bondy Blog l’a rencontré.
Certains quartiers de Villeurbanne sont en pleine gentrification quand d’autres sont délaissés. Comment est-ce que vous vous positionnez dessus?
Quand on parle de gentrification, comme à Gratte-Ciel, c’est une réalité. Mais on a aussi des quartiers entiers qui ont été complètement abandonnés par la mairie, dès qu’il y avait une place libre, le maire faisait construire des immeubles. Quand je dis complètement abandonné, c’est une réalité. Il y a aujourd’hui des quartiers qui sont remplis de rats, de saletés, et cette insalubrité me révolte, je ne peux plus la supporter. Depuis 2008 que je suis élue au conseil municipal, je me bats pour que la mairie demande et propose un projet à l’ANRU. On a des quartiers à Villeurbanne qui sont vieillissants, dégradés et qui n’assurent plus la tranquillité et la salubrité publique à la population. Il y a une vraie problématique liée à la rénovation urbaine. Avant de construire, il faut rénover, il faut faire en sorte que l’existant soit de nouveau digne de ses habitants. Il y a des villeurbannais qui vivent dans des logements indignes. Je veux construire, mais je veux construire mieux.
Il y a une bétonnisation excessive à Villeurbanne contre laquelle je veux lutter. Certains endroits à Villeurbanne sont vides, et c’est là que nous allons pouvoir construire et mieux. Nous allons instaurer une nouvelle dynamique avec des espaces verts, des centres de services publics adaptés et des commerces. S’il n’y a que des immeubles, il n’y a pas de vie. Je ne veux pas que Villeurbanne soit une ville-dortoir. Je veux qu’il y ait de la vie à Villeurbanne. Je veux que ça bouge. Et je veux plus de mixité sociale. Je veux que dans les quartiers de Villeurbanne, les gens continuent à vivre comme vivaient nos grands-parents, en symbiose et en bonne entente, dans la joie et la bonne humeur. C’est comme ça que je rêve ma ville, et c’est ce que je ferais une fois élue maire.
Que préconisez-vous pour lutter contre l’augmentation des loyers à Villeurbanne ?
Effectivement il y a eu une hausse assez spectaculaire des loyers à Villeurbanne. Je le dis d’entrée de jeu, je suis contre l’encadrement des loyers. On se rend compte avec cette politique louable mais complètement inutile que les personnes aux revenus modestes n’accéderont plus aux logements. Par contre il va falloir faire en sorte lors des nouvelles constructions d’apporter de la mixité sociale et de permettre aux constructions du centre-ville d’être de nouveau abordables pour tous.
Comptez-vous réquisitionner les logements vacants ?
Dans ma vie professionnelle, j’ai eu à connaitre beaucoup de situations d’hommes et de femmes en détresse, surtout des femmes battues. Il y a une problématique qui est extrêmement grave, et qui existe à Villeurbanne. Quand une femme est battue, qu’elle arrive à avoir un sursaut de réalisme et à partir, si c’est un dimanche, dans 80% des cas elle est obligée de retourner chez elle. Elle n’a pas d’endroit où aller, de logement dédié. Ce n’est plus possible. En tant que maire de Villeurbanne, je ferais en sorte qu’il y ait une ligne dédiée pour que ces personnes soient mises en lien avec des associations et puissent se libérer du joug de leur oppresseur et trouver en la mairie un tiers de confiance.
Villeurbanne est une ville très étudiante. Comment aider les étudiants et lutter contre la précarité étudiante ?
On a effectivement sur Villeurbanne un complexe étudiant qui est assez incroyable, mais ne profite malheureusement pas à la ville. Déjà, il y a le nom : Lyon La Doua. Comment peut-on accepter que le nom de Villeurbanne n’apparaissse pas dans le nom du campus? C’est une hérésie. Autre chose que je ne comprends pas, c’est le tracé du tramway. Le tramway part de la Doua et arrive à Charpennes, qui est la limite avec Lyon. Le drame est que des milliers d’étudiants, qui dorment à Villeurbanne, vont consommer, se divertir et s’amuser à Lyon. Quand je serais maire de Villeurbanne, je souhaite faire en sorte que ces étudiants puissent s’épanouir à Villeurbanne.
La question de la précarité étudiante est une vraie problématique. A la mairie, on ne peut pas agir sur tout. Mais nous ferons en sorte que ces étudiants présents sur le campus , puissent se revendiquer villeurbannais via une charte villeurbannaise. Nous souhaiterions aussi que les entreprises villeurbannaises aient un label ou une charte « Label Villeurbanne ». Ce qui mettrait en relation ces entreprises avec d’autres du secteur, et des étudiants pour que ces derniers aient accès de manière plus égalitaire à des stages et au chemin du travail. Il y a un gros problème dans les recherches de stage à Villeurbanne, c’est très souvent du piston ou de la connaissance. Via ce label, nous demanderons aux entreprises villeurbannaises qui l’acceptent de prendre des étudiants du campus villeurbannais en stage.
Comment aider les personnes âgées de Villeurbanne ? En matière de projet immobilier. Comment les aider à éventuellement rester chez elle le plus longtemps possible ?
On a à Villeurbanne une problématique liée au vieillissement de la population. C’est un problème national que les pouvoirs publics n’ont pas vu venir. Ma grand-mère, qui était très indépendante, a un jour fait un AVC et s’est retrouvée en situation de dépendance physique. Puis est venue la maladie d’Alzheimer. On se rend compte qu’il n’y a pas ou peu d’offres accessibles à des familles modestes pour des cas comme ça. C’est une vraie problématique qui doit trouver des réponses au niveau communal. Je plaide pour la création d’un nouvel EHPAD, je pense qu’il n’y a pas assez de places à Villeurbanne. Plus généralement il y a un problème de désert médical : beaucoup de professions libérales quittent Villeurbanne pour diverses raisons. Il va falloir faire en sorte que ces professions restent à Villeurbanne.
Enfin, il va falloir mettre en place un accompagnement pour les personnes aidants. Quand quelqu’un est en situation de dépendance, il faut une autre personne pour l’accompagner en permanence, et ça coute extrêmement cher. Ce n’est pas accessible aux familles les plus modestes. Il va falloir réunir les associations, les professionnels de la santé, les responsables des EHPADs et faire une consultation très rapide avec des mesures concrètes.C’est pareil pour les personnes en situation de handicap. Je veux que Villeurbanne soit une ville exemplaire sur ces sujets-là. Ça passe par l’accessibilité aux services publics, aux transports, par l’égalité salariale et beaucoup d’autres vecteurs.
Comment faire pour l’aide à l’emploi à Villeurbanne ?
Il faut faire de Villeurbanne une ville attractive pour les entreprises, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, dès qu’un espace se vide on y construit un immeuble. Je souhaite que Villeurbanne redevienne la ville du commerce, des artisans et des entrepreneurs. Pour cela, il va falloir faire une politique adaptée et « friendly » pour les entreprises.
On s’est rendu compte qu’il y a un vrai problème à Villeurbanne lié au stationnement. Nous ferons en sorte que tous les commerçants, du moment où ils créent de l’emploi, du lien, du dynamisme à Villeurbanne, soient remerciés par l’attribution du statut « résidant à Villeurbanne ». Cela consistera pour eux à payer une fois par mois leur stationnement et ne plus s’en préoccuper. Je préfère qu’ils soient dans leur boutique plutôt que dehors à courir les horodateurs toutes les deux heures pour mettre un ticket.
Ensuite, nous ferons en sorte que les entreprises s’implantent à Villeurbanne. Nous aurons une politique accueillante pour les entreprises. Ça passera par la création du label « Entreprise Villeurbannaise » complété par des engagements pris envers les commerçants, les artisans et la redynamisation de certains quartiers.
Nous voulons pouvoir demander aux entreprises qui viennent s’installer à Villeurbanne de recruter des jeunes. Quand on a une ville qui vit, qui est ouverte aux entreprises, ça encourage aussi les jeunes qui veulent se lancer à s’installer. Une ville fantôme, ça ne vaut pas le coup pour ces jeunes. Mais une ville attractive, avec un vrai esprit entrepreneurial, commerçant, artisan donne envie de se lancer, de créer son entreprise. Je veux redonner de l’espoir aux jeunes.
Envisagez-vous des alliances pour ces élections ?
Comme je l’ai dit, je pars sans étiquette pour cette élection. Je pars sans idée partisane. Je veux être la maire de tous les villeurbannais sans exception. Je suis fière de la liste que je conduis, avec des hommes et des femmes qui veulent aussi changer Villeurbanne. Ils s’investissent, donnent de leur temps. Ce sont des personnes avec des expertises différentes, je suis très fière de cette équipe dynamique et diverse à l’image de notre ville. On fait une campagne dans la bonne humeur, et ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé.On est heureux de le faire.
Il y aura sans doute un moment de réflexion sur une possible alliance. Mais tant que le 1er tour n’est pas passé, on ne peut pas vraiment y réfléchir. C’est une élection très ouverte, tout est possible.
Je me lance dans cette bataille avec mon cœur, mes tripes, ma passion et une nouvelle vision pour ma ville, celle du changement.
Comment voyez-vous Villeurbanne dans dix ans ?
Si je suis élue maire, je vois Villeurbanne de manière radicalement différente. Si ce n’est le cas, je serais moins optimiste et je me poserai des questions dans le devenir de cette ville. J’assiste déjà à une dégradation de la vie des villeurbannais et des villeurbannaises, et ça ne me plait absolument pas. Je souhaite apporter le changement à Villeurbanne. Si je suis élue le 22 mars, alors dans dix ans les villeurbannais seront heureux d’y vivre et ne voudront pas partir comme c’est le cas aujourd’hui. Je veux rendre le bonheur et la fierté de vivre à Villeurbanne. Je veux être la maire du changement.