Mercredi 10 juin, l’association Creamod & Design a organisé le gala Creamod Fashion Show avec un grand défilé à Villeurbanne. Son succès permet de mesurer l’ampleur grandissante de cette initiative pour les créatrices lyonnaises. Des personnalités politiques et des noms de la mode appuient désormais cette démarche perçue comme un vecteur d’emploi.
Redonner confiance en soi et assouvir ses aspirations. Un message que l’association Creamod & Design s’est engagée à faire passer depuis sa création à l’automne dernier. Celle-ci rassemble les stylistes, coiffeuses, maquilleuses ou même photographes résidant en zone périurbaine et pour qui les portes des défilés ou des boutiques demeurent fermées. Le potentiel de ces femmes, également mères de famille, est ainsi révélé à un public de plus en plus large. La présidente — fondatrice Ouafa Ghrissi tenait à organiser son premier gala de mode pour marquer le coup et mettre en avant le travail réalisé par ces talents émergents.
« C’était une soirée difficile à organiser, car nous avions peu de moyens et de temps, souffle Ouafa Ghrissi. J’ai même refusé de repousser la date du 10 juin pour maintenir mes engagements vis-à-vis du public qui était vraiment impatient. Creamod & Design a été victime de son succès. »
Les institutions conquises par le projet
Les 250 personnes ont pu s’imprégner d’une ambiance digne d’un festival dans un décor bucolique, conçu par Nadia de NB Design. Passionnés, professionnels et représentants politiques ont répondu à l’appel.
Selon Philippe Delpy le délégué du préfet du Rhône, cette démarche se démarque par un côté fédérateur qui donne plus de poids et va permettre d’ouvrir des brèches. Il la perçoit comme un moyen de lutter contre les discriminations et les inégalités tout en changeant les représentations que se fait le monde de la mode sur le public des périphéries urbaines.
Accompagner les créatrices, une priorité
« C’est une ouverture vers l’économie qui peut être développée, appuie-t-il. On sait que les gens des périphéries ont du mal à trouver un emploi. Quand ils ont des talents, il faut les soutenir. »
Jean Michel Coquard, référent textile et mode à la CCI (Chambre de Commerce et d’Industrie), dévoile les premières lignes de l’accompagnement dont les créatrices vont pouvoir bénéficier :
« Des aides peuvent être apportées, bien qu’elles ont été considérablement réduites ces dernières années. Nous devons faire 17 % d’économies. Cependant, des conseillers seront présents pour aider les créateurs à s’implanter et trouver les financements. »
Farida Boudaoud, vice-présidente de la région Rhône-Alpes déléguée à la culture et à la lutte contre les discriminations, ne cache pas son attachement à cette cause :
« Chaque fois qu’on accompagne des femmes dans la création sur le terrain, c’est toujours une réussite. Voilà pourquoi il faut laisser leur chance à des femmes comme Ouafa et toute son équipe qui effectuent un travail de professionnels. Ce ne sont pas forcément des freins qu’il faut désormais lever, mais apporter l’information avec des aides publiques qui existent à la Région. C’est une occasion de leur dire : Venez nous voir à la région ! »
La ville de Lyon, représentée par Thérèse Rabatel, adjointe à l’égalité femme-homme, et Ali Kismoune, conseiller municipal délégué à la politique de la ville et à la vie des quartiers, s’est également investie dans cet évènement. Ali Kismoune, également président du Club Rhône-Alpes Diversité, se satisfait d’un accompagnement réussi dans le cadre de l’organisation du Creamod Fashion Show :
« On ne voulait surtout pas stigmatiser ces créatrices sur le fait qu’elles soient issues des quartiers. Elles sont lyonnaises et le but est de valoriser l’ensemble des talents de notre ville et notre territoire. Monter une équipe aussi soudée et volontaire avec des moyens modestes, c’est un défi qu’elles ont su relever. Dans ce gala, c’est la beauté lyonnaise dans tous les sens du terme qui était au rendez-vous ! »
« Se lancer et ne rien lâcher »
Dans les coulisses, l’organisation est orchestrée à la seconde. Une vingtaine de modèles défilent sur le podium avec des robes de cocktail et de mariées. La programmation est attractive : chacune des 15 créatrices et stylistes présente un thème tel que le voyage ou l’amour. Aux premières loges, on distingue le parrain Amine Mrani, créateur de Caftan de luxe, venu spécialement du Maroc ; et la chanteuse Léa Castel, également marraine de la soirée.
Photo de Lea Castel
À l’image de Marina Belkacem, patronne de MB Couture et membre de Creamod & Design, l’optimisme est de mise :
« C’est une passion qui prend beaucoup de temps, même si on travaille chez soi. Cela reste un métier artisanal. Mais mon but est de m’agrandir et d’embaucher ensuite. Avec ce gala, Ouafa a vraiment mis notre travail en valeur. En sachant qu’elle l’a fait pour la première fois. À Creamod & Design, il n’y a pas de rivalité, mais plutôt une véritable solidarité entre les membres. »
Ouafa Ghrissi n’aspire qu’à susciter d’autres vocations. À Creamod & Design, on pense déjà aux retombées, mais aussi aux prochains défilés qui devraient confirmer l’expansion de ces talents :
« Certaines de nos membres commencent déjà à avoir des contacts, elles vont pouvoir ainsi élargir leur public qui ne s’arrêtera plus désormais qu’aux zones périurbaines. Un véritable réseau va se mettre en place. »