Kacem Wapalek : « même un mauvais rappeur, c’est un bon prof »

Rencontre avec le rappeur lyonnais Kacem Wapalek.

kacem wapalek 69flow

Yo Kacem, présente-toi pour ceux qui ne te connaissent pas.

Kacem Wapalek, K.A.C.E.M W.A.P.A.L.E.K. Il suffit de taper ça sur internet et de se laisser guider au feeling. Il y a des vidéos, des interviews… J’prépare un premier album et je taffe notamment avec Oster Lapwass  http://www.osterlapwass.fr qui est beatmaker. Nous sommes de Lyon à l’origine et puis on tourne un peu partout en France depuis plusieurs années tout en préparant une série d’albums et pas mal d’autres choses.

Comment t’en es venu à faire du rap ?

Tout simplement par des rencontres. J’dirais pas qu’il y a de bonnes ou de mauvaises situations mais c’est avant tout des rencontres avec des gens qui faisaient de la musique et moi ça m’a intéressé et j’me suis mis à en faire en tant que particulier. J’me suis mis à écrire au départ, puis à poser, à rapper tout simplement en fait.

T’avais quel âge ?

C’était très tard en fait. Mais l’âge n’a rien à voir avec ça.

Mais on voit beaucoup de MC kicker à 16 et un peu plus.



Bah j’ai pas eu cette chance. J’aurais bien aimé retomber sur des cassettes de l’époque où j’dis des conneries. Parce qu’un morceau, c’est un peu comme une photographie et puisque la voix ça transmet beaucoup de choses, la moindre émotion passe si tu fais bien ton taf. Pour ça t’as deux écoles, les acteurs qui te transmettent genre la tristesse ou la joie. Et t’as ceux qui ressentent et qui n’ont plus qu’à le dire.

Après la voix fait le boulot. Donc c’est un peu une photo de l’instant. Moi j’ai pas cette chance justement d’avoir des photos d’enfance musicale et j’aurais bien aimé. Après c’est vrai que souvent quand t’es ado, à un moment donné, le rap est un peu subversif. J’cautionne pas forcément parce que je donne pas mal d’ateliers où je vois que c’est souvent les mêmes thèmes qui reviennent. Souvent, les ados ont une vision un peu étriquée avec pleins de préjugés. Moi j’aime bien casser ces murs-là.

Et comment t’y parviens ?

De mille et une manières. Il faut payer pour venir à l’atelier (rires).

La musique que t’écoutait quand t’étais gosse a été une inspiration pour toi ?

Non non, d’ailleurs on a une blague par rapport à ça avec un ami. C’est que souvent des gens nous font écouter des choses et on dit « dommage parce que c’est du rap de fan de rap » tu vois. Et, c’est pas ça qu’il faut faire.

C’est du cliché ?

Bah si t’enlèves les morceaux qui parlent de « je branche mon micro, mon jack, l’ampli » et si t’enlèves les morceaux de rap qui parlent de rap, y’a pas mal d’albums où il reste deux lignes en fait. Où le mec s’est pas livré, il a rien dit et il y a rien de pire que d’être lisse en art. Tu sais, je préfère encore peindre un tableau qui écœure les gens plutôt qu’un truc qui ne leur fait rien du tout.

Tu préfères quelque chose d’abstrait plutôt que de préconçu ?

Je crache sur rien, j’écoute moi-même de l’abstract hip-hop et j’adore. Tout est question de contenu en fait. Tu vois, il y a beaucoup de gens qui perçoivent le rap comme une forme. Mais c’est pas que ça aussi. C’est pas qu’un plateau d’argent avec une soupe dégueulasse dedans.

Donc là, tu critiques un peu ce qui est fait actuellement ?

Je ne critique pas, j’encourage à… J’suis pas dans la plainte, j’suis pas dans le problème, j’suis dans la recherche de solutions. Les textes sont mal écrits ? Ecrivez mieux. J’suis en train de dire qu’un vrai rap existe. Pour moi, même un mauvais rappeur, c’est un bon prof car il te montre tout ce qu’il ne faut pas faire. Donc j’serais vraiment le dernier des nazes à les critiquer d’autant que je sais que moi-même en écrivant que t’as beau avoir écrit 20 textes trop biens, et bah le 21eme, tu repars de zéro. On est des éternels débutants. Je vais pas reprendre une phrase que j’avais déjà trouvé. Y’en a qui rappent pour le groove, d’autres pour faire planer les potes et c’est important de faire naître un sourire chez un pote. Je ferais jamais de critiques sur ça tu vois, j’en ai déjà pas mal à faire sur moi.

T’es perfectionniste ?

Non, je dirais pas ça, ça serait être vantard. C’est comme me demander si j’suis modeste.

T’es modeste ?

Bah grave, peut-être un peu trop (rires).

A part ça, quel a été le rôle d’internet dans ta carrière ?

Internet a permis, pas qu’à moi en particulier, de sortir du régional. Avec Lapwass, ça faisait des années qu’on opérait à ce niveau-là et même en dehors de Lyon genre à Valence, Chambéry, Saint-Etienne, Grenoble… Ca a juste permis à des gens qui n’étaient pas notre région de nous voir sur scène ou sur le terrain et de nous découvrir par le biais de vidéos. En fait, moi j’peux pas te dire qui me regarde et à quelle fréquence, si c’est des garçons ou des filles… J’en sais rien.

Tu ne t’intéresses pas à ça ?

Bah j’aimerais bien savoir mais hélas à part quelques réseaux sociaux qui ne sont pas cool humainement, on a très peu de moyens d’échanger. Ce que j’ai à dire en général j’essaye de le mettre dans ma musique, c’est déjà pas mal. Mais il faut pas tout révéler, on demande pas à un comique d’expliquer ses blagues. Déjà ça serait pas marrant et puis moi j’estime que l’auditeur est intelligent. C’est-à-dire que lui-même va savoir que là c’est ironique, que là c’est du non-dit. IMPLICIT LYRICS. L’art c’est l’art de dire sans dire.

T’as un message pour les jeunes qui veulent se lancer dans le rap ?

Ouais, que y’a de la place pour tout le monde et qu’on peut pas comparer les tomates et les courgettes. Par contre, il faut savoir que c’est un boulot comme un autre mais que c’est pas comme la comptabilité où tu peux te lever et te dire que de 8h à 10h « j’vais m’écrire un texte ». Que, ça restera pas tout le temps, que c’est plutôt injuste comme tous les métiers un peu « passion ». Ces métiers sont basés sur des choses qui ne sont pas la teuf, les soirées, les meufs, les DJ… Que c’est un métier du sentir et non pas du paraître comme disait Molière. C’est surtout avoir le coup d’œil. Il y a beaucoup de gens qui pensent qu’être rappeur c’est avoir une grande gueule mais c’est surtout avoir des grandes oreilles en fait. L’essentiel, c’est de faire son propre rap.

La rédaction

Crée en 2008, la rédaction du Lyon Bondy Blog s'applique à proposer une information locale différente et complémentaire des médias traditionnels.

Voir tous les articles de La rédaction →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *