Chronique Judiciaire : « Je me sentais apte à prendre le volant »

Tribunal de grande instance de Lyon, comparution immédiate du vendredi 12 avril 2019.

Il est 14h45, la deuxième affaire de l’après-midi commence. Le prévenu, John*, entre dans la pièce. Le stress se lit sur son visage crispé lorsque la présidente évoque les faits. Le 11 avril dernier, l’homme de 48 ans est contrôlé par les CRS sur l’autoroute A42 car il roule avec les feux éteints. A bord, sa compagne ainsi que son enfant de 4 ans.

 

Père de 3 enfants, John ne peine pas à s’arrêter lorsque les forces de l’ordre lui font signe. Contrôlé positif au test d’alcoolémie, de cannabis et de cocaïne, il se trouve qu’il a 0,48 mg d’alcool dans le sang. L’accusé avoue « oui, j’ai bu 8 bières lors de la soirée, la dernière était à minuit ». La présidente saute sur l’occasion pour le réprimander sévèrement en lui rétorquant « mais Monsieur, vous pouvez boire toutes les bières du monde, ce n’est pas notre problème, mais ça le devient dès lors que vous prenez le volant derrière ! ».  Lors de cette soirée, il n’aurait pas consommé que de l’alcool, mais aussi du cannabis. Cependant, concernant la cocaïne, « j’en ai pris le week d’avant », se défend-il comme si les faits allaient paraitre moins graves.

Condamné 7 fois, dont 4 pour détention de drogues, ce père de 3 enfants avait déjà écopé de 6 mois avec sursis et de 400€ d’amende pour blessures involontaires et délit de fuite en 2015. Ce qui n’était qu’un avertissement à la base n’a pas eu l’effet escompté puisque John avait « besoin » de prendre sa voiture ce jour-là pour se rendre à son travail où son employeur confirme que « tout se passe très bien ».

Le suspect, fumant 1 joint de cannabis chaque soir, a une tendance à banaliser la consommation des drogues. « L’héroïne est une drogue douce », drogue qu’il a prise pendant 20 ans, de 1989 à 2009, et à laquelle il reconnait avoir une addiction. La juge lui rappelle « vous savez que la consommation de drogue est interdite », remarque à laquelle il répond un petit « oui », tête baissée. John essaie de se soigner mais ne sait pas comment faire. Il prend conscience qu’il a besoin d’aide.

 

Suite à ces énonciations des faits, la procureur exige une peine de 6 mois avec sursis, ainsi qu’une mise à l’épreuve de 2 ans. Mais ce n’est pas tout ! Elle demande également une révocation des 6 mois avec sursis de sa condamnation en 2015 et des soins. Elle trouve nécessaire de le laisser travailler afin qu’il garde un équilibre, mais annonce qu’il vaut mieux garantir une annulation de permis et même une interdiction de le repasser. L’avocate de l’accusé ne va pas énormément répliquer, ne s’exprimant pas très bien en français, elle montre seulement son accord quant aux soins et reconnait les faits dont son client est accusé.

La décision finale se fait entendre. John ferme les yeux, il tend l’oreille afin de pouvoir bien entendre quel sort lui est réservé. Une décision radicale qui ne fera pas durer le suspense puisque la présidente annonce que le prévenu écope d’une peine de 6 mois de prison, aménageable à 4 mois. Le retrait de son permis ainsi qu’une interdiction de 12 mois avant de le repasser sont clairement exprimés. De plus, une mise à l’épreuve avec travail lui est imposée. Le silence est lourd, celui qui a été jugé coupable, repart seul, sans dire un mot, ni un regard dans la salle.

 

Affaire suivante.

 

*Prénom modifié

Morgane Michat

Actuellement en Master de communication digitale je suis la fondatrice du blog envgrom.fr et cofondatrice d'un magazine pour les étudiantes "Studieuse Magazine"

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