A l’aube des élections Municipales, le Lyon Bondy Blog a souhaité partir à la rencontre de certains visages cachés qui œuvrent en sous-terrain pour l’élection d’un candidat. Ils tractent sur les marchés, s’affairent à la communication de la campagne, sont responsables d’une cellule, ils sont jeunes, passionnés de politique et consacrent la majeure partie de leur temps libre à militer au sein d’un parti. Le LBB est allé à la rencontre de plusieurs jeunes militants et les a questionnés sur les raisons et le sens de leur engagement, en voici les portraits.
Pierre Beaufaron est militant au Parti Communiste Français à Lyon. Graphiste à Vénissieux, il réalise les tracts et les affiches pour la campagne que les communistes mènent conjointement avec le Front de Gauche pour les Municipales. A 29 ans, il respire, pense et parle – beaucoup – PCF depuis mars 2012.
Depuis son adolescence, Pierre Beaufaron a opéré quelques changements. Il a abandonné son « look de hippie », s’est coupé les cheveux, a troqué ses pulls multicolores contre des couleurs sobres. Il porte des Clarks grises et même des pulls torsadés. Seuls quelques tee-shirts de Batman et son éternelle cigarette roulée semblent lui faire remonter le temps. D’adolescent désengagé, militant opportuniste (« comme tout le monde j’ai fait des manif de lycéens », dit-il) il est devenu, à 29 ans, un militant très impliqué dans la vie du Parti Communiste. Et vice-versa.
« Ca existe encore le PCF ? »
Installé dans le salon de son appartement dans le quartier de Guillotière, Pierre déroule son parcours de militant. À partir de 2008, il suit de près l’actualité économique. La politique de l’UE et du FMI pour répondre à la crise et la situation en Grèce le mettent « très en colère » et il décide de s’encarter en mars 2012. Il choisit le PCF, parce qu’il porte « l’idéologie marxiste » et pour ne pas être dans « un parti exclusivement d’opposition et qui ne veut pas avoir le pouvoir » comme le NPA ou FO. « On est dans un système qui devient « à l’américaine » avec deux partis (PS et UMP) très libéraux qui n’essaient plus de travailler pour les peuples. L’électorat du PS, c’est les classes moyennes. Il n’essaie même plus de se faire élire par les classes populaires, c’est un électorat qu’il a complètement laissé tomber et ça se voit dans les politiques qui sont menées. De mon point de vue, en étant vraiment de gauche aujourd’hui, on ne peut pas prendre sa carte au PS », dit-il pour expliquer son choix. Dans son entourage, la nouvelle de son adhésion au PCF a été bien accueillie et surtout sans surprise. Issu d’un milieu familial ancré à l’extrême gauche, son père, travailleur social et pompier volontaire en retraite, est syndiqué depuis plusieurs années. Sa mère est assistante maternelle à domicile et tous deux se sont impliqués dans les élections municipales de leur village de Saône-et-Loire. D’autres personnes autour de lui se sont étonnées que le PCF existe encore ou trouvent son engagement « rigolo », ce qui ne l’amuse que modérément.
« Des camarades »
Un grand-père résistant, l’autre encarté au RPR, mais plus que les opinions politiques, c’est un engagement citoyen que Pierre revendique : « J’ai du mal à comprendre que l’on soit complètement désengagé. Au moins que l’on s’intéresse, qu’on milite à sa façon dans une association par exemple ou en changeant sa façon de consommer… Mais être totalement désengagé et regarder le monde filer devant soit, ça j’ai du mal à comprendre. On nous a donné les mêmes droits de citoyens, les exercer me paraît plus un devoir qu’un droit. », dit-il. Pierre est entré dans le militantisme comme on entre en religion. Depuis sa décision de s’encarter, ce jeune graphiste a investit une majeure partie de son temps libre à la « fédé » de son parti. « Il faut que je participe au moins à un événement hebdomadaire pour considérer que je fais quelque chose et que je me sente bien avec ça », explique-t-il. Mais cette implication n’a pas assagi sa colère, celle-ci semble même nourrir son dévouement pour la cause : « Même si dans 200 ans, on n’a toujours rien fait pour faire évoluer la société, que c’est toujours aussi libéral… Je refuse de finir ma vie en me disant que j’y ai participé et que j’ai joué le jeu des gens à qui cela convient très bien », dit-il avec ferveur. En adhérant au Parti Communiste, c’est à un état d’esprit qu’il a également adhéré. Cette « camaraderie », cet esprit de groupe, semblent liés à l’Histoire du parti et conviennent bien à « l’esprit grégaire » de Pierre : « c’est très agréable car ce parti a une dimension romantique. Il y a une histoire, une ferveur, on se met à dire « on » au bout de quelques mois. Le parti a été créé par des ouvriers qui se sont regroupés pour se défendre contre des forces qui les asservissaient et cela se ressent, même si ça a plus de cent ans ». En attendant un vent de révolte, il continuera à militer, penser, parler – beaucoup – PCF, pendant un long moment encore. Sans aucun doute.