Municipales 2014 : « Nous sommes en tête de toutes les villes de l’agglomération » : Interview de Jean-Paul Bret

4DSC07489Faut-il repenser la gestion des centres d’accueil pour SDF à Villeurbanne ?

L’accueil des SDF est une compétence de l’Etat. Cela n’est pas sans intérêt pour nous mais c’est l’Etat qui paye. Pendant la période de froid, tout ce qui est mis en place est pris en charge par l’Etat. Dans une période de contraction des dépenses publiques, on ne peut pas aller sur tous les secteurs. Nous ne construisons pas les hôpitaux, par exemple. L’accueil d’urgence est de la compétence de l’Etat et ça doit continuer comme ça.

Pour autant, des collectivités locales ont des comportements différents par rapport à l’implantation sur leur territoire de centres d’accueil. Certains n’en veulent pas. À Villeurbanne, nous avons une histoire, une tradition d’ouverture, de générosité, d’humanité. J’y suis attentif et je fais en sorte que nous puissions avoir des centres d’hébergement. Cette année, on en a quand même trois. Un s’est ouvert en décembre. C’est l’armée du salut qui le gère mais c’est l’Etat qui paye. Le troisième ouvrira dans quelques jours. Chaque fois, on a un dialogue avec la préfecture et le préfet me demande ce que j’en pense. Nous essayons toujours d’avoir des réponses positives et intelligentes. Et d’accompagner l’installation des centres d’hébergement d’urgence. On va même un peu plus loin, la ville est catalyseur sur un projet de Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) dans une église qui est promise à la démolition partielle. C’est à côté de chez moi donc je donne un peu l’exemple. Cette église qui n’a plus de paroissiens va être le lieu où va s’installer ce CHRS. C’est un centre de 90 personnes, où les gens peuvent rester six mois, douze mois ou encore un peu plus. À Villeurbanne, nous avons cette humanité, cette tradition d’accueil. Ce CHRS était à Perrache avant, ça posait des problèmes, on n’en voulait plus. Il est allé dans le huitième arrondissement, il y a eu une fronde des élus locaux pour ne pas l’avoir. Il est installé provisoirement dans le sixième et le maire de l’arrondissement dit depuis trois ans : Quand est-ce qu’ils s’en vont ? On l’accueil à Villeurbanne. On a toujours accueilli la différence dans notre histoire. Et on continue avec ça.

Pour l’accueil des SDF, il existe une association : Les amis de la rue. Allez-vous lui donner plus de moyens ?

Là aussi, nous sommes dans un secteur d’action sociale où la compétence de la ville n’est pas en première ligne. C’est le Conseil Général, demain la métropole, l’Etat quelque fois. Nous, on est souvent facilitateur. On est sollicité quelques fois en investissement. Pour “Les amis de la rue”, on a donné un investissement pour les douches. On a contribué à l’aménagement. Nous sommes donc concerné. Nous avons aussi le Secours Populaire, le Secours Catholique, la Croix Rouge. Il y a beaucoup d’associations à caractère humanitaire sur le territoire de la ville. Cela n’est pas un hasard. Quand vous en parlez avec eux, en général ils sont bien accueillis. Mais cela ne veut pas dire que c’est la collectivité qui va tout prendre en charge. Sinon c’est trop facile.

Vous voulez créer un grand pôle santé à Villeurbanne. Allez-vous fermer la clinique du Tonkin ?

Là encore il faut préciser les niveaux de responsabilité. Ce ne sont pas les collectivités qui payent les hôpitaux, les médecins et la sécurité sociale. En revanche, et ça vient de se concrétiser, nous avons largement contribué à ce que s’installe à Villeurbanne le Médipôle Lyon-Villeurbanne. Sur un terrain à l’est de la ville préempté à notre demande et qui aurait pu avoir d’autres destinations. Sur ce terrain va se faire le regroupement entre ce qu’est la clinique du Tonkin, propriété du groupe Capio (un groupe privé suédois), et la mutualité, qui est plus « service public » même si ce sont des associations. On va regrouper cinq établissements qui sont à Lyon et à Vaulx-en-Velin. Cela va être un équipement important avec 700 lits, pratiquement toutes les spécialités de chirurgie, de maternité, l’accueil des urgences, etc. Ce n’est pas un hôpital public stricto sensus mais ça en a quand même le goût et la saveur, si je puis dire.

La clinique du Tonkin va se déplacer mais va continuer à s’appeler clinique du Tonkin car on n’abandonne pas les noms comme ça, même si ca sera le Tonkin-Cusset. Cela sera géographiquement un peu révolutionnaire mais uniquement pour le nom. Que deviendra le site du Tonkin ? On y réfléchit mais rien n’est décidé. La clinique du Tonkin ne va pas rester où elle est.

Que faire à Lyon de ses familles de Roms qui sont déplacés de campement en campement ? Quelle est la solution à long terme ?

C’est une question de citoyen, pas seulement d’homme politique et de maire. Mais en tant que maire, on y est confronté. Et en même temps on ne détient pas les clés, on est donc souvent dans des solutions pragmatiques. Je l’ai souvent dit : fermeté et humanité. Fermeté quand des gens s’installent dans un squat, car le rôle de la collectivité n’est pas d’accepter cet usage, sauf exception. En tout cas pas dans un temps long. Quand il y a un squat, de Roms ou d’autres, on saisit la justice et on demande l’expulsion, comme un propriétaire. On incite même les propriétaires privés, qui quelque fois ne s’en rendent pas compte tout de suite, à procéder de la même manière. On est dans une procédure de justice. On saisit le Tribunal Administratif et il statut. En général, il conclut à une expulsion, qui n’est pas forcement immédiate. Ensuite, c’est au préfet et aux forces de l’ordre de décider de la mise en oeuvre. C’est la fermeté car on ne gagne rien à laisser perdurer des situations comme ça. Devant ce genre de situations, on scolarise, quand ils le souhaitent, les enfants. Les repas coutent 50 centimes (pour le symbole). On essaye d’organiser le mieux possible l’enlèvement des ordures ménagères. Ce qui n’est pas toujours facile parce que les personnes qui viennent travailler là sont confrontées à des pratiques pas très citoyennes dans l’accumulation des déchets. Pendant cette période, on fait en sorte qu’il y ait de l’humanité par rapport à l’accueil des populations. Il n’en reste pas moins que dans les populations d’Europe de l’Est, au sens large, qui sont dans cette situation, il y a deux pôles. Un certain nombre peuvent rentrer demain dans des situations d’intégration, notamment par le travail, de manière progressive. Il y a des possibilités de logement intermédiaire qui peuvent être faites : c’est ce que fait la préfecture avec le dispositif ENDATU. Et vous en avez d’autres qui sont dans des situations de passage depuis la Roumanie. Par exemple, on a un squat sur Villeurbanne dans le quartier de la Feyssine. J’y suis allé quelques fois fois et il commence à être bien “bidonvillé”, si je puis dire. C’est-à-dire qu’il y a une installation un peu plus pérenne. Et en même temps, vous êtes parfois surpris de voir des locaux vides qui sont loués à des gens qui vont venir. Il ne faut pas être naïf là-dessus. Il y a aussi quelques fois de la prostitution, du trafic.

Il faut permettre le plus possible à des gens qui veulent s’intégrer, et qui en manifestent la volonté, de pouvoir le faire progressivement. Mais on ne peut pas penser que ce soit facile avec les gens qui ne manifestent pas cette volonté. Dans la pratique politique, on n’est jamais blanc ou noir.

La rédaction

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