D’année en année les réformes s’enchainent et les déçus sont toujours aussi nombreux. Le permis est trop cher pour les candidats et le temps de passage entre deux sessions est trop long. Cette réforme aurait pour but de faciliter l’accès du permis à tous. Pourtant les autos écoles craignent une concurrence déloyale et la mort du métier.
Chaque année entre 1 et 2 millions de personnes tentent l’épreuve redoutée du permis. Bien plus qu’une étape de la vie, c’est souvent un coût financier exorbitant pour ces dernières. Les meilleurs réussissent du premier coup, d’autres échouent et le repassent. En moyenne, il fallait prendre son mal en patience environ trois mois, jusqu’à cinq dans certaines villes. Ce temps de latence était un don précieux pour les autos écoles qui en profitaient pour ajouter des heures de conduite à l’élève afin qu’il ne perde pas la main.
« Aujourd’hui je suis obligée de licencier »
Cette réforme permet à des autos entrepreneurs de pouvoir faire passer ce même permis « sans expérience de 3 ans de conduite» témoigne Evelyne Leblois, directrice d’auto école à Vaulx-en-Velin. Bien qu’aujourd’hui pour être moniteur il faut être agrégé, n’importe qui peut ouvrir une auto-école. « Aujourd’hui La Poste fait passer le code à un jeune que je connais, il en a déjà pour 240 euros, c’est pas moins cher et ce n’est pas fait par un professionnel ». Son incompréhension est grande, « demain notre boucher pourra faire passer le permis, c’est dingue ». Cette directrice est consciente du coup important de la formation au permis mais elle témoigne de ses difficultés financières « Aujourd’hui je suis obligée de licencier pour m’en sortir, il faut bien comprendre que je dois payer mes employés, mon local et la TVA». Son auto-école facture son heure de conduite supplémentaire 47 euros dans une région ou la moyenne est de 50. Sur ces 47 euros, « il ne me reste à la fin plus qu’un euro. Une TVA à hauteur de 20%, le salaire des employés, le prix du local où je travaille, l’entretien des véhicules, à la fin il ne me reste plus que ça ». Elle arrive à un tournant d’une vie professionnelle vieille de quelques décennies, et se reconvertir à 10 ans de la retraite est difficile. « Bien sûr que je pense à fermer mais si je fais ça maintenant je fais quoi pendant les 10 prochaines années ? ».
Des permis low-coast au détriment d’un apprentissage de qualité.
« Ce métier ce n’est pas seulement l’apprentissage de la conduite, c’est aussi devoir d’apprendre la vie citoyenne. Je veux aujourd’hui qu’il y ait un « numerus clausus » de notre profession, c’est possible, tout le monde peut se prétendre professeur alors que cela est un métier qui s’apprend » continue madame Leblois. Le chargé de communication de l’auto école Marietton explique les dangers d’une réforme où les « moins scrupuleux » n’hésitent pas à casser les prix. Très attractifs pour les uns, ce dernier nous fait comprendre que « certaines auto-écoles n’hésitent pas à ne plus présenter le candidat, au delà de 2 passages au permis, et laissent l’élève se débrouiller seul ».
Pour les entrepreneurs, « qu’ils gagnent bien ou mieux leur vie que des moniteurs de petites auto écoles n’est pas la question. Le problème vient de la mutuelle et des risques qu’ils prennent. Moi par exemple je me suis cassé la jambe l’hiver dernier, je n’ai pas pu exercer pendant un moment, la mutuelle a pu me couvrir. Pour les entrepreneurs, passer aussi longtemps sans salaire et sans une telle assurance est préjudiciable. Ils n’ont pas besoin d’agrément étant donné qu’ils sont affiliés à une structure, ce n’est plus leur problème en cas de soucis même si c’est encore illégal ».
Aujourd’hui, nombre de personnes voulant le permis se focalisent sur le prix de celui-ci. Il est important de comprendre que du prix, dépendra la qualité du service. « Il faut une très bonne pédagogie », il faut, selon lui, comprendre que derrière ce coût qui peut être lourd à assumer, il y a un service rendu qui fait en sorte d’être à la hauteur.
Pas de recette miracle mais des solutions
«La vraie problématique c’est que le métier attire moins de monde. Alors que cela reste de l’enseignement et ceux qui exercent ce métier sont fiers d’apprendre ». Ce métier aurait besoin d’un nouveau visage et d’une « aide de l’État », non pas financière mais de voir la réalité des choses. Sur ce qu’on gagne « 60% repart à l’État. Il faudrait un geste sur les prix sur ces 60%, pas sur les 40% qui nous reste. La TVA, le TIPP (carburant), il faudrait réduire tout cela. »
A première vue, si cette nouvelle réforme du permis de conduire semble prendre un trajet à moindre coût pour le porte monnaie des français, cette dernière semble cependant prendre un chemin plus sinueux pour les auto-écoles, qui voient là arriver à vive allure, des pertes financières qui pourraient contraindre certains propriétaires de s’engager sur une nouvelle voie.