Premier café-théâtre de France uniquement dédié au théâtre d’improvisation, l’Improvidence propose des spectacles intimistes et populaires ainsi qu’une école pour tous les niveaux dans le 3e arrondissement de Lyon.
Le projet est né en 2014 grâce à la passion et à la détermination d’une bande d’amis, au sein de laquelle figure Thomas Debray, le directeur actuel de salle. Pour se former, il s’est aventuré deux étés jusqu’à Chicago, la « Mecque de l’improvisation » depuis les années 60. Il est aujourd’hui à la tête de deux salles incontournables, l’une à Lyon et l’autre à Bordeaux, pour les amateurs et les professionnels de l’impro.
Un passage obligé pour les troupes d’improvisation
L’Improvidence est un théâtre associatif et privé, lieu de 1000 représentations annuelles par une quarantaine de compagnies. Il a déjà accueilli 300 000 spectateurs, un public familial « de 7 à 77 ans » d’après les mots de Thomas Debray. Il jouit désormais d’une telle visibilité que même des troupes étrangères viennent y tester leurs spectacles : « Les artistes de France, de Suisse, de Belgique, ont le réflexe de venir dès qu’il y a un nouveau spectacle pour lequel ils ont envie de donner un coup de projecteur. Il y a un passage un peu obligé à l’Improvidence, parce qu’on a un public fidèle », confie-t-il.
La salle a, en effet, un rôle très important de conseil artistique mais également administratif, fiscal et juridique, parfois sur plusieurs années, auprès de troupes professionnelles ou d’amateurs qui souhaitent évoluer. Le directeur affirme que « la mission de l’Improvidence, c’est vraiment d’accompagner la création de spectacles dans les premières dates. Une fois que le spectacle a eu 50 dates ou 100 dates, il est suffisamment rodé pour pouvoir faire sa tournée en France, faire le festival d’Avignon ».
Des spectacles éclectiques et interactifs
Assister à un spectacle d’improvisation peut être intimidant car on se demande ce qu’il se passera si un comédien est en panne d’inspiration. Mais pas de panique ! La grande majorité des troupes qui se produisent à l’Improvidence sont pour la plupart professionnelles. Les comédiens ont déjà tous 15 ou 20 ans de métier. « Cela n’existe pas que le public voit un moment où le comédien n’a pas d’idée, parce que l’impro, ça ne s’improvise pas. Ça se travaille tous les jours, c’est vraiment un exercice avec lequel on apprend à lâcher prise et être dans l’ultra spontané », précise Thomas Debray. En effet, il s’agit pour les acteurs de penser plus vite que les spectateurs afin de provoquer une chute et donc une réaction émotionnelle
forte, dans le rire comme dans les larmes.
La programmation est riche : « Il y en a pour tous les goûts ». Le coup de cœur de décembre est le spectacle « Bio », joué depuis une dizaine d’années et dix mois par an dans la capitale par la compagnie parisienne des « Eux ». Le public fournit l’archétype d’un personnage ordinaire dont l’histoire sera jouée sur le mode de l’extraordinaire.
En vous rendant au café-théâtre, vous pourrez également assister certains dimanches soirs à un tournoi régional de catch d’impro. C’est une joute verbale au cours de laquelle deux équipes de deux membres chacune s’affrontent, tout en étant encadrés par un arbitre professionnel. Le public leur accorde des points et fini par voter pour la meilleure équipe. Thomas Debray souligne également qu’en janvier, Antoine Rabault viendra réaliser un solo : « Antoine Rabault fait partie de Déclic Théâtre, la troupe de Djamel Debbouze. C’est une très, très grosse performance ».
Des formations pour les profanes et les entreprises
L’Improvidence est aussi une école, presque une école de la vie si on croit les mots de son directeur : « L’improvisation, c’est ne plus avoir peur d’avoir peur, c’est se mettre dans des situations de la vie quotidienne, sauf qu’on est en train de jouer ». Il explique que « les exercices et les cours contribuent énormément à améliorer la confiance en soi, la confiance qu’on a dans les autres. La règle d’or est le non-jugement ».
Les débutants commencent par des scènes de jeu courtes centrées sur le travail de la confiance au groupe. Pour rassurer les plus timides, le tout premier cours est vite ponctué d’éclats de rire sains et partagés. La deuxième étape consiste en l’apprentissage des relations entre les personnages et comment les faire évoluer sur scène. Si la progression est longue et se fait sur plusieurs années, c’est un apport non négligeable « au développement personnel et professionnel ».
En effet, le théâtre est également un organisme de formation pour les entreprises. Il intervient sur deux axes. D’un côté, des spectacles improvisés sur mesure pour améliorer, par exemple, la cohésion d’équipe. De l’autre, le travail du « soft skills », c’est-à-dire l’agilité comportementale. « Dans la vie de tous les jours, quand on a des négociations à faire, des relations clients ou fournisseurs, parfois on a l’appréhension de présenter des travaux à la hiérarchie. Quand on a fait de l’impro, on est plus à l’aise pour présenter et accueillir les réactions, les questions. À Chicago, ils appellent ça le « react and response », apporter la réplique et la réponse émotionnelle », explique Thomas Debray.
En live chez vous et dans les salles de campagne
Contre toute attente, la période des confinements n’a pas été qu’une traversée du désert pour le théâtre mais l’occasion de faire germer de nouveaux concepts. Face à l’incapacité d’accueillir du public, l’équipe ne s’est pas découragée et a décidé d’installer un studio digne de la télévision directement sur la scène afin de pouvoir continuer les spectacles. Lors du second confinement, l’Improvidence diffusait quatre spectacles par semaine en streaming payant.
Cela a également été l’occasion de faire naître un nouveau projet nommé « Improvidence Éphémère ». Il s’agit de diffuser en live les spectacles du jeudi soir dans des petits villages où des salles sont peu utilisées. « Ça permet d’animer le territoire et faire se rencontrer les villageois », assure Thomas Debray. L’Improvidence est donc une salle de spectacle d’improvisation aux multiples facettes qui participe activement au rayonnement culturel de la ville de Lyon et tout prochainement, à la lutte contre les déserts culturels.
Aurore Ployer