À l’occasion de la journée de mobilisation nationale en soutien aux mineurs isolés le collectif soutiens/migrants Croix-Rousse a organisé, ce mercredi 5 octobre, un rassemblement sur l’esplanade de la Grande côte. Un regroupement pour porter plusieurs revendications, dont l’inscription dans la loi de la présomption de minorité.
Ce mercredi 5 octobre, c’est dans un cadre festif que plusieurs mineurs isolés et le collectif soutiens/migrants Croix-Rousse se sont réunis dans le 1er arrondissement de Lyon. Un rassemblement qui fait écho à la journée de mobilisation nationale en soutien aux mineurs isolés, initié par la coordination nationale Jeunes Exilé-e-s en Danger.
Durant quatre heures les jeunes isolés et les bénévoles ont entamé plusieurs prises de parole pour alerter sur la situation et le traitement réservé à ces mineurs. Ils dénoncent des évaluations incohérentes, une maltraitance institutionnelle et le non-respect des droits de ces jeunes mineurs isolés. Pour rappel, en 2018, l’ancien défenseur des droits Jacques Toubon dénonçait de « réelles violences institutionnelles » dans les conditions de prise en charge des mineurs non accompagnés.
« Après avoir vu un juge 80% sont reconnus mineurs »
Lorsqu’un jeune mineur se présente en France, il doit être pris en charge par les départements [NDLR : À Lyon c’est la métropole qui a les compétences en la matière]. Cependant, une grande partie de ces jeunes se revendiquant mineurs ne sont pas reconnus comme tels par la métropole. N’étant pas avérés mineurs, ces jeunes ne peuvent bénéficier de la protection de l’enfance. Un constat alarmant pour le Collectif soutiens/migrant Croix-Rousse qui dénonce des évaluations incohérentes et contestables : « La métropole évalue qu’ils ne sont pas mineurs ou qu’ils ne peuvent pas prouver qu’ils le sont. La façon dont est faite cette évaluation est très contestable. Elle est faite à charge. S’ils sont hésitants ce n’est pas net, s’ils sont trop sur d’eux c’est suspect et dans les deux cas ils ne sont pas reconnus mineur. Le résultat, c’est que 80% sont refusés. », rapporte Sébastien Gervais, membre du collectif. Ce à quoi il ajoute « Cependant, ils peuvent faire un recours en justice qui dure plusieurs mois. Ce qu’on constate, c’est qu’après avoir vu un juge, 80% sont reconnus mineurs. Ce qui interroge la façon dont ils ont été évalués au départ par le département. Ça veut aussi dire que des mineurs se retrouvent, durant plusieurs mois, à la rue sans aucun droit, sans rien… ».
La présomption de minorité : Une solution urgente
« Un jeune mineur isolé c’est un jeune arrivé en France sans famille », rappelle Sébastien Gervais. Pour le Collectif soutiens/migrant Croix-Rousse il est urgent d’inscrire dans la loi la présomption de minorité. « La présomption de minorité est notre plus grosse revendication. Ça résoudrait en partie le problème, du moins du point de vue du droit. {…} Ce principe de présomption du droit de minorité est déjà présent dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme et est rappelé par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU. Cependant, il n’est pas explicitement dans la loi, en France, il est bafoué quotidiennement comme on le constate avec ces jeunes qui se retrouvent à la rue ».
Hormis la présomption de minorité, la mobilisation portait plusieurs autres revendications comme « la mise à l’abri immédiate de tout jeune isolé se présentant comme mineur », « le maintien de la prise en charge après 18 ans si nécessaire » ou encore « le retrait du décret du 30 janvier 2019 sur le fichier d’appui à l’évaluation de la minorité (AEM) ».
« On a besoin d’être entendu »
Durant la mobilisation, plusieurs jeunes isolés ont pris la parole tant pour témoigner de leurs situations compliquées que pour dénoncer le non-respect de leurs droits. L’un d’entre eux, Souleymane, a prononcé une lettre ouverte, écrite par ces jeunes mineurs, à la métropole de Lyon. Une lettre pour demander de « l’aide sociale » et la reconnaissance de leur statut de mineur. « Nous voudrions dire à la métropole que nous avons besoin d’eux. Cela fait un moment que nous dormons dehors, que nous sommes mal, voire pas pris en charge. {…} Aujourd’hui, nous demandons à être écoutés. On a besoin d’être entendu. On a besoin d’être reconnus, considérés comme des enfants », explique Souleymane.
Deux centres d’hébergement pour des mineurs isolés grand recours ont été mis en place par la métropole de Lyon. Ces centres concernent les jeunes non reconnus mineurs qui ont fait un recours en justice. Ce sont actuellement les deux seules structures à destination de ce public en France. Elles disposent d’environ 90 places, pour le Collectif soutiens/migrants Croix-Rousse il en faudrait entre 150 et 200. De plus le collectif salue la démarche mais regrette que cela a été « obtenu via un rapport de force ».
Léo Ballery
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