Directrice générale du ballet Igor Moisseiev depuis 1994 et directrice artistique de l’Ensemble depuis 2011, Elena Shcherbakova, ancienne danseuse de la troupe veille à la préservation de l’héritage et du style Igor Moisseiev depuis sa disparition. Rencontre.
Lyon Bondy Blog : Cela fait 18 ans que vous n’êtes pas venu dans l’Hexagone. Pourquoi ?
Elena Shcherbakova : C’était la période de la Pérestroïka (90). La première fois qu’on est venu en France, c’était en 1955. On a rencontré un grand succès. C’est à partir de ce moment que les échanges entre la Russie et la France ont commencé. Tous les 3- 4 ans, on venait en France. Pour Igor Moïsseïev, c’était un pays particulier car il y a vécu durant son enfance et parlait couramment le français.
Justement, votre dernière prestation était en 1993 au Palais des Congrés de Paris. Qu’y a-t-il de changé (spectacles, chorégraphies…)?
Depuis la mort d’Igor Moïsseïev en 2007, on a créé 5 nouveaux programmes : deux Coréens, Bulgare, Serbe, Mécédonien. Bien sûr, on doit évoluer mais le plus grand défis est de mettre en scène tout ce qui a été fait par Moïsseïev et d’apprendre à la nouvelle génération à danser, en suivant les traditions pour qu’elle-même la retransmette à son tour. Certes il y a des vidéos, des archives mais le plus important est de transmettre ces danses de personnes en personnes.
Sur quels critères et qualités basez-vous le recrutement des danseurs?
Évidemment, l’apparence joue beaucoup. Il faut qu’un danseur soit discipliné envers lui-même, avoir de la volonté, ne pas se vexer. Il faut travailler et vouloir toujours plus afin de l’atteindre. On ne demande pas seulement à nos élèves (ndlr : l’Ecole-Studio) d’être de brillants danseurs avec une technique parfaite, mais d’être des danseurs-acteurs car chaque mouvement doit savoir être exprimé. Un artiste doit savoir ce qu’il veut transmettre au public.
Après des études au Théâtre du Bolchoï de Moscou, vous avez intégré à l’âge de 17 ans ce ballet, avant de devenir professeur/répétiteur puis directrice. Quel bilan faîtes-vous et quels souvenirs gardez-vous de toutes ces années?
En 1967, ma mère m’a emmené voir le spectacle d’Igor Moïsseïev et à partir de ce moment-là, mon but était de danser dans ce ballet. Quelques temps avant mes examens, il est venu assister à des cours et m’a remarqué avec deux autres jeunes. Il nous a alors invité à intégrer la troupe. J’ai eu la chance d’avoir plusieurs solos. Je suis heureuse. Mais plus le temps passe, et plus je me souviens de ces répétitions avec Igor Moïsseïev. C’était un professeur brillant, capable de danser aussi bien les danses féminines que masculines. Je poursuis ses traditions. Sa chorégraphie est grandiose, et c’est démontré. Pour l’instant, il n’y a pas de « Ballet Master » (maître de ballet) dans ce genre de danses meilleur que lui. Il a rendu aux italiens la tarentelle. Chaque fois qu’il allait en Italie, il entendait la musique et leur demandait : « Mais où est la danse? ». Ils l’avaient oubliés et Igor Moïsseïev leur a rendu cette danse, approuvée par les Italiens d’ailleurs.
Votre tournée se termine ici, à Lyon. Comment s’est passée cette tournée 2013?
On nous a très bien accueillis. On est très fier de revenir à Lyon après autant de temps. Mais d’un autre côté, il y a toute une nouvelle génération qui ne connait rien du ballet Igor Moïsseïev et c’est dommage. Actuellement à Moscou, beaucoup de jeunes parents emmènent leurs enfants à nos représentations. Cela fait vraiment plaisir de voir ces petits se mettre à danser. On aimerait qu’en France, ce soit pareil.
Le spectacle à Lyon du ballet Moïsseïev, à découvrir sur le Lyon Bondy Blog