La Fête des Lumières vient tout juste de débuter. Cette année, la ville de Lyon a souhaité organiser une célébration « À hauteur d’enfants ». Pourtant, 292 enfants sont à la rue dans la métropole lyonnaise dont plus de 130 uniquement à Lyon.
Récemment, Olivier Klein, ministre délégué au logement, s’engageait face à la représentation nationale et des associations à ce « qu’aucun enfant ne dorme à la rue cet hiver ». Pourtant, en ce début décembre, alors que les températures chutent régulièrement en dessous de 0°, 117 familles dont 292 enfants sont sans toit dans la métropole lyonnaise. À Lyon, on dénombre 136 enfants, bien que la ville dispose d’un « plan zéro enfants à la rue », et près de 80 à Villeurbanne. Pour leur venir en aide le collectif Jamais sans toit met en place des occupations d’écoles. Actuellement, 17 écoles et un collège sont utilisés pour mettre à l’abri 83 enfants et leur famille.
En octobre, le collectif Jamais sans toit et l’association C.L.A.S.S.E.S organisaient un rassemblement devant la préfecture pour alerter sur le nombre d’enfants à la rue. À l’époque, ils en recensaient 197 dans la métropole lyonnaise. Deux mois plus tard, ce sont pratiquement 100 enfants en plus dans les rues. Une augmentation colossale qui peut s’expliquer de différentes manières selon Anne-Sophie Huchard, enseignante et membre du collectif Jamais sans toit : « De nombreuses familles ont été mises à la rue. Par exemple, une maman isolée avec un enfant qui a moins de trois ans sera prise en charge par la métropole. Cependant, lorsque l’enfant dépasse les trois ans, la famille se retrouve sans toit. Donc on a eu énormément de remise à la rue par la métropole, et la Préfecture n’a pas ouvert de places. Le parc d’hébergement est saturé, donc très peu de personnes ont pu entrer dans des hébergements d’urgence. Mathématiquement, ça fait augmenter le nombre de personnes à la rue. ». Également, le recensement des familles est parfois complexe à mettre en place. Il est probable que d’autres enfants dorment déjà dans la rue sans que les associations ou les services publics ne les aient recensés.
« Avec un petit de 16 mois c’est très difficile de rester dehors »
La nuit, une petite partie des familles sont logées dans des écoles occupées, comme Leme Veshja, mère de trois enfants de 7 et 5 ans et d’un petit de 16 mois. À l’approche des vacances scolaires et la fermeture des établissements, ils craignent de se retrouver à la rue. « On ne sait pas du tout comment on va faire. Pour le moment on attend, mais la semaine qui vient est la dernière semaine d’école. », témoigne la mère de famille. Une situation impossible à tenir, précise-t-elle : « Avec un petit de 16 mois c’est très difficile de rester dehors. ». Pour le collectif Jamais sans toit, voir ces familles se retrouver à la rue est inconcevable. Il demande aux municipalités de Lyon et Villeurbanne d’agir, « On ne peut pas imaginer que ces familles retournent à la rue parce que c’est les vacances scolaires. Ce qu’on demande, c’est que les villes de Villeurbanne et Lyon mettent à disposition de l’État des gymnases ou d’autres lieux qui seraient adaptés pour accueillir les familles, le temps que la préfecture puisse les orienter. », explique Anne-Sophie Huchard.
Par le passé, ce type d’action a déjà été réalisé : « L’année dernière à Villeurbanne, on a occupé un gymnase avec une cinquantaine de personnes. Le préfet a déclenché le plan grand froid et des moyens pour prendre le relais des citoyens qui s’étaient mobilisés. », rapporte l’enseignante.
À hauteur d’enfants
Comme évoqué précédemment la fête des Lumière 2022 prétend être « À hauteur d’enfants ». Une devise pas forcément juste pour « Jamais sans toit ». Dans le cadre des célébrations, le collectif organise plusieurs événements au cours du week-end.
Un premier avait lieu ce jeudi devant l’hôtel de ville de Villeurbanne où une centaine de personnes se sont réunies. « On se sert de cette date du 8 décembre pour mettre en lumière cette situation et interpeller la ville de Lyon. Il est nécessaire que des moyens soient mis en œuvre en mettant à disposition du foncier pour ouvrir des centres d’hébergement. En trouvant des solutions avec la métropole, avec l’État. On demande que tous les acteurs se coordonnent pour que la situation d’enfants à la rue en 2022 n’existe pas. », déclare Anne-Sophie Huchard.
Place en hébergement d’urgence : ni plus, ni moins
Actuellement, il existe 220 000 places en hébergement d’urgence sur le territoire national, près de 22 000 dans le Rhône. Le gouvernement prévoyait de supprimer 14 000 places en 2023, une mesure abandonnée à la suite de mobilisations citoyennes. Si c’est une petite victoire pour les personnes à la rue, cela reste insuffisant. « Au niveau national, il n’y a pas de fermeture, mais il n’y a pas vraiment d’ouverture. », regrette Anne-Sophie Huchard. Dans le Rhône, 148 place d’hôtel ont été ouvertes par la préfecture. « 150 place d’hôtel, c’est très léger », conclut l’enseignante.
De son côté, la préfecture explique vouloir privilégier l’accès au logement. Une excuse qui ne passe pas pour le collectif. « Il n’y a pas de logement », affirme Fanny Talbot, qui s’occupe du recensement des familles pour Jamais sans toit.
Pour rappel, la mise à l’abri des enfants et leur famille est imposée par la loi à l’État, un rôle qui n’est visiblement pas assumé.
Léo Ballery
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