En cette période de canicule, de nombreuses personnes s’informent sur les températures pour savoir comment s’habiller ou prévoir des activités. Des données rendu possible grâce à l’invention du thermomètre au mercure : une invention purement Lyonnaise.
Dans l’imaginaire collectif, nombreux sont les scientifiques à revendiquer la création du thermomètre. De son invention par l’italien Santorio Santorio, en passant par Galilée avec son thermomètre à eau rudimentaire ou encore les scientifiques Allemand Fahrenheit et Suédois Celsius, chacun y va de sa main. Ces derniers étant souvent considérés comme les pères fondateurs du thermomètre au mercure, l’histoire se trompe. Cette invention serait à l’origine une invention française et qui plus est lyonnaise.
Un projet de longue haleine qui s’inscrit dans le temps
Un projet comme celui-ci demande du temps. La première esquisse démarre en 1740, date à laquelle l’ouvrage du mathématicien lyonnais Jean-Pierre Christin « Sur les thermomètres » est publié. De cet ouvrage, l’auteur y conclut ces mots : « Pour construire de bons thermomètres, je n’ose m’en assurer qu’après des observations et des expériences qui me restent à faire […] et le mercure y sera préférable à l’esprit-de-vin. » Dès lors, l’idée est née.
Des lignes qui n’ont l’air de rien et pourtant, elles sont les prémisses d’une incroyable invention puisque trois ans plus tard, sera mise au point le premier thermomètre au mercure nommé thermomètre de Lyon. Ce premier prototype aura pour particularité de proposer l’échelle centigrade de façon croissante (de 0°, qui est la température de la glace au début de la décongélation, à 100° pour l’eau en ébullition) à la différence du Suédois Anders Celsius qui avait choisi une méthode décroissante.
Cette innovation révolutionnaire est le fruit d’un travail commun. En s’appuyant sur ses propres travaux, Jean-Pierre Christin aidé par le verrier Pierre Casati ainsi que le physicien Henri Burdin ont pu créer le thermomètre qui révolutionnât les sciences. Bon nombre de thermomètres avaient été créé les décennies précédentes notamment le célèbre thermomètre de Réaumur. À la différence de ces derniers, ceux d’avant 1743 n’utilisaient pas la même graduation ou pas le même fluide (eau, alcool, huile essentielle…). De ce fait et face à ces résultats souvent moins précis, Jean-Pierre Christin, bien aidé par les travaux de l’allemand Gabriel Fahrenheit, entreprend l’idée que c’est du métal liquide qu’il faudra pour son outil. C’est dans une mine espagnole que le scientifique trouve un métal ayant les propriétés de dilatation nécessaire, à la réalisation de son projet.
Des recherches certifié 100 % lyonnaises
Lors du début des recherches, Jean-Pierre Christin, alors secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux-Arts de Lyon, animait des groupes de paroles dans les locaux de l’institution (située place des cordeliers à l’actuel couloir de bus devant l’église Saint-Bonaventure). Ancien élève Jésuite, il avait choisi ce lieu pour sa proximité avec l’observatoire scientifique du grand collège de la trinité (aujourd’hui collège et lycée Ampère de Lyon). À sa mort en 1755, il fut enterré dans une église du quartier des Terreaux, aujourd’hui totalement disparu.
Un commerce et une utilisation florissante pour l’époque
Grâce à la fiabilité de leur invention, Jean-Pierre Christin et Pierre Casati ont rapidement voulu en faire commerce. C’est dans la boutique de ce dernier, situé dans le bourg de la Guillotière que les tous premiers thermomètres ont été vendu aux populations de l’époque. L’enseigne, qui se situait à l’emplacement même de l’actuelle place du Pont, connaît un succès immédiat. À tel point que selon des estimations ce n’est pas moins de 700 thermomètres lyonnais qui ont été vendu à Paris à cette époque, tout autant qu’en Provence et dans le Dauphiné.
Concernant son utilisation, l’usage est multiple. Les premiers à l’utiliser sont les soyeux de la ville pour améliorer la production des vers de soie. S’en suivront, les médecins pour déterminer au mieux la fièvre de leurs malades ainsi que les météorologues pour effectuer des calculs comparatifs. C’est grâce à cet outil que l’année suivante, l’Almanach de Lyon publie ces toutes premières mesures météorologiques ; un outil qui sera dès lors et jusqu’à l’apparition du digital, toujours utilisés par les scientifiques. Établie sous la direction des jésuites du grand collège de la trinité leur réputation devient rapidement nationale.
Cette innovation a également permis les collectes et mesures des températures. Les saisons étant moins changeantes à l’époque, le thermomètre a pu enregistrer jusqu’à -18 degrés en janvier 1749 à Lyon. Des températures glaciales qui ne feront pas moins d’une centaine de morts dans les rues de la ville.
Un objet devenu rare et précieux avec le temps
Si aujourd’hui, l’utilisation des thermomètres au mercure est devenue archaïque voir même dangereuse pour la santé. L’académie des Sciences, Belles lettres et Arts n’en possède aucun. Le seul exemplaire encore visible au grand public se trouve au musée des sciences de Londres. Il a pu être conservé grâce à des marchands italiens qui commerçaient en Angleterre. Daté de 1750, il mesure 30 centimètres de long.
Aujourd’hui et face au digital qui a pris le pas sur le mercure, il ne faut pas oublier Jean-Pierre Christin et Pierre Castin pour autant. Grâce à eux, le froid et le chaud sont devenus des valeurs mesurables et non plus des impressions imprécises de la part des populations.
Thibaut Eperdussin
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