Un mois après son meeting à Lyon, le candidat d’En marche ! présente le projet qu’il compte mettre en œuvre s’il est élu président de la République en mai. Un certain nombre de propositions s’adresse aux quartier populaires et à leurs habitants.
Il est arrivé avec des promesses plein les mains. Enfin ! Après avoir fait attendre la France pendant des mois, Emmanuel Macron, candidat à l’élection présidentielle de 2017, lui a finalement présenté son programme, jeudi 2 mars, à Paris. Dans sa hotte, il a apporté nombre de propositions pour les quartiers populaires, éternels laissés pour compte de la politique. A 39 ans, le plus jeune des grands candidats est donné gagnant au deuxième tour dans les derniers sondages. Le Lyon Bondy Blog est donc allé jeter un œil aux idées que celui qui pourrait être notre prochain président a à nous vendre.
Voir : Les propositions de Macron pour les quartiers
« Je pense que [les quartiers] vont être au cœur de sa réflexion », assure Gérard Colomb quelques minutes avant le début de la conférence de presse. Maire de Lyon et président de la Métropole, il est l’un des plus proches soutiens d’Emmanuel Macron. « Il faut que l’on reconstruise une France où chacun et chacune ait les mêmes chances, partout ! » Les violons sont bien accordés. Le candidat lui-même ne dit pas autre chose. « Notre projet consiste à construire une vraie mobilité économique et sociale (…) à aider chacune et chacun à réussir dans notre société quand il en a le talent, la capacité et la volonté. »
Il y a donc une série de mesures spécialement conçues « pour les quartiers les plus en difficulté ». Elles touchent la lutte contre la discrimination, la sécurité, l’éducation ou encore l’emploi. Pas question de faire table rase des dispositifs de développement économique déjà existants. Le candidat s’engage à les évaluer et à les réajuster si nécessaire.
Déverrouiller l’accès à l’emploi
Mais la plus grande bataille du candidat du mouvement politique En marche !, c’est de faire sauter le verrou qui interdit l’accès à l’emploi. Pour cela, il prévoit donc de « simplifier le droit [du travail], de réformer l’assurance chômage pour en faire un droit universel et de permettre aux citoyens les plus fragiles d’accéder à des qualifications et à des formations ». Il espère notamment que cette approche permettra de favoriser ceux qui souhaiteraient se lancer dans le travail indépendant. Lui et ses soutiens placent beaucoup d’espoir en cette approche. « Pour certains jeunes des quartiers, il est plus facile de trouver des clients que de trouver un employeur », considérait encore le mois dernier Jérôme Sturlat, membre de la commission en charge de la politique de la ville à la Métropole (voir notre article du 11 février 2017).
Par ailleurs, ce programme permet de « sécuriser les chefs d’entreprise et de leur donner des perspectives sur le moyen et le long terme de manière à ce qu’ils embauchent d’avantage », selon les mots du maire de Lyon. Cette politique d’assouplissement et de baisse des coûts du travail ne concerne pas que les quartiers, certes. Mais quand même, « eux en priorité, reprend Gérard Colomb. Aujourd’hui, il y a une sorte de barrière à l’entrée dans un boulot. Dans certains quartiers le taux de chômage est de 50 %. Déverrouiller l’accès à l’emploi, c’est évidemment leur rendre service. »
Il y a enfin les propositions qui ne s’adressent pas spécialement aux quartier, mais touchent des problématiques qui les concernent en premier lieu. La laïcité : « Je n’accepterai pas que des personnes soient stigmatisées dans notre République en raison de leur religion. Je n’accepterai pas non plus qu’au nom de leurs croyances, certains dérogent aux règles de la république. » La sécurité : « Tolérance zéro. Aussi bien pour les actes de délinquance que pour l’attitude des policiers. » L’éducation et la culture : « La condition même de notre cohésion nationale ».
Mais les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Les zones prioritaires sont un sujet sensible, et politiquement porteur. Il est de bon ton de s’engager en leur faveur. Pour sa part, François Hollande n’a pas tenu ses promesses aux quartiers. Il n’aura pas été le premier et ne sera certainement pas le dernier. Alors en attendant de voir, les quartiers se permettent de douter…
Les mesures pour les quartiers
(retrouvez la synthèse du programme, ici pour le programme complet)
Education
Limiter à douze élèves par professeur les effectifs des classes de CP et CE1 en zone d’éducation prioritaire (ZEP).
Le système d’affectation garantirait, d’ici 2022, que tous les enseignants des ZEP aient au moins trois ans d’expérience. Ces derniers se verraient attribuer une prime nette de 3 000 euros par an.
Un accompagnement serait proposé à tous les élèves après les cours, en rétablissant les études dirigées après les cours en primaire.
Un « Passe Culture » serait mis en place : chaque français de 18 ans se verrait octroyer 500 euros à dépenser en activité culturelle (cinéma, livre, théâtre, etc.).
Sécurité
Création d’une police de sécurité quotidienne, supposée travailler « au plus près des Français », développer une connaissance approfondie des lieux et nouer des relation de confiance avec les habitants, qu’elle serait chargée de « protéger et d’entendre ».
Sanctions simples et immédiates pour les « petites infractions » : les représentants des forces de l’ordre se verraient confier de « nouveaux pouvoirs ». Ils pourraient verbaliser directement les auteurs de petits délits comme la consommation de petites doses de cannabis, à la manière des délits routiers. Ils seraient condamnés à des amendes, dont le montant serait dissuasif, mais sans en passer par de longues procédures judiciaires. Dans certains cas, une amende pourrait même être payée sur place.
Ne plus tolérer les incivilités : harcèlement des femmes, insultes, dégradation du mobilier urbain, crachat et autres petites incivilités du quotidien seraient sanctionnées « d’amendes immédiates et dissuasives ».
Lutter contre les contrôles abusifs : la seule proposition est de généraliser l’usage de caméra piéton pour enregistrer les contrôles, en particulier dans les quartiers « marqués par une baisse de la confiance entre la police et la population ».
Interdiction de fréquenter le quartier : les forces de l’ordre pourraient, sous le contrôle du juge, interdire à une personne de fréquenter le lieu où elle a commis ses délits.
15 000 places de prison supplémentaires seraient créées.
Travail
Pour « simplifier la vie des entrepreneurs », baisse des charges et suppression du régime social des indépendants (RSI). Doublement des plafonds pour pouvoir bénéficier du régime fiscal des microentreprises (plus avantageux).
Pour favoriser l’emploi, Emmanuel Macron compte « réduire le coût du travail ». Pour cela, il souhaite baisser les cotisations sociales de six points en remplacement du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). Pour les salariés payés au SMIC (salaire minimum de croissance), les charges baisseront jusqu’à dix points.
Pour combattre la précarité, l’aspirant à la présidence entend responsabiliser les employeurs en mettant en place un système de bonus / malus : ceux qui auront trop recours aux emplois courts paieraient plus de charges, ceux qui créeront des emplois stables moins. Les recettes supplémentaires financeraient l’assurance chômage.
L’assurance chômage deviendrait un droit universel. Artisans, commerçants indépendants, entrepreneurs, travailleurs des professions libérales et agriculteurs disposeraient eux aussi de cette protection. L’idée est de leur permettre à tous de se lancer dans ce type d’activité sans prendre trop de risque. L’assurance chômage serait aussi ouverte à ceux qui démissionnent pour se lancer dans une nouvelle activité.
Emplois francs pour les jeunes des quartiers politique de la ville* : l’entreprise recrutant en contrat à durée indéterminée (CDI) un jeune issu d’un de ces quartiers se verrait octroyer une prime de 15 000 euros sur 3 ans. « C’est comme si elle ne payait pas de charge », précise le document de synthèse de programme.
Former massivement les travailleurs peu qualifiés et les chômeurs de longue durée. Un plan d’investissement de 15 milliards d’euros sera dédié à un plan de formation professionnelle s’adressant à ceux qui en ont le plus besoin. Le candidat promet de former un million de jeunes peu qualifiés et éloignés de l’emploi ainsi qu’un million de chômeurs de longue durée peu qualifiés. Les parcours de garanti jeune, qui offre un accompagnement intensif assorti d’une allocation sera proposé à tous les jeunes qui ne sont ni scolarisés ni en emploi.
Application stricte de la laïcité : des formations seront dispensées à l’université sur les principes de la laïcité, les valeurs de la République et la lange française dans les universités pour les personnes représentant l’autorité religieuse.
le voile ne serait pas interdit dans les universités. Le candidat compte démanteler les associations qui, sous couvert de religion, s’attaquent à la République.
Il affiche sa volonté de « fermer définitivement les lieux de cultes dans lesquels certains prêchent l’apologie du terrorisme. »
La lutte contre la discrimination deviendrait une priorité nationale : des opérations de contrôles aléatoires et imprévus seraient menées « à grande échelle » en matière d’emplois et de logement.
Aides sociales : toutes les allocations sociales seraient versées le même jour du mois. Elles seraient octroyées en fonction des revenus constatés un trimestre avant au maximum, contre deux ans pour le moment.
Un « Accélérateur » d’associations serait créé pour déployer sur l’ensemble du territoire et en moins de cinq ans les « associations les plus utiles ».
* Les quartiers politiques de la ville sont désignés comme tels selon une série de critères sociologiques et économique. Les politiques de la ville sont supposées leur venir en aide.