[À l’occasion du lancement de l’Association de Défense des Droits des Enfants Placés et de leur Famille (ADDEF), début septembre et de leur site internet en cette fin de mois. La rédaction du Lyon Bondy Blog vous propose de revenir sur deux articles publiés en juillet 2022 relatifs à cette nouvelle structure.]
Après avoir rencontré l’Association de Défense des Droits des Enfants Placés et de leur Famille, A.D.D.E.F, le Lyon Bondy Blog a souhaité en savoir plus à ce sujet. Pour ce faire, nous sommes parties à la rencontre de Me Anne Leyval Granger, avocat, dont le travail s’oriente pour la lutte des violences conjugales et intrafamiliales en judiciaire.
Avec près de 310 000 enfants confiés à l’ASE chaque année, certains finissent en foyer et d’autres en famille d’accueil. Comment ce choix est fait et qui prend cette décision ? Selon le site Service public, « Le juge peut décider de placer un enfant en danger, c’est-à-dire le retirer de son milieu familial pour le protéger. Tel est le cas, par exemple d’un enfant livré à lui-même ou d’un enfant pour lequel un signalement a été fait, par un voisin, un ami, l’école, l’aide sociale à l’enfance (ASE). »
Toujours selon le site Service public, ce placement a toujours pour but la protection du mineur : « le placement d’un enfant est une mesure exceptionnelle de protection. Elle est prise par le juge lorsqu’il estime que le maintien de l’enfant dans son milieu familial l’expose à un danger. Le juge peut décider de placer un enfant lorsqu’il estime qu’un risque trop important pèse sur lui ou sur l’un des points suivants : sa santé physique, sa santé mentale ou psychologique sa sécurité physique, sa sécurité matérielle, sa moralité et son éducation ».
Anne Leyval Granger, avocat dans le deuxième arrondissement de Lyon, a déjà eu des affaires concernant le placement des enfants. Sujet difficile à aborder, cette dernière explique que dans notre société de vrais problèmes persistent. « Aujourd’hui, pour moi, notre système n’est pas satisfaisant. En effet, il faut savoir que, dans ces cas-là, nous avons droit à une seule audience par an. Il n’y que très peu de moyen d’obtenir de nouvelles audiences même si de nouveaux faits ont lieu ou que la situation change. Alors je ne dis pas que c’est parce que les juges ne le veulent pas. C’est souvent parce que les juges ont une charge de travail énorme et qu’ils ne peuvent tout simplement pas nous en accorder une autre. »
Grand défenseur des droits des femmes, Me Anne Leyval Granger pointe aussi du doigt des incohérences au niveau de la justice.
Une justice bancale et indigne
« Je défends des femmes qui sont victimes de violences conjugales, d’enfants qui sont victimes de violences intrafamiliales et « Je défends des femmes qui sont victimes de violences conjugales, d’enfants qui sont victimes de violences intrafamiliales et là souvent, très souvent, le juge confie l’enfant à l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) de manière externalisée chez le père. C’est-à-dire que la mère n’a pas ses enfants, c’est le père, donc le mari ou le compagnon violent qui a la charge des enfants par un placement externe via l’ASE. Parce que la mère victime de ces violences apparaît comme instable et qu’on évoque le fait qu’elle soit aliénante contre ses enfants. Ce syndrome d’aliénation parental utilisé quasiment systématiquement par le juge des enfants ou le juge aux affaires familiales, doit être éradiqué de toute motivation d’un jugement !» continue Me Anne Leyval Granger.
Une injustice, que ces mères appellent aujourd’hui « être désenfantée ». « Il faut que le monde se rende compte que ces femmes, qui osent dénoncer des violences conjugales et intra-familiales, se trouvent privées de leurs enfants. Ces derniers se retrouvent soient placés à l’ASE ou avec le père qui est violent. La mère n’a donc plus accès à ses enfants que par des visites médiatisées qui se passent mal puisque les structures d’accueil ne sont pas satisfaisantes. La mère finit donc par être complètement écartée de son enfant. » témoigne Anne Leyval Granger.
Le mineur est donc placé en foyer ou en famille d’accueil où peu de contrôles ont lieu. « En foyer et famille d’accueil il y a peu de contrôle. D’ailleurs, il y a quelque temps, j’ai eu un cas où le petit était en foyer et a subi une tentative de viol par un autre enfant placé. Nous avons eu beaucoup de difficultés à l’extraire du foyer pour le protéger, et même, pour avoir une audience auprès du juge des enfants. Donc, pour vous répondre, non, les contrôles ne sont pas suffisants » poursuit l’avocate.
Les oubliés de la République
Peu de contrôles et une rupture totale chez l’enfant avec sa famille ont des effets à long terme catastrophique pour le mineur. Selon l’enquête de Catherine Durant, « l’insupportable réalité des enfants placés » publiée dans le magazine Marie Claire, seulement 20 % de ces enfants rentreraient chez eux. Pour ceux restés au sein de l’ASE, les conditions de vie pour le jeune qui atteint sa majorité sont très compliquées comme le raconte cette enquête réalisée par Brut.
Abandonnés par la société et la République, ces enfants de l’Etat se retrouvent sans aucune aide pour ceux qui n’ont pas accès aux « contrats jeunes majeurs » jusqu’à leurs 21 ans.
Si aujourd’hui des associations voient le jour pour accompagner ces jeunes, un long chemin reste encore à parcourir comme le raconte Jocelyne Giontarelli, présidente de l’Association de Défense des Enfants placés et de leur Famille. « Le but de notre association est très clair, faire respecter les droits fondamentaux de ces enfants […] les accompagnés eux, et leur famille pour leurs donner toutes les chances de réussite au même niveau que n’importe quel autre enfant ».
Un reportage que vous pouvez retrouver via ce lien : https://lyonbondyblog.fr/LBB/enfants-places-une-nouvelle-association-pour-les-accompagner-eux-et-leurs-familles/
Auriane Devaux
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