Apres les articles sur l’arrivée, le jugement et le quotidien du détenu, nous passons à l’une des activités possibles en détention : les études.
L’ensemble des maisons d’arrêt, ainsi que les centrales, proposent la possibilité d’étudier. Une aile scolaire est affectée à cela dans chaque établissement pénitentiaire. Encore une fois, l’autorisation, ou non, d’étudier relève du pouvoir discrétionnaire du directeur d’établissement. Celui-ci peut très bien refuser l’accès aux cours, en invoquant des raisons de sécurité pour un détenu ayant le statut DPS (détenu particulièrement surveillé). Pour autant, il semble difficile de faire le mur en cas d’école buissonnière…
A la décharge du directeur, il est à noter que dans certaines procédures, plusieurs mis en examens dans la même affaire se retrouvent dans la même prison. Pour des raisons de non concertation entre eux, le juges aux libertés et de la détention, donne injonction au directeur de faire en sorte que les présumés innocents ne se retrouvent pas ensembles. La demande de scolarité peut alors servir à se retrouver, malgré l’interdiction.
Une fois l’accord obtenu par le directeur, le détenu doit faire son paquetage pour un changement de cellule, et se voit délivrer une affectation au bâtiment scolaire. Les cours sont dispensés dans des salles prévues à cet usage. Bien souvent, il n’y a pas de prises électriques, pour éviter que celles-ci servent de boites aux lettres « fantômes ». Environ 20% des détenus sont scolarisés. Les mineurs en représentent plus de la moitié. La scolarité est un droit, mais pas une obligation, hormis pour les détenus mineurs. Quel que soit le diplôme en préparation, les cours se limitent entre 6 à 12 heures par semaine, en moyenne. Autant dire que la polémique sur les rythmes scolaires n’a pas franchi les murs d’enceintes des prisons.
Le personnel pénitentiaire ne fait qu’assurer les mouvements depuis les cellules jusqu’aux salles de cours, et inversement. Les cours sont dispensés par des fonctionnaires de l’éducation nationale (source : ministère de la justice), ainsi que par des bénévoles extérieurs dont les rangs les plus fournis proviennent du Groupement Etudiant National pour l’Enseignement aux Personnes Incarcérées (Génépi). Bien souvent, il s’agit donc d’étudiants ou de professeurs des écoles.
En complément des cours avec professeurs, il y a le Centre National d’Etudes à Distance (CNED). Tous les détenus ne sont pas égaux sur cette option car l’inscription au CNED n’est pas gratuite. Selon le type de diplôme, l’addition peut s’élever à plusieurs centaines d’euros. Si le prétendant à cette formule est indigent, il sera compliqué, mais pas impossible d’obtenir une prise en charge par le comité d’insertion et le service sociale de la prison.
Détenus et étudiants libre sur un même pied d’égalité face aux examens
Le passage des examens du diplôme se fait en détention. Une salle est mise à disposition par l’établissement pénitentiaire. Un fonctionnaire de l’éducation nationale veille à ce qu’il n’y pas de fraudes durant le temps de l’épreuve. Les sujets sont remis au moment de l’examen, et les candidats sont sur un pied d’égalité avec l’ensemble des élèves du territoire national passant le même diplôme.
C’est un comble. Les inscriptions se font en tant que candidats libres par l’administration pénitentiaire. Les plis des épreuves étant anonymes, ils sont corrigés avec ceux des étudiants, vraiment libres, par les académies concernées. Par exemple, un détenu préparant un CAP ou un BEP à la maison d’arrêt de Villepinte sera corrigé par l’académie de Créteil. En cas de réussite, un diplôme sera remis sans qu’il soit fait mention du lieu de passage de celui-ci. En cas de réussite à un Diplôme d’Accès aux Etudes Universitaire (DEAU), le candidat détenu à la maison d’arrêt de Nanterre se verra remettre un diplôme par la très prestigieuse université de la Sorbonne.
Au premier semestre 2002, sur 16 357 scolarisés : 8 439 étaient en formation de base (de l’alphabétisation à la préparation au CFG 1), 4 558 suivaient des cours de niveau 5 débouchant éventuellement sur un CAP, un BEP ou un brevet, 1 242 étaient au niveau du second cycle du second degré et 304 à un niveau universitaire (Source : Bien lire)
Il serait intéressant de savoir le taux de récidive pour des détenus ayant obtenu un ou plusieurs diplômes en détention. Il y a fort à parier qu’il serait en-dessous de celui des détenus n’ayant passé leur temps que devant le petit écran.
Toujours est-il qu’un réel effort est fourni par l’administration pénitentiaire pour mettre un minimum de moyens à disposition des détenus faisant une demande d’études. A défaut de mettre en pratique ce dicton de Victor Hugo : « ouvrez une école, et vous fermerez une prison », on fait rentrer l’école dans la prison. Et les études peuvent faire partie du cursus carcéral.