TGI de Lyon, 14ème chambre, comparutions immédiates
Bob* comparait aujourd’hui pour des faits relativement simples, dixit la présidente. Il lui est reproché, entre 2009 et 2015, le transport, la détention et d’avoir offert et cédé de l’herbe. Les policiers ont également trouvé une arme automatique chez lui.
Tout part d’un renseignement anonyme. Bob, la trentaine, utiliserait les locaux de la société dans laquelle il travaille pour de la cannabiculture. Les policiers mettent en place une surveillance et obtiennent une ordonnance de perquisition. Il est interpellé et désigne le lieu du délit – qui n’est pas son entreprise.
Les policiers trouvent 1400 g d’herbe, une balance électronique, du matériel pour emballer et un calibre 765 (arme de catégorie B) avec chargeur et cartouches.
La présidente continue de lire le procès verbal. Les policiers ont trouvé trois variétés différentes chez Bob : Dans le salon, de l’herbe avec un taux élevé de THC (17 %), dans son dressing (7 %) et ailleurs (5 %).
Bob reconnaît faire de la culture outdoor pour sa consommation personnelle, ce qui représenterait 500 grammes par an. Il a acheté les graines sur Internet et a planté diverses variétés en avril/mai.
Sur l’arme, Bob déclare l’avoir subtilisée à un ami pour ne pas qu’il se suicide. La juge : « Arme + drogue, ça peut donner quelque chose de différent ! Dommage que vous n’ayez pas donné le nom de votre ami. »
On entend ensuite des témoignages de personnes que Bob a dépannées et avec qui il fumait. Bob reconnaît avoir vendu à trois reprises.
Et la juge d’enchainer : « Votre compagne explique que vous consommez depuis longtemps. Elle n’est pas associée à ça. » La lecture du procès-verbal est terminée.
« — Vous confirmez tout ça ? – (il hésite) C’est l’arme de mon père. – Pourquoi l’avoir approvisionnée ? – Je n’étais pas au courant. – Sur les stupéfiants, vous reconnaissez tout ? Vous savez que c’est interdit ? – Oui bien sûr. Je m’en excuse. – Avez-vous déjà essayé d’arrêter ? – Pas sous ces conditions. — Votre patron était au courant ? – Non. »
Jamais condamné auparavant, Bob est chef d’atelier depuis huit ans avec un salaire confortable, il avoue fumer dix joints par jour depuis l’âge de 16 ans. « — Vous n’avez pas peur de l’addiction ? – Non. – On a joint votre employeur (sic). Il n’a rien à vous reprocher. Vous êtes un excellent élément. »
Le proc dénonce un « usage forcené du cannabis » et estime par ailleurs que « l’aspect trafic très largement minimisé ». Sur l’arme : « Il peine à convaincre. Il reste le constat froid de l’arme prête à servir. » Il requiert 12 mois, dont 6 avec sursis et mise à l’épreuve.
L’avocat de la défense est en forme. Il dénote des autres avocats (commis d’office) de l’après-midi. Il commence son plaidoyer sur les chapeaux de roues : « Ce n’est pas le capo dei capi. Je vais dresser le tableau : Il est salarié depuis 8 ans. C’est un excellent salarié, il est fiancé avec un mannequin depuis plusieurs années. Il travaille tellement qu’il dort souvent au travail. » Bob emarge à plus de 3000 € par mois.
« Sur ce qu’a dit le procureur (NDLR sur le trafic), “que nenni” ! » Et d’enchainer, cette fois plutôt d’accord avec le proc : « Vous avez raison, Monsieur le Procureur, des soins sont nécessaires, obligatoires. Il l’a reconnu, a donné l’identité des personnes. »
Sur l’arme : « L’aspect arme prête à être utilisée peut poser interrogation, mais sa première déposition est très claire. Son père est violent, bipolaire. Je mets au défi n’importe qui dans la salle de dire qu’il n’aurait pas fait pareil. J’aurais fait pareil ! »
Et de conclure : « Nous nous rejoignons sur l’obligation de soins. C’est un délinquant primaire, vous ne le reverrez plus. »
Après délibérations, Bob prend huit mois de sursis avec mise à l’épreuve et obligation de soins. Il repart libre. Tant mieux pour lui.
Au suivant
* Le nom est changé