TGI de Lyon. 14ème chambre
Martin* est en détention provisoire depuis déjà un mois. Le tribunal avait alors renvoyé l’affaire en demandant une expertise psychologique. Cependant le docteur n’a toujours pas fourni le profil de l’accusé. « Ca arrive de plus en plus souvent ! » Se désole la présidente. Du coup, la cour va renvoyer l’affaire à une date ultérieure. Soit Martin retourne en préventive. Soit il ressort libre jusqu’au renvoi de l’affaire pour la seconde fois.
Fait suffisamment rare pour être souligné, c’est l’avocat de la défense qui va lancer les débats. Mais revenons d’abord sur les faits. Martin se retrouve devant la justice pour conduite sans permis en récidive légale sous l’emprise de l’alcool et de stupéfiants et pour refus d’obtempérer. « Je me demande presque s’il n’a pas fait exprès ! » Se lamente son avocat, qui voit là un coup de folie et qui regrette l’absence d’expertise qui « porte grief à Martin ». « Je sais que Madame le Procureur va demander un mandat de dépôt. C’est normal. »
La proc’ ne fera autre chose que de donner ironiquement raison à son adversaire : « Je suis tellement contente de l’ordre inversé (Ndlr, le fait que la défense parle en premier), même si la défense a le dernier mot. En effet, je requiers fermement la mise en détention ! » Elle met par ailleurs en évidence les nombreuses condamnations du prévenu. Douze mentions sur son casier judiciaire en tout. Et d’enchaîner : « J’ai du mal à croire qu’en un mois d’incarcération il ait changé. Ca ne l’avait pas changé les fois précédentes ! »
L’avocat de la défense ne tient plus en place. C’est de nouveau à son tour : « Il a effectivement fumé quelques joints. » Concède-t-il tout en notant l’absence de faits analogues pendant plus de quatre ans. Soit quelques mois avant la fin de la récidive légale. Il enchaine : « La toxicomanie de Martin n’est pas un problème (sic). Nous sommes le pays qui consomme le plus de cannabis. Il faudrait arrêter la plupart des jeunes de 17 ans. (…) On le fait signer tous les jours. Si il ne vient pas, boum ! Retour en prison » Et de conclure : « Un mois de détention pour ce type de faits (…) Le mandat de dépôt ne doit pas être systématique en comparutions immédiates. D’autres personnes méritent plus que lui d’aller en prison. » Il est vrai que le mandat de dépôt est la règle plutôt que l’exception en comparutions immédiates. De nombreux professionnels de la justice le notent.
La présidente : « Vous avez quelque chose à dire ? – C’est pas en prison qu’on se réinsère » Sur ces mots du prévenu, l’audience va délibérer.
L’affaire sera finalement renvoyée quelques semaines plus tard avec le maintient en détention pour Martin. « On va attendre l’expertise avant d’envisager ce qu’on fait de vous » Conclut la juge. D’ici là, on espère que le médecin aura fourni l’expertise psychologique.
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* Nom changé. Pour toutes les chroniques de cette rubrique, le nom utilisé sera Martin, le nom de famille le plus répandu en France.