La circulaire Guéant du 31 mai dernier n’en finit pas de faire parler d’elle ! Dimanche 18 décembre des étudiants étrangers et des sans-papiers ont défilé dans les rues de Paris (ils étaient entre 1000 et 5000). Principales revendications : le retrait de la circulaire Guéant et plus généralement la régularisation de tous les sans-papiers. Julia nous livre son point de vue.
Cette manifestation s’inscrit au cœur du débat lancé par la gauche sur un éventuel droit de vote des étrangers aux élections locales. Projet de loi fortement dénoncé par la droite lors, notamment, de la convention nationale du 29 novembre dernier où Jean- François Copé rappelait que le droit de vote est naturellement lié à la nationalité française, et de ce fait un tel débat n’a pas lieu d’être.
C’est indéniablement un argument irréfutable, le droit de vote est un attribut exclusivement réservé aux citoyens français, ça fait partie intégrante de sa définition. Alors à partir de là, la question ne pose pas, les étrangers ne pourront jamais prétendre à ce droit tant qu’ils n’auront pas acquis la nationalité française. Pourquoi alors la gauche s’entête-t-elle à lancer le débat sur la place publique ? Peut-être tout simplement parce que ces mêmes étrangers vivent en France depuis plusieurs années, qu’ils travaillent sur le territoire, qu’ils paient de surcroit des impôts et que leurs enfants sont scolarisés dans des écoles françaises. De plus le plus souvent il y a un désir de la part de ces résidents étrangers de participer plus activement dans la vie politique de leur pays de résidence, cela montre donc bien une volonté de s’intégrer, de s’identifier à cette « identité nationale » qui est la référence absolue pour les citoyens français. Cet état de fait ne va-t-il pas à l’encontre de certaines critiques qui pointent du doigt des pratiques communautaristes et un défaut d’intégration des immigrés ?
La revendication des sans-papiers fait également écho à la « campagne » de régularisation initiée entre le 1er et le 30 septembre 2009 en Italie. Procédure exceptionnelle de régularisation de la situation des travailleurs domestiques et des aides à domiciles sénégalais. En-effet pourquoi ne pas faire de même en France, pourquoi est-il si compliqué d’accorder la régularisation à des étrangers qui participent à la vie économique du pays, et qui de ce fait aspirent aux mêmes droits que le citoyen français lambda ?
Les étudiants étrangers aussi revendiquent leur droit de pouvoir rester en France à la fin de leurs études. C’est cette politique d’immigration de plus en plus restrictive qui est dénoncée. De plus, dissuader les étudiants étrangers de pouvoir rester en France afin d’avoir une première expérience professionnelle dans un pays qu’ils ont appris à aimer est d’une certaine manière une façon de dissuader les futurs étudiants étrangers de choisir les universités françaises. Etrange paradoxe pour un pays qui bataille afin d’acquérir une meilleure visibilité internationale de ses universités. En quelque sorte c’est toute l’image de l’enseignement supérieur français qui s’effondre.
Que peut-on attendre d’un pays qui ferme les portes de ses universités dans un objectif de chiffre et de répression et qui tire donc un trait sur les nouveaux talents. Quel genre de valeurs la France peut-elle diffuser si elle refuse de s’ouvrir au monde, de partager son savoir et de profiter des autres cultures. Cette circulaire est d’après moi très dangereuse pour cette image de marque que le gouvernement souhaite promouvoir. Petit rappel de la conférence du forum Libération « Peut-on se construire sans frontières ? ». C’est un philosophe qui nous livre une réponse : on ne peut pas se construire et prospérer sans autrui ; l’autre, l’étranger est notre miroir, il nous renvoie à notre propre intériorité car il rend notre manière de voir les choses plus objective et cela permet de nous améliorer constamment. Il en va de même pour un Etat qui a besoin de l’apport d’autres Etats, d’autres cultures afin de s’enrichir et d’améliorer sa manière de fonctionner. Notre pays a donc tout à perdre à se refermer sur lui-même. Dommage, d’autres Etats profiteront de ces richesses à sa place.