Deux groupes, deux trajets, deux idéologies. L’affrontement semble inévitable.
Mais la menace est écartée, huit camionnettes barrent l’accès principal de la place Carnot et des groupes de quelques CRS font des rondes, observant le lent rassemblement des jeunes nationalistes (estimés à 200 participants). Vêtements noirs, mines sombres, ils se préparent. A notre approche ils reculent, refusent de nous parler, les seuls autorisés à nous répondre sont les organisateurs invisibles.
Par chance un homme en costume s’approche, élu au Conseil municipal de Vénissieux, Yvan Benedetti accepte de me répondre à moi, bloggeuse et soucieuse de comprendre ce qui pousse ces jeunes à la haine raciale.
Après cette petite séance de questions/réponses je décide d’aller faire un tour de l’autre côté de Lyon à la manifestation « anti fasciste ». Me voilà face à un cortège bien peu homogène, 2500 manifestants de tous horizons. Des écologistes, des socialistes, des anarchistes, des communistes, des membres de la Ligue des droits de l’homme et des citoyens lambda. Des individus motivés et remontés contre les jeunes nationalistes, prêt à en découdre, mais les forces de police en ont décidé autrement. Tous les ponts faisant la liaison entre la presqu’île et Saint-Jean sont barrés, tout cela ressemble fort à des postes frontières séparant des gens incapables de vivre ensemble sans s’entretuer. Deux idéologies qui s’affrontent, l’ambiance est électrique, un peu plus et on se croirait sur un champ de bataille.
jeunes manifestants dans le cortège anti fasciste.
Viennent ensuite les traditionnelles provocations entre CRS et jeunes encagoulés, finalement les extrémistes sont des deux côtés. Quelques pavés lancés mais les cuirasses des forces de l’ordre sont bien difficiles à abattre, ils répliquent avec des bombes lacrymogènes provoquant la colère des jeunes. A travers cela c’est toute la révolte et la colère accumulées contre ces représentants de l’Etat qui s’expriment.
De manifestants en manifestants une idée centrale se dégage. La crise a mis en lumière et a accentué l’émergence et le renforcement de ces groupuscules extrémistes qui entendent se refermer sur les valeurs dites « pures » de la France, pensant que l’étranger est la cause de tous les mots. La société est malade, elle se voile encore la face en pensant que l’immigré est seul et unique responsable de la sombre période dans laquelle nous sommes engagés.
Finalement tout cela fait oublier la réalité. Mauvaise gestion gouvernementale, absence de régulation des marchés financiers, mauvaise coordination internationale, système économique malade et dépassé…En effet les causes de la crise actuelle sont multiples, il est donc étonnant et réducteur d’imputer la faute à une catégorie déjà en grande difficulté du point de vue social et économique. Ah le mythe de l’étranger voleur d’emploi français…
La rhétorique n’est point nouvelle, il fut un temps en 1933 où les citoyens décidèrent de voter pour un parti nazi car en pleine crise économique ils pensaient que les politiques antisémites permettraient de régler le problème. Bien sûr nous n’en sommes pas là mais certains acteurs de la société ont la conviction qu’il est de leur devoir d’étouffer dans l’œuf les revendications de ces groupuscules extrémistes. Bien que ceux-ci mettaient en avant le fait de manifester pour le retrait des troupes françaises en Afghanistan, il se cache derrière ces « bonnes » attentions toute une rhétorique nationaliste et raciste.
passage de la manifestation anti fasciste place des Terreaux
Deux manifestations antagonistes, porteuses de problèmes profonds au sein de notre société, qui révèlent un mal-être général sans apporter réellement de solutions. En effet où est la réaction du gouvernement ? L’exacerbation des courants nationalistes violents sont-ils si peu importants pour que l’Etat ne daigne en faire référence ? Ou bien cela sert-il les intérêts de la majorité en place visant à mettre en avant des réformes discriminatoires de lutte contre l’immigration (telle que la circulaire Guéant pour ne citer qu’elle) ? Affaire à suivre.