David Kimelfeld : « Macron peut amener un débat économique intéressant dans les quartiers »

David Kimelfeld a de nombreux talents. Souvent décrit comme le « dauphin » du maire de Lyon, Gérard Collomb, il est pressenti pour lui succéder. En attendant, il dirige la mairie du 4e, est premier secrétaire du Parti socialiste (PS) dans le Rhône et premier vice-président du Grand Lyon, où il est en charge de la politique économique et du pilotage des politiques d’insertion et d’emploi d’insertion. Mardi 18 novembre, il est venu soutenir Hubert Julien-Laferrière, qui annonçait sa candidature aux élections législatives de 2017 dans un café de la Croix-Rousse. Le Lyon Bondy Blog en a profité pour lui mettre le grappin dessus, et lui poser deux ou trois question sur la politique économique et sociale dans les quartiers.

 

Le dernier schéma de développement économique de la Métropole propose des outils pour renforcer les aides aux entreprises qui créent de l’emploi. Lesquels peuvent bénéficier aux quartiers populaires ?

Il y a premier outil. : l’aide aux structures qui sont sur le terrain et qui accompagnent ces créateurs et créatrices d’entreprise dans les quartiers. On a une énergie très intéressante dans ces lieux, avec des gens qui n’ont pas forcément envie de devenir salariés, mais qui ont des idées. Il faut les accompagner pour créer une entreprise a partir de ces idées.

Le deuxième est de proposer des locaux, soit des pépinières d’entreprises, soit des locaux professionnels. Dans ces zones, les gens ont besoin de locaux pour démarrer leurs activités. Nous allons donc développer trois pôles entrepreneuriaux : un à La Duchère, un à Givors , et un dernier à Neuville-sur-Saône, qui sera un peu moins au cœur des quartiers. Dans cet environnement, on mettra en place des associations pour accompagner les entreprises dans leur problématiques de ressources humaines, de formation ou de levée de fonds.

Ces locaux seront-ils spécialement destinés aux habitants du quartier dans lequel ils sont implantés ?

Non, ils seront ouverts. On ne dira pas à celui qui arrive d’ailleurs :  »Vous ne pouvez pas entrer ici. » Mais on peut raisonnablement penser que les créateurs et créatrices d’entreprises de La Duchère, Givors et des quartiers alentours seront tentés de s’installer dans ces pôles-là. Cependant, il est aussi important d’apporter de la mixité, y compris dans ces locaux professionnels. Le fait que des gens viennent d’horizons variés favorisera l’échange d’expérience.

Cela ne risque-t-il pas de finir comme les zones franches urbaines (ZFU), destinées au développement économique des zones en difficulté sociale, et où l’on a constaté que finalement, peu de gens venaient de la zone concernée ?

Dans les ZFU, ce sont des entreprises qui viennent s’installer pour bénéficier d’allègements fiscaux. Là, ce n’est pas tout à fait la même chose : ce sont des locaux où l’on accueille uniquement des créateurs et créatrices d’entreprises à travers une pépinière ou un hôtel d’entreprise.

Par ailleurs, nous discutons avec la Région pour essayer de la convaincre de nous accompagner financièrement sur ce sujet-là. La Métropole, elle, n’a pas le droit de fournir des aides directes aux entreprises.

Savez-vous combien d’argent pourrait être mis sur la table ?

Pour l’instant non. Mais ce ne sont pas les chiffres qui importent, c’est plutôt de permettre à de jeunes créateurs qui viennent des quartiers et n’ont pas forcément de capital à la base de pouvoir se constituer un premier capital.

Au niveau national, quel candidat soutenez-vous pour représenter la gauche à l’élection présidentielle ?

Au regard des sondages, il paraît difficile d’envisager une candidature de François Hollande si on veut avoir un candidat de gauche au second tour. Moi, je suis assez sensible à la démarche d’Emmanuel Macron. C’est une démarche très dynamique, qui montre que les clivages artificiels qui perdurent depuis des années peuvent être battus en brèche et qui en même temps porte des valeurs de gauche, même si tout le monde n’est pas d’accord sur ce point là.

Et sur le thème des quartiers, je pense que c’est quelqu’un qui est capable de sentir, de comprendre et d’apporter des aides, un accompagnement ainsi qu’un débat intéressant.

Que pourrait-il faire ?

Avez-vous vu son intervention sur Médiapart ? (mercredi 2 novembre, où il estime que le travail offert par Uber aux jeunes des quartiers vaut mieux que le chômage mais qu’il faut apporter une protection et leur garantir une « trajectoire de progression » NDLR). C’est bien d’être debout sur la table et de s’écrier :  »Pauvres allocataires du RSA ! », mais de n’avoir aucune solution à leur proposer en disant que toutes les autres solutions de remise à l’emploi ne fonctionnent pas. C’est autre chose de dire :  »Ma foi, il y a un certain nombre de jeunes qui font le choix à un moment donné de trouver un boulot, de trouver un job. Ça peut être avec Uber, quitte à travailler 50-60 heures par semaine pour gagner le SMIC ».

Ne pensez-vous pas que cela puisse provoquer de la « casse sociale » ?

Non car je pense que l’enjeu n’est pas de les maintenir dans ces fonctions-là, mais de les amener vers d’autres métiers après. C’est là que nous devons prendre nos responsabilités. Je suis très intéressé par la dynamique de Macron. Il ne s’est pas encore exprimé sur de nombreux sujets aujourd’hui. Mais je suis sa démarche avec attention (l’ancien ministre a dévoiler l’esquisse d’un programme ce même mardi, dans l’après-midi NDLR).

Beaucoup de quartier populaires se « boboïsent » (les prix montent, la population et l’ambiance changeent, comme à La Guillotière aujourd’hui, à Croix-Rousse il y a quelques années). Est-ce un processus que vous essayez de favoriser ?

On n’essaie ni de favoriser ni de résister à la « gentrification » (terme consacré pour désigner la « boboïsation » NDLR) Moi, je dis simplement qu’il faut y prêter attention. L’enjeu, aujourd’hui, c’est de faire une ville pour tous. Il faut donc rappeler que dans ces quartiers, il existe encore une mixité sociale, avec une population en difficulté, et veiller à ce qu’il continue d’y avoir des acteurs qui répondent aux besoins de ces personnes en difficulté.

Comment, vu que les prix de l’immobilier flambent ?

Oui, mais en même temps, dans ces quartiers, d’abord, il y a du logement social. Puis il y a des gens qui vivent dans des appartements avec des loyers extrêmement modérés. Mais il faut que l’on continue à faire des progrès en matière d’augmentation du logement social.

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