La journée mondiale d’action pour le climat, coordonnée par l’ONG 350.org, a pris place samedi dernier dans plusieurs grandes villes du monde. Lyon n’a pas manqué au rendez-vous et un collectif de citoyens, épaulés par des associations et des partis, a organisé au marché de la Croix-Rousse une rencontre avec des élus locaux, suivie d’un rassemblement pour le « siège » de l’Hôtel de Ville. La journée s’est terminée par une marche pour le climat jusqu’à la place Bellecour.
Sifflets perçants, tambours battants, et olé géants, le siège pacifiste de l’Hôtel de Ville se veut bruyant, festif et rassembleur. Selon les organisateurs, 15 000 personnes (10 000 selon la police) ont encerclé le bâtiment avant de défiler jusqu’à la place Bellecour cet après-midi, arborant des pancartes et scandant des slogans écologistes à destination du public et des élus. Vincent Verzat, porte-parole de l’événement et vidéaste, explique : « si on fait le siège de l’hôtel de ville, c’est parce qu’il est encore possible d’impulser un vrai changement au niveau des villes ! C’est là où on vit, c’est à notre échelle ! »
En effet, Isabelle Mallecourt, membre de l’association Attac, dénonce l’utilisation de fonds public pour le financement de projets dans les énergies fossiles, responsables du dérèglement climatique. La Caisse des Dépôts et Consignations, une institution financière française chargée entre autres de la gestion de fonds d’épargne (livret A, etc.) et des régimes de retraite, investit par exemple dans des projets polluants comme l’importation de gaz de schiste d’Algérie et une mine de charbon en Allemagne. Ces investissements peu transparents et générateurs de gaz à effet de serre sont dénoncés tant au niveau national qu’au niveau des villes.
La Métropole de Lyon a aujourd’hui l’obligation de mettre en place un Plan Climat afin de réduire ses émissions de gaz à effet de serre et sa consommation énergétique. Cependant, rien ne garantit que ce plan soit suffisamment ambitieux et c’est tout l’objectif de cette journée : faire pression sur le conseil de la Métropole de Lyon afin de lui faire émettre un vœu de désengagement des énergies fossiles.
Engagement pour l’écologie ou capitalisme vert ?
Côté élus, si chacun semble s’accorder sur l’ampleur de la crise écologique, la rencontre cristallise des divergences politiques. Bruno Charles, vice-président de la Métropole responsable du Plan Climat, affirme sa volonté écologiste : selon lui, à cause des gaz à effet de serre, le climat de Lyon pourrait ressembler à celui de Madrid si on ne fait rien d’ici 2050, voire à celui d’Alger d’ici 2100. L’engagement de la Métropole se traduit par exemple avec le plan Écoréno’v qui vise à améliorer les performances énergétiques dans l’habitat privé. D’ici la fin du mandat, 18 000 logements devront être isolés, bien que 200 000 soient nécessaires : « on est sur des dynamiques positives, mais ce n’est pas encore à la hauteur ».
À sa gauche, Elliot Aubin, adjoint au maire du 1er arrondissement et membre de la France Insoumise, reproche à la Métropole de trop miser sur l’attractivité économique de la ville, ce qui est pour lui aux antipodes de l’écologie. Selon lui, « libéralisme et écologie ne sont pas compatibles » et un plan de rupture est nécessaire, avec par exemple la sortie du nucléaire ou le passage à 100 % aux énergies renouvelables.
Lorsque Bruno Charles rappelle que la Métropole a diminué significativement sa production de gaz à effet de serre depuis les années 2000, Julien Ravello, conseiller environnement à la Chambre de Commerce et d’Industrie Nord Isère, le reprend : cette baisse ne serait pas due à un effort politique, mais à la désindustrialisation du territoire, également visible à l’échelle du pays. L’industrie et la pollution est maintenant exportée dans des pays pauvres, pour lui, « l’effet global est neutre ».
De son côté, Nathalie Perrin-Gilbert, maire du 1er arrondissement, rappelle l’engagement de sa mairie avec le financement d’alternatives comme la Maison de l’Économie Circulaire, le partenariat avec la Gonette (la monnaie locale et citoyenne et Lyon), ou l’installation de lombricomposteurs dans le quartier. Elle dénonce elle aussi la Métropole pour son manque de démocratie et pour l’hypercentralisation de son pouvoir : l’exemple de la place de la Croix-Rousse, bétonnée et avec peu de verdure, serait dû au manque de concertation avec les habitants.
Enfin, des citoyens ont eu leur mot à dire et ne semblaient pas convaincus par la politique de la ville en matière d’écologie. « Pourquoi affirmer un engagement pour l’environnement tout en laissant ces panneaux publicitaires inutiles et polluants dans les métros ? », demande une habitante. À Lyon, la campagne de lobbying citoyen contre les énergies fossiles devrait continuer pendant un mois, soit jusqu’au prochain conseil de la Métropole afin de lui faire voter le vœu annoncé lors de la rencontre, tandis que dans toute la France est prévu un agenda de deux mois par la campagne Zéro Fossile, consultable sur le site ilestencoretemps.fr.