Stéphane Houdet :  » j’aimerais que l’on puisse jouer tous ensemble. »

Récent vainqueur du tournoi de tennis-fauteuil de  Roland-Garros en double avec Nicolas Peifer, Stéphane Houdet a fait un détour par Lyon. L’occasion d’aborder la question du handicap dans le sport.

« Où en est le développement du tennis-fauteuil ? 

Le tennis-fauteuil fait partie des sports paralympiques les plus au point. On a une belle visibilité, un beau circuit  tout au long de l’année avec les quatre tournois du grand-chelem, quelques tournois ATP et WTA, le Masters 1000 de Rome, l’ATP 500 de Rotterdam. Même si ça reste le sport phare des activités en fauteuil j’aimerais que l’on puisse  jouer tous ensemble, sans distinction. Je pense que ce n’est pas un avantage d’avoir deux jambes pour jouer en fauteuil. Ce serait un nouveau sport où il n’y aurait plus besoin d’être dans la case déficient pour jouer. Aujourd’hui pour jouer au tennis-fauteuil il faut-être qualifié de déficient. Psychologiquement ce n’est pas quelque chose qui séduit les parents et les joueurs au départ de devenir champion paralympique. Si l’on pouvait pratiquer une discipline partagée on pourrait envisager des candidatures de sport partagé  pour les Jeux Olympiques.

Vous souhaiteriez une grande compétition pour tous ?

Je souhaiterais que soit créés des sports que l’on puisse faire tous ensemble selon le modèle de la conception universelle. Il y a des gens qui jouent au tennis sur du sable ça s’appelle du beach tennis, d’autres qui jouent au padel tennis. On pourrait le faire sur un dispositif roulant comme le nôtre. Il n’y aurait pas de distinction au départ. Lorsque l’on fait du sport on va chez le médecin et à partir du moment où il n’y a pas de contre-indication à la pratique d’un sport on peut jouer. C’est une approche plus valorisante que de dire «tu as tel ou tel problème, je te mets dans une case pour pratiquer d’une certaine manière ». Ca me gêne.

Il y a deux ans vous avez-été champion paralympique en double à Rio, qu’est-ce qui a changé depuis ?

Il y a beaucoup de gens qui ont vu ce match et ont décidé de nous suivre ou d’encourager la pratique de cette discipline. La fédération française de tennis a décidé de prendre en main le tennis-fauteuil alors qu’auparavant c’était la fédération handisport. Au niveau mondial c’est la fédération internationale de tennis qui s’occupe du circuit. C’est une sorte de pavé dans la mare qui a été jeté. Ca pourrait donner des idées aux autres fédérations. Treize ont déjà suivi et pourquoi pas d’autres dans le monde. Il  faut veiller à ne pas mettre de côté ceux qui pratiquent pour le loisir ou pour se reconstruire de côté.

Combien de clubs en France peuvent accueillir des personnes handicapées ?

Il y a un recensement en cours au sein de la FFT. On trouve toujours des systèmes D. Si nos fauteuils ne rentrent pas sur le cours à cause des roues inclinées ou s’il y a trois marches, on se fait aider par un ami. Je me suis retrouvé en Afrique du Sud où ils se posent moins de questions en matière de normes d’accessibilité. Pourtant c’est le pays qui a le plus développé le tennis-fauteuil. Ils ont 550 joueurs dans les académies avec moins de moyens que les nôtres. C’est une question de volonté que de réglementations.

Comment jugez-vous l’action de la FFT ? 

Elle a pris le dossier en main mais c’est une grosse montagne. On vit les premières heures et on attend que ça se mette en place en donnant un coup de main. Paris 2024 devrait booster ces efforts. J’ai un poste de conseiller sport et handicap au sein du Ministère des Armées où on travaille à la reconstruction par le sport. des blessés. Le dossier du handicap est sur la table dans les ministères, les comités, les fédérations. Chacun doit mettre sa pierre à l’édifice. Il faut voir cela en plan Marshall sur 50 ou 100 ans avec des idées, des visions.  Développer des sports pour tous en est une. J’ai joué au rugby à Oyonnax et tout le monde s’est assis. On s’est éclaté.

Avez-vous évoqué le dossier avec Laura Flessel ?

Bien évidemment. Laura est une grande adepte du sport partagé, elle a mis en place certaines actions. Elle-même en étant assise elle développait des nouvelles techniques et cela lui permettait de continuer durant sa grossesse. Elle connaît le chemin.

Comment jugez-vous la place du handicap dans la société française ?

C’est la question de la différence qui est posée. Il y a une loi sur l’accessibilité dans les logements mais la bonne réponse ce serait des équipements utilisables par tous. Par exemple dans les gares il y a une pente pour les personnes en fauteuil roulant qui sert aux voyageurs à monter plus facilement avec leurs valises. »

Photo d’illustration : Icon Sport.

 

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