Hier à 20h, les grandes chaînes ont annoncé le passage au second tour des élections présidentielles d’Emmanuel Macron avec 23,86% et de Marine Le Pen avec 21,43% . Le taux d‘abstention, de 21,77%, était légèrement en hausse par rapport à 2012. Pour une fois, les sondages se sont avérés très proches des résultats finaux. Alors que le PS s’attendait à l’échec du candidat Hamon, quatre autres partis et mouvements étaient en effervescence, tant les écarts annoncés entre les candidats étaient faibles.
Gérard Collomb avait appelé à voter Macron et ce dernier est bien le grand gagnant à Lyon. Cependant, on observe de grandes disparités sur le territoire de Lyon et de la métropole, comme l’atteste ce graphique réalisé par le LBB selon les données de LyonMag et 20minutes.
Certains arrondissements et certaines villes de la métropole démentent le classement national, et placent Mélenchon et parfois même Fillon devant Macron. De plus, les banlieues ont connu un taux d’abstention très important lorsque rapporté à la moyenne nationale.
Le Front National en ébullition
Historique pour certains, logique pour d’autres. Le Front National réitère ce qui n’est plus un exploit : être au second tour des présidentielles. Marine le Pen a réussi là où son père a échoué durant de longues années : séduire le plus grand nombre pour atteindre un second tour avec une vraie chance de victoire. Pour Kevin Laamane, suppléant du candidat Front National dans la 14ème circonscription du Rhône, « Aujourd’hui beaucoup de prix Nobel et de grands esprits ont voté Marine le pen ». Ce qui prouve un véritable renouveau d’un parti qui doit être la solution d’une France en crise.
La joie et les larmes après l’annonce de Marine le Pen au second tour sont le signe d’un soulagement et d’une année de campagne enfin récompensée. Pour des sympathisants venus assister aux résultats à la permanence du FN cours Verdun : « la France est, qu’on le veuille ou non, beaucoup plus ancrée à Droite qu’à Gauche ». Mais ce qui aujourd’hui marquerait véritablement un changement serait « une victoire de Marine le Pen pour la présidence ». Au milieu de quelques invectives d’un votant du FN traitant les « journaleux » de « menteurs trop payés pour le travail qu’ils font », la parole est donnée à Agnès Marion, candidate aux législatives de Villeurbanne. Cette dernière se dit « scandalisée» suite à l’intervention de Bernard Cazeneuve donnant le conseil-si ce n‘est l’ordre-de voter massivement pour Emmanuel Macron. « C’est une grave atteinte à la démocratie de la part d’un Premier Ministre qui doit rester dans son rôle de serviteur de la nation », continue-t-elle. En 2002, Jean-Marie le Pen s’est fait humilier au second tour avec un score digne d’une dictature. Mais aujourd’hui, sa fille n’aura jamais été aussi proche d’une victoire au poste le plus important de la politique. « C’est un choix d’apaisement dans un « ensemble-monde » où chacun a sa spécificité », poursuit Agnès Marion. La France est divisée entre les deux candidats mais pour un partisan FN d’un certain âge et d’un âge certain, « ce qui a vraiment divisé la France c’est la République, avec un roi ce serait beaucoup plus simple »…mais ça c’est une autre histoire…
Une grosse claque pour le Parti Socialiste
Au sortir de ces résultats du 1er tour aux élection Présidentielles, c’est un véritable coup de massue qu’ont reçu hier soir les militants et sympathisants du Parti Socialiste. Le candidat représentant le PS n’est arrivé qu’à la cinquième position des suffrages et n’a récolté que 6,3% des votes. Benoît Hamon a fait ainsi le pire score de l’histoire du Parti Socialiste. Un résultat jugé « catastrophique » par Alexandre, militant du parti depuis 1989. Il a accepté de nous livrer son ressenti après cette débâcle : « C’est un problème de timing, d’organisation. Macron a fait un hold-up extrêmement bien organisé, il a vraiment siphonné la campagne. La dynamique de Mélenchon en fin de campagne nous a siphonnés également. Pour moi ce n’est absolument pas programmatique ! D’ailleurs sur le terrain, le programme passe très bien, tout le monde est en train de dire que c’était le meilleur programme, le plus honnête etc. Mais après les gens votent pour le candidat qu’ils veulent. » Pour Jeff Ariagno, conseiller communautaire PS, les propos sont un peu plus sévères : « C’est la conséquence logique et ce qui se passe ce soir c’est la victoire de la stratégie de Manuel Valls qui était de casser la gauche en deux. Il a rendu impossibles les conditions d’une alliance par sa politique gouvernementale, ses déclarations, et ses orientations depuis longtemps. Benoît Hamon avait une bonne dynamique mais elle a été sabotée par les trahisons successives. Ce ne sont pas des ralliements, ce sont des trahisons. » La problématique est désormais de savoir comment compte rebondir le PS lors des législatives. Pour Cédric Fouilland, autre militant du parti, l’accent sera mis sur « une union à gauche hors En Marche. En revanche, tout accord aux législatives sera passé par la direction, la décision se prenant à ce niveau là. Et vues les interventions et les prises de parole de certains responsables du PS, on peut effectivement tout imaginer. »
Quoi qu’il en soit, concernant les soutiens à apporter au 2nd tour des Présidentielles, « l’appel à voter pour Emmanuel Macron a été clair » pour les militants du Parti Socialiste.
Dépression chez Fillon
Rassemblés au bar Edgar Quinet, les soutiens de Fillon étaient entre 30 et 40. Avant même 20h, certains sympathisants n’avaient déjà que peu d’espoir: « On va tous chialer comme des merdes après l’annonce des résultats » déclarait déjà un jeune homme. Une fois les deux candidats du second tour annoncés, le score est commenté : « Fillon à égalité avec Mélenchon, c’est ça qui est terrible. Maintenant, c’est Mélenchon la Gauche» s’exclame une partisane des Républicains. François Fillon est à 19,94% contre 19,62% pour le candidat de la France Insoumise. Sur le choix de vote pour le second tour, les choses sont plutôt contrastées. Même si Fillon a donné comme consigne de voter Macron, celle-ci ne sera pas suivie par tous. « Moi, je vais pratiquer le « ni… ni » je ne peux pas trancher entre un candidat qui arrive à nous dire qu’il n’y a pas de culture française et une candidate qui veut quitter l’Union Européenne » pense Nicolas, 19 ans, militant Les Républicains. Pour François-Noël Buffet, sénateur du Rhône et maire d’Oullins, le choix est déjà fait : « Maintenant, on pense à la suite afin que madame Le Pen ne soit pas élue». Le regard des Républicains va aussi se tourner vers les prochaines élections: « Cette France a besoin d’un programme, d’un project sérieux, on aura besoin d’être présents à l’Assemblée Nationale. Il faut donc se projeter sur les législatives. Ce n’est pas non plus la fin du monde, il faut se remettre au travail, on a un socle non négligeable » (François-Noël Buffet).
«Un terreau favorable pour les luttes à venir »
Sur les pentes de la Croix-Rousse se sont réunies une soixantaine de personnes à l’Aquarium. Le ciné-café y avait organisé une « contre-soirée électorale » ponctuée de débats animés par Usul , Linguisticae et Thibault Jeandemange. Le but était de débattre sur l’abstention, le sens du vote, et les mobilisations à venir. Il s’agissait de jeunes diplômé.e.s pour la plupart entre 20 et 30 ans. Sans être directement sous l’égide de la France insoumise, la plupart espéraient un changement en faveur de la gauche. À l’annonce des résultats, des soupirs, quelques cris et bien vite des sourires ironiques disent la déception de la salle. Plusieurs personnes sortent avec précipitation pour chercher du réconfort en appelant un proche absent ou fumer une cigarette avec dépit. L’une d’elles se confie: « Ce qui me mets en colère par-dessus tout, c’est l’impossibilité à Hamon et Mélenchon d’avoir pu fédérer leur candidature, alors qu’ils portaient tous les deux l’idéologie de la gauche. » Une autre spectatrice, Sarah, est rentrée spécialement de Grèce où elle étudie pour vivre l’élection avec ses ami.e.s. Elle me confie son inquiétude pour les années à venir « Il ne faudra pas être moins vigilant avec Macron.» Malgré tout, les discussions ont continué pendant toute la soirée. Selon Usul, ces résultats doivent être envisagées comme « un terreau favorable pour les luttes à venir. »
Emmanuel Macron, une place de président déjà acquise ?
Entre journalistes et apéritifs payants la foule est enthousiaste en attendant le résultat du premier tour. Heureuse, mais stressée. Ils trépignent d’impatience devant le chronomètre que propose France 2. Le candidat d’En Marche a réussi en un an à faire parti d’un gouvernement en faillite, le quitter, fonder un parti qui n’en n’était pas vraiment un, pour se retrouve aujourd’hui à quelque jours du poste de président de la République. « Quand je pense qu’il y a un an on nous prenait pour des cinglés », explique un sympathisant du mouvement En Marche. En effet, ce qui attire chez Emmanuel Macron c’est qu’il « déplace les clivages » selon Hugo, 18 ans. Mais pas uniquement car la majorité de ses soutiens proviennent de son discours pro-européen. Dans l’attente des résultats, Hugo se confie sur une tactique pour une campagne du second tour qui se composera, d’après lui, en fonction de l’adversaire. « S’il perd, il se ralliera avec la personne la moins extrême » ajoute Christophe, 55 ans. Et c’est seulement après l’annonce de Macron en pole position à 20 heures, que Lucien, un autre jeune homme acquis à la cause du leader d’En marche, avouait être « déjà confiant ». Au moment de l’annonce, c’est l‘explosion de joie chez les partisans du centriste. En effet, si cette bataille est gagnée, il n’en reste pas moins que la campagne continue encore pour 15 jours. « On va d’abord essayer d’organiser un meeting » s’exprime Baptiste, un de soutiens, sur la campagne contre l’extrême droite. Un défi pour Lyon qui reste l’un des plus gros soutiens d’Emmanuel Macron, avec Gérard Collomb.