Rencontre avec César Ghaouti

Suite et fin de nos articles sur les Big Bang Ballers, avec cette fois-ci l’interview de César Ghaouti, manager de la branche française de l’association.

cesar ghaoutiPouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je suis le président et l’un des co-fondateurs de la section Big Bang Ballers France, et aussi membre du bureau de la section internationale. Je suis basketteur, j’ai fais science po’ Grenoble et je vis sur Grenoble.

En quoi consiste l’association des Big Bang Ballers ?
L’association des Big Bang est un collectif de basketteurs qui prend une forme associative en France. L’objectif est vraiment de créer une communauté de basket solidaire basée sur l’entraide. On utilise ce sport pour mener des projets de solidarité. Au niveau local, on va permettre aux jeunes de se rencontrer dans des évènements sportifs. On met en place également un programme de basket pour les personnes qui en sont éloignées, notamment les jeunes filles adolescentes dans les quartiers. Ces animations s’adressent également à des publics en situation de handicap mental ou physique. Enfin, nous avons tout un axe sur les projets de solidarité internationale, ciblés sur des programmes d’accès aux sports et à l’éducation. Aussi, parmi l’un des chantiers de notre association, il y a les échanges de jeunes.

Comment se construisent ces échanges de jeunes ?
Nous construisons ici un projet avec des jeunes basketteurs qui partent le vivre dans un autre pays. Ils rencontrent de nouvelles personnes à travers le biais d’une passion commune qu’est le basket. L’association est née au Bangladesh en 2008. Je n’étais pas là-bas à ce moment. C’était  Julien Kerdoncuf, l’un des autres co-fondateurs de l’association,  qui était sur place à Dacca, la capitale du Bangladesh. Il s’est rendu compte qu’il arrivait à rencontrer les personnes locales grâce au basket, parce que la communauté expatriée était très renfermée sur elle-même. Ils ont commencé à monter des tournois dans le but de faire jouer les jeunes du Bangladesh. Et après, avec les fonds qu’ils ont levés, au lieu d’aller boire des bières [rires], ils se sont dit qu’ils allaient commencer à monter des camps dans des orphelinats ou avec des populations en très grande précarité ; et c’est un peu comme ça que le projet est né finalement. Les Big Bang Ballers sont devenus une ONG en 2009, et il y a eu la création de la branche française en 2010.

En quelque sorte, pouvons-nous dire que votre association crée du lien social ?
Oui, c’est exactement ça. On se sert du basket qui est un sport ludique très accessible. Ce n’est pas du rugby, on peut vraiment jouer au basket partout, pour créer du lien social.

Votre association s’est implantée en 2010 en France. Quelle est la différence entre le fonctionnement en France et à l’étranger où il y a un clivage entre les expatriés et les locaux ?
Typiquement, le projet au Bangladesh était essentiellement porté par des internationaux. Le but du jeu était vraiment de former des gens sur place. Donc quand ils sont partis, ils avaient formé des entraineurs. Ils se sont appelés les « Small Bangs » et ont continué à mener des tournois. Mais quand l’ONG des Big Bang Ballers travaille àl’international, les projets sont souvent autofinancés. Les fonds proviennent de l’ONG, l’assurance est également celle de l’ONG. Alors que la branche française est en quelque sorte une branche autonome. On est rattaché à l’ONG internationale, mais on a notre propre compte en banque, notre propre CA et notre propre assurance.

Ce n’est donc pas l’ONG internationale qui gèrent votre financement…
Non. Et on a en plus développé des projets différents. Au début en France, on organisait juste des tournois caritatifs. On levait des fonds en France pour les réinvestir à l’international. C’était une méthode qui a fonctionné pendant deux ans à peu près. Puis on s’est étendu de plus en plus sur Grenoble, les gens venaient davantage –sur la base du bénévolat – et les demandes des jeunes sont devenues plus nombreuses pour faire des actions sur Grenoble. On s’est véritablement rendu compte qu’il y avait également des choses à faire sur place.

Comment sont prises les décisions au sein de votre association ? Est-ce que l’ONG internationale basée en Australie a un droit sur votre organisation en France ?
On est très autonome et très libre. Après, quand on a des gros projets, on en discute. Je suis par exemple membre du bureau de l’ONG internationale. Julien en est membre également, chargé de faire le lien entre les deux structures puisqu’il connait très bien les internationaux. On les sollicite pour avoir leur avis quand on a des projets comme en ce moment, avec les échanges de jeunes par exemple. On a d’ailleurs embauché quelqu’un début février pour s’occuper de tout ça. Quand on a des partenariats qui se mettent en place à l’étranger, c’est pareil. On les sollicite pour savoir si c’est bien dans la ligne directrice de l’ONG internationale des Big Bang Ballers. Les trois quarts du temps, ils sont d’accord avec nous parce qu’on travaille en bonne intelligence [sourire]. On travaille régulièrement ensemble donc on se connait bien: on sait ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Mais globalement, on est très autonome. Les fonds qu’on lève proviennent essentiellement de France. Aussi, avec Julien, on est sollicité pour donner notre avis sur les programmes de l’ONG international. Par exemple, pour un camp solidaire au Népal, on est invité à donner notre avis.

Il y a un projet au Sénégal qui a lieu en Juin. Aussi, vous parlez de camp solidaire. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Pour le projet Sénégal, on part la troisième semaine du mois de Juin avec l’association française. C’est d’ailleurs la première fois qu’on va faire un camp à l’international, nous les Big Bang France. Les Big Bangs internationaux ont déjà été à Kaboul ou dans d’autres pays, mais nous c’est une première. Julien, notre vice-président, est installé à Dakar au Sénégal depuis deux ans. Il a structuré une branche Big Bang avec des sénégalais. Notre but est de travailler avec les jeunes en situation de précarité. On va donc travailler davantage avec des associations de jeunesse. On travaille toujours en partenariat, on ne débarque jamais seul en disant « c’est nous les plus forts ». Non. On vient pour faire de l’animation. On va prendre des jeunes sénégalais, et on va essayer de leur faire découvrir ce sport, dans des conditions matérielles correctes puisqu’on va venir avec des ballons. Presque 1200 jeunes vont être touchés par cette semaine. Des garçons comme des filles, on fait attention à ce qu’il y ait de la mixité sociale à chaque fois. Nous arrivons sans préjugés. On les prend comme ils sont pour les faire jouer.

Vous avez parlé précédemment de partenariats. Comment sont-ils gérés et dans quoi sont redistribuées les recettes ?
Les recettes qu’on dégage au niveau français servent à la fois à faire vivre le poste de chargé de développement (le seul « employé » de l’association), mais aussi et surtout pour faire vivre nos projets. Au niveau local, on a des projets phares comme « ramène ta copine », basé sur l’accès au sport pour les filles dans les quartiers. On a expérimenté ça cette année avec le club féminin de La Tronche, basé à Grenoble, qui joue en National 1. Le but est de faire découvrir le basket pour les filles de quartiers, avec des ateliers organisés uniquement pour les filles, en partenariat avec des structures de jeunesse locale comme les MJC. Ensuite, les filles vont voir la pratique du basket au sein même du club si ça leur plait. On n’est pas un club, mais une passerelle entre un public éloigné et les clubs. Donc tout ça est un de nos axes de financement. Ensuite, il y a tous les projets d’animations locales, comme les tournois par exemple. En fait ça s’autofinance, et on gagne une grande partie de nos recettes la dessus, puisque les évènements de type tournois sont payants. On a du textile, qui finance un tiers de notre budget. On a des t-shirts, des joggings, des ensembles de basket. Donc on peut également faire le relais auprès des clubs pour du textile, proposer à des clubs nos ensembles… Il y a plein de manières de nous soutenir. Quant aux projets internationaux, là on est au Sénégal, on est hors-sol. Il y a Julien qui est sur place, et ça a été construit avec des associations sénégalaises.

Le terrain est toujours préparé à l’avance en quelque sorte.
Oui c’est toujours préparé, on sait très bien où on va. Julien a rencontré tout le monde, il connait leur besoin. Donc on arrive avec du matériel pédagogique, des ballons, etc , qu’on laisse sur place après notre passage. Mais les fonds servent essentiellement à faire vivre ces projets, en tenant compte du déplacement, de la nourriture, des t-shirts, ballons, du matériel pour les jeunes. L’association fonctionne exclusivement sur du bénévolat. C’est la première fois qu’on embauche quelqu’un, même au niveau international. C’était en février 2013 pour l’association française.

Justement, comment devient-on un Big Bang Baller ?
C’est très simple. Il suffit de nous envoyer un mail ou de nous contacter sur Facebook pour nous dire que vous êtes intéressés, pour en savoir un peu plus sur l’association et pour s’y investir. Après il y a des réunions mensuelles qui sont ouvertes à tous, qu’on soit membre ou pas membre, et qui ont lieu sur Grenoble pour l’instant. C’est là qu’on met en place des groupes de travail, et qu’on voit si des personnes veulent s’investir sur les différents projets. Votre question est intéressante, puisqu’on a pour objectif de développer des activités sur Lyon. On n’a pas forcément l’occasion d’aller sur Lyon tous les jours, mais il serait bien d’avoir des jeunes, autonomes, qui montent des évènements dans l’année et qui soient en lien avec les clubs. On est vraiment à la recherche de personne qui nous disent : « Oui voilà j’aimerais monter un tournoi pour les Big Bang, comment est-ce qu’on peut faire ? ». Nous, on l’accompagne pour le premier ou les deux premiers tournois. Le but du jeu est de favoriser les initiatives citoyennes. On est là pour aider les jeunes à s’investir dans leur communauté. Aussi, il y a des jeunes qui nous sollicitent pour montrer un camp de basket dans leur pays d’origine par exemple. Ils aimeraient ramener du matériel, mais ils ne savent pas trop comment faire. On est là pour accompagner ces projets là, on propose aux jeunes de venir les porter au sein des Big Bang.

Quels sont vos projets futurs dans la région lyonnaise ?
On a travaillé avec l’ASVEL au mois de Mars. Nous étions partenaires d’un match de pro A, contre Strasbourg. On a eu un premier contact comma ça avec la communauté lyonnaise. On va travailler avec l’Ouest Lyonnais Basket (l’OLB) qui organise un gros tournoi le 9 juin de 3 contre 3 à st Cyr. Les Big Bangs sont partenaires en s’occupant de toute la logistique du tournoi : les poules, la sono, l’animation avec les petits concours. Les deux périodes où on peut monter des tournois facilement sont la période de Noel et juste après le Nouvel An. La deuxième période est en juin, où on organise une « summer league » sur Grenoble. Les summer league regroupent toutes les équipes de 3 contre 3, où tout le monde se rencontre, et un classement est fait à la fin, avec des finales pour connaitre les meilleures équipes de 3 contre 3 de la région.

Est-ce qu’il y a des pays où vous souhaiteriez vous implanter ?
Vu qu’on fonctionne avec des partenariats, on va là où on peut avoir des sollicitations: on a récemment été sollicité au Maroc, pour mener des actions là bas. On est en train de réfléchir à mettre en place un camp de jeunes pour la Toussaint, faisant jouer des jeunes migrants sub-sahariens, qui arrivent au Maroc pour aller en Europe, mais bien souvent ils restent bloqués au Maroc. Donc l’objectif de ce programme, mené par l’ONU et le Haut-commissariat aux réfugiés, en Europe est de faire jouer ces jeunes migrants avec des jeunes marocains. Ils nous ont sollicités pour avoir notre expertise, et savoir si on pouvait venir avec des français, donc on est en train d’essayer de monter ce projet là. On aimerait aussi se développer en Europe, faire des projets d’échanges en Europe, et de tournois européens, pour sortir de cette dynamique Nord/Sud. C’est vrai qu’on a souvent travaillé dans des pays qu’on peut dire « en développement », mais on n’est pas là que pour ça donc si on peut travailler avec d’autres pays européens, ça nous intéresse. On a un projet au Benin qui devrait voir le jour pour l’an prochain. S’il y a des basketteurs ou juste des personnes qui aiment le sport sur Lyon, et qui savent pas trop comment monter leur projet, on peut être là pour les accompagner.

Est-ce que les Big Bang Ballers ont un rayonnement important en France, en comparaison par exemple au Quai 54 à Paris, qui est un très grand tournoi de streetball français ?
Vu qu’on s’est développé sur un mode bénévole, on est quand même très centrés sur la région grenobloise et la Région Rhône-Alpes où on commence à être connu. On est assez localisé, on n’a pas l’impact d’un Quai 54, qui est en région parisienne et qui a donc forcément un gros impact médiatique, un réservoir de joueurs énorme, on n’a pas encore cet impact là, mais à l’avenir pourquoi pas !! [Rires] On est très content d’avoir des joueurs pro qui viennent, on est demandeur. L’objectif est de faire jouer la base: ça nous va très bien d’organiser des tournois avec 100 personnes, qui jouent et qui s’éclatent, plutôt que des choses qui paraissent inaccessibles. On revendique une action complémentaire aux clubs de basket. Les clubs sont centrés sur la pratique de compétition, et nous on est plus sur la découverte, l’initiation au basket.

Retrouvez l’article complémentaire sur les Big Bang Ballers sur le Lyon Bondy Blog

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