Le 18 avril, la Maison des Italiens à Lyon a été le théâtre d’une réunion publique de la France Insoumise. Manuel Bompard, coordinateur national de ce mouvement et député de la quatrième circonscription des Bouches-du-Rhône, à signalé l’engagement de son parti à faire le lien entre les politiques européennes et le quotidien des Français. Alors que les élections européennes du 9 juin se profilent à l’horizon, LFI se mobilise pour rallier les électeurs à leur cause.
Lyon Bondy Blog : Avec l’approche des élections européennes, le taux d’abstention élevé reste une préoccupation majeure, on en compte environ 73,28% à Vaulx-en-Velin en 2019. Comment la France insoumise compte-t-elle mobiliser les nouveaux électeurs, particulièrement dans les quartiers populaires, afin de les encourager à voter ?
Manuel Bompard : La première étape consiste à informer les citoyens de ces élections, une responsabilité qui revient au gouvernement. Dans le cadre de notre campagne d’inscription sur les listes électorales, nos militants et militantes privilégient le contact direct avec les citoyens, en allant faire du porte-à-porte pour les informer sur l’enjeu de ces élections européennes. Aujourd’hui en France, le jour du vote, on constate qu’environ un Français sur cinq n’est soit pas inscrit ou soit mal inscrit sur les listes électorales. Pour LFI, le but de cette élection est de faire le lien entre les politiques appliquées au niveau européen et la vie quotidienne des électeurs. L’avenir du marché européen de l’électricité fait partie d’une des politiques européennes qui va impacter la vie des individus, en particulier dans les quartiers populaires. En effet, les locataires voient leurs factures d’électricité augmenter de 30 à 40 % sur ces deux dernières années. C’est aussi le moyen pour les citoyens de s’emparer de cette élection et de s’exprimer sur l’avenir de l’Europe. Notamment dans le cadre d’un contexte de guerre à Gaza, comme en Ukraine. En votant LFI, les électeurs portent donc un message de paix pour demander un cessez-le-feu.
LBB : L’insoumission a fait débat au sein de la NUPES. C’est une gauche divisée qui partira aux élections européennes.Est-ce que vous pouvez nous expliquer ce qu’est l’insoumission ?
MB : L’insoumission consiste à refuser l’ordre établi et les dominations qui existent dans notre société, comme le racisme et l’islamophobie. La domination économique concerne une majorité de la population, celle qui n’arrive pas à finir les fins de mois, et une minorité concerne les personnes riches qui créent du profit sur leur dos. Les quartiers populaires sont les premiers touchés par cette domination économique. L’insoumission appelle donc à se rebeller face à cette situation et à la combattre en se mobilisant notamment lors des élections européennes. Dans cette élection européenne, LFI, n’a pas seulement voulu dresser une liste de ses membres, mais nous avons voulu l’élargir à des personnes civiles qui mènent différents combats.
LBB : Pouvons-nous donc considérer que votre liste est davantage constituée de personnes qui viennent de la société civile que des partis politiques ?
MB : Notre liste est un mélange de représentants. On peut retrouver des figures comme Rima Hassan, militante associative, ou Anthony Smith, inspecteur du travail, qui se joignent à notre cause. Abdelkader Lahmar, engagé dans la région à Vaulx-en-Velin pour les habitants des quartiers populaires, a également choisi de se joindre à nous, malgré son origine « non-insoumise ». En dépit d’un rassemblement avec la NUPES, LFI a tout de même décidé de dresser une liste de rassemblement exhaustive de ceux qui avaient envie de se battre à leurs côtés.
LBB : Au Parlement européen, envisagez-vous des coalitions pour influencer les politiques européennes ?
MB : Cela dépend avec qui et pourquoi. Depuis des années, une grande coalition est mise en place entre les socialistes et les macronistes, qui constituent la droite qui gouverne ensemble pour que rien ne change. C’est précisément ce type de coalition que nous cherchons à éviter. La France insoumise pense qu’il faut rompre avec le fonctionnement actuel de l’Union européenne, qui peut pousser à des politiques de réduction des dépenses publiques. C’est-à-dire, moins de services publics et la libéralisation de certains secteurs. Lorsque l’on libéralise les transports, la conséquence, c’est la diminution des trains qui engendre la fermeture de petites gares.
LBB : Quelle coalition constituerait un intérêt pour vous ?
MB : Au niveau du Parlement européen, notre groupe travaille parfois avec les écologistes et les socialistes, à condition qu’ils ne s’allient pas avec la droite. Du moment que la coalition est bénéfique à nos projets, on l’envisage. Néanmoins, elle pousse souvent à s’aligner sur des accords minimes et à poursuivre la politique européenne actuelle. Nous refusons de réaliser une coalition, si c’est pour maintenir la même politique. En effet, les décisions à l’échelle européenne sont responsables de bien des maux dans notre pays.
LBB : La renégociation des traités européens, est-elle une priorité pour vous ?
MB : Il est important pour nous de renégocier les traités européens, mais cela dépend de la prise du pouvoir au niveau national. C’est pourquoi notre plan d’action aujourd’hui, c’est d’accompagner nos candidats à la victoire pour contrer des projets nuisibles. Parmi nos initiatives au niveau européen, l’action d’une eurodéputée insoumise a permis l’obtention d’un premier texte pour protéger les droits des travailleurs des plateformes type Uber ou Deliveroo. C’est une bataille qui résulte de 5 ans de lutte. Les travailleurs de ces plateformes sont considérés comme des auto-entrepreneurs, alors qu’ils sont obligés de prendre toutes les livraisons qu’on leur propose, sous peine d’être radiés de la plateforme. Ils ont toutes les contraintes d’un salarié, mais ils n’ont pas leurs droits. Donc il s’agissait de se battre pour obtenir une protection sociale. On peut gagner des batailles au Parlement européen, mais pour changer en profondeur l’organisation de l’Union européenne, il faut prendre le pouvoir au niveau national et organiser un rapport de force. Les deux batailles sont donc complémentaires pour LFI.
Amélie Carapito