Des collections picturales venant du Monde Arabe se sont incrustées au Musée des Beaux-Arts de Lyon (MBA) du 5 Avril au 4 Juillet 2011. Ces dernières se sont réunies dans la ville des Gônes pour une exposition intitulée « les Génies de l’Orient ». Voici un compte-rendu de ce que vous avez raté.
Composée à 30% de ressources parisiennes venant du Louvre, de grandes œuvres de divers types s’étalent devant ces curieux avides de connaissances sur l’Orient.
Au moment où je suis entrée pour observer les ouvrages créés par mes ancêtres, j’ai été estomaquée par la présente formulation « […] les arts de l’Islam ». Islam ? Alors ces femmes dévêtues par ces orientalistes et tous ces portraits précis, sachant que le Coran interdit toute représentation de l’Homme dans le but d’éviter toute idolâtrie, serait une idée de l’Islam ?
En fait, ce mot écrit avec une majuscule est ici utilisé pour décrire les pratiques culturelles partagées par les terres orientales à majorité musulmane du Maroc jusqu’aux Indes. Quant au mot écrit avec un « i » minuscule, ce dernier ferait référence à la pratique religieuse. Cela ne devrait-il pas être l’inverse ?
Tout au long de l’exposition, le public a pu observer ces œuvres appartenant au patrimoine national. Cette exhibition était le résultat d’un vaste héritage napoléonien qui s’ajoutait aux fruits des conquêtes colonisatrices. Afin de mieux connaître cet environnement et les créateurs de ces bijoux artistiques, presque tous les visiteurs avaient un audio-guide qui pendouillait à leur oreilles attentives.
Tous en choeur, nous avons écouté les dires de Rémi Labrusse (professeur d’histoire de l’Art Contemporain à Paris X), de Stéphane Benoît (historien et professeur à l’Institut D’Etudes Politiques de Lyon), de Salima Hellal (commissaire et conservateur de l’exposition) et d’autres spécialistes du Monde Arabe et de l’Orient. En prenant cet appareil ovale et blanc, je pensais que les personnalités interviewées allaient me faire rêver, me transporter quelques siècles plus tôt grâce à des détails croustillants, ou m’enseigner tellement de choses que je me prendrai moi même pour une spécialiste en sortant du MBA. Mais non. J’ai juste entendu des mots et des respirations qui s’enchaînaient parfois sans lien avec l’oeuvre exposée. Donc pas de découverte du détail, ou du contexte sentimental de l’auteur, non… Les extraits littéraires étaient par contre une excellente manière de nous faire comprendre les opinions des intellectuels de l’époque.
L’avancée entre les différentes divisions de l’exposition poursuit son cours. On commence avec la découverte sociale, culturelle et scientifique de ces grands peuples commerçants arabes, perses et indiens qui seront étudiés minutieusement par les grands penseurs Européens. Certains feront des ouvrages sur cette « Grammaire de l’Ornement » tout comme ce Jules Bourgoin qui essaiera de connaître les mécanismes et les règles des canons de beauté orientaux, jusqu’à en perdre la tête. Puis on finit avec ces autres artistes qui eurent la révélation concernant leur avenir professionnel. : c’est en effet en mettant les pieds à Alger ou à Kairouan en Tunisie qu’Henry Matisse et Paul Klee découvriront leur vocation picturale.
Et Lyon dans tout ça? A la fin du XIXème siècle, le Musée de cette grande ville a acquis de grands trésors (appartenant entre autres au collectionneur Albert Goupil) dans le but de favoriser la création artistique locale et notamment la traditionnelle soierie lyonnaise.
On se promène ainsi entre ces faïences ovales bleues turquoises, ces longues tenues de soie couleur grenat, ces peintures qui représentent des ports gigantesques aux maisons blanchies par un soleil de plomb, ces rêves de femmes dénudées soumises au pinceau d’un artiste qui admire ces chefs d’oeuvre de la Nature, ces longues lampes aux lettres argentées, ces contes et histoires théologiques et guerrières toujours plus détaillés … Le véritable songe de toute une époque qui s’étale majestueusement devant nos yeux d’occidentaux de 2011.
Nous sommes aujourd’hui dans un tout autre contexte, dans une autre ère. De nos jours, le mot « islam » ou « Islam » n’est plus prononcé avec ces étoiles passionnées dans les yeux, mais c’est un regard terni par les critiques véhiculées quotidiennement par les médias et les politiques qui monopolisent les pensées. Ainsi, le Musée des Beaux-Atrts de Lyon a su exposer une toute autre image de l’Orient, cette région admirée multiples fois et qui, aujourd’hui, n’est plus considérée que comme une menace ou seulement une destination touristique Club Mèdesienne…
Note : Si vous avez raté l’exposition » Les Génies de l’Orient », courrez tout de même voir l’exposition « Lyon et les arts de l’Islam » qui dure jusqu’au 19 septembre…