A l’occasion de la destruction de la barre 220, le Groupe de Travail Interquartiers (GTI) a organisé un pique-nique réunissant les anciens habitants de la Duchère, le mardi 18 mai au centre commercial du Plateau.
Ce mardi, à 19 heures, veille de la destruction de la barre 220, dans l’allée du centre commercial du plateau, les duchèrois, anciens ou actuels, se sont retrouvés autour d’un pique-nique convivial. Chacun devait apporter un élément de repas à partager avec ses voisins. Le GTI, collectif des habitants de la Duchère, avait fourni les tables et les chaises, les mères de familles distribuaient boissons et nourriture. Tous sont venus en famille pour partager ce moment qui marquait une nouvelle étape dans l’histoire de la Duchère.
Pendant le repas, les langues se délient. Beaucoup regrettent leur ancien quartier et ce qu’il est devenu aujourd’hui. Certains vivent ici depuis sa création. Sabah, 47 ans, mère au foyer a vu la plupart de ses enfants naitre et grandir ici. Elle nous confie sa déception quant à la politique de réaménagement entreprise par la Ville. « Cela fait maintenant 18 ans que je vis à la Duchère, tout le monde se connaissait. Avec cette reconstruction, j’ai perdu la plupart de mes amis et connaissances. Je sais que je ne suis pas la seule à partager ce sentiment car la plupart des anciens habitants déjà partis viennent encore au marché du samedi pour nous revoir ».
Une autre Fatima, à la Duchère depuis 30 ans, m’interpelle sur les loyers qui ont considérablement augmentés : « Maintenant, on ne trouve plus de logements à moins de 700€ de loyer. Ils ont tué la mixité sociale au lieu de la créer car nous avons perdu la solidarité qui nous unissait. Les gens ne se connaissent plus ! Et de toute façon, nous ne pourrons pas continuer à vivre ici car la vie sera trop chère. La ville de Lyon a cependant signé avec beaucoup de familles nombreuses pour qu’elles puissent revenir dans le quartier et retrouver un logement à un prix décent », ajoute-t-elle.
Des vies se sont écoulées dans ce quartier laissant derrière elles de nombreux souvenirs. Hafsa, 15 ans se souvient des fêtes du quartier « quand il y avait beaucoup plus de jeunes et que tout le monde se connaissait » nous dit-elle. Fatima et Sabah ont déménagé chacune 3 fois à la Duchère car elles voulaient absolument y rester. Youssef, 26 ans, trouve que c’est une bonne initiative de reconstruire le quartier, de l’améliorer. Et même si les loyers sont nettement plus chers, il ne le quittera pas.
La ville voulait, au départ, créer de la mixité sociale et abolir les ZEP en instaurant 20% de logements sociaux dans tous les arrondissements de Lyon. Cela ne va pas forcément de pairs avec les loyers exorbitants des nouveaux logements. Rappelons toutefois que la Duchère, située dans le 9éme arrondissement de Lyon, reste le seul ghetto au sein de la Ville. Il était donc nécessaire pour les élus de restaurer son image. C’est peut-être ici que résident les véritables motivations des personnes qui ont entamé cette politique urbaine.
Auteur : Ibtissem Boufassa