Ce samedi 31 mai 2025, le PSG remporte la Ligue des Champions 24 -25 à Munich contre l’Inter de Milan, cinq à zéro.
Dans cette même enceinte, l’OM avait déjà soulevé la coupe aux grandes oreilles en 1993 et restait jusqu’à présent le seul club hexagonal à avoir remporté la C1. Retour sur la conquête des Qataris sur le football.
Sarkozy au chevet du Qatar
Entre 2009 et 2011, le PSG est un club en crise, à la fois sportivement et symboliquement. En effet, cette équipe appartenant à Colony Capital peine à exister au plus haut niveau. Le Qatar cherche à renforcer son image internationale en s’accaparant du football. Nicolas Sarkozy, qui est proche du Qatar, devient un acteur majeur en apportant un soutien indéfectible au club. Il organise en 2010 un dîner à l’Élysée avec l’Emir, qui débouche sur le rachat du PSG par le QSI : Qatar Sports Investments en 2011. Ce transfert d’actionnariat s’inscrit dans un pari collectif : faire du PSG un vecteur de rayonnement global pour la capitale.
Aujourd’hui, l’exception marseillaise prend fin. Le PSG, souvent caricaturé comme un club artificiel, « dopé au gaz des qataris », entre enfin dans la légende par le sport mais surtout grâce au financement de l’émir du Qatar, Tamim bin Hamad Al Thani.
Avant ce sacre historique de 2025, le PSG avait déjà connu une consécration continentale, souvent oubliée mais symbolique : la victoire en Coupe des Coupes en 1996 face au Rapid Vienne (1-0). Ce trophée, aujourd’hui disparu, constituait jusqu’alors le seul titre européen du club parisien. Un succès fondateur, qui ancre la conquête actuelle dans une histoire plus longue, marquée par des hauts et des bas, entre ambitions nationales et rêves d’Europe.
Du club parisien à l’empire qatari
Quand Doha met la main sur le PSG en 2011 par l’intermédiaire QSI, le club parisien est estimé entre 70 et 80 millions d’euros. En 2025, il en vaut 60 fois plus . En quatorze ans, le PSG est passé du statut de club national en quête de reconnaissance à celui de marque mondiale, symbole du « soft power » qatari : un outil politique visant à étendre la puissance du Qatar à travers l’univers du football.
Ces financements inimaginables jusqu’à présent ont réunis sur le devant de la scène des stars mondialement reconnus tel que David Beckham. Parmi ces investissements, le transfert de Neymar en 2017 incarne une forme d’apogée : racheté pour 222 millions d’euros, il reste le joueur le plus cher de l’histoire. Son salaire annuel dépassait les 35 millions d’euros nets, auxquels s’ajoutaient primes, avantages et retombées commerciales. Au-delà de l’enjeu sportif, ce recrutement visait à renforcer l’aura internationale du PSG, toujours dans une logique de « soft power » des Qataris . La star brésilienne est un atout marketing qui a permis au club d’étendre son influence bien au-delà de la pelouse des stades.
Un modèle économique “football business” imposé en Europe
Ce modèle économique reprend celui du club de Chelsea, racheté en 2003 par l’oligarque russe Roman Abramovitch. Il fut l’un des premiers clubs à être transformé en puissance européenne par l’afflux de capitaux russes. Le PSG a donc suivi une trajectoire similaire à partir de 2011 avec l’arrivée du Qatar. Tous deux ont été régulièrement accusés de « fausser » la compétition, en s’appuyant sur des moyens financiers hors normes.
La victoire du PSG en Ligue des Champions 2025 représente principalement l’aboutissement d’un projet politique orchestré par les milliardaires Qataris. En s’imposant enfin sur la scène européenne, le club parisien valide cette stratégie de « soft power » largement préméditée où le football devient un instrument d’influence diplomatique, médiatique et économique. À travers le PSG, le Qatar transforme ce club national en une marque mondiale, en appuyant ses intérêts et ambitions géopolitique. Un univers ou les titres se construisent à coups de milliards, de communication contrôlée et de contournement des règles financières.
Des valeurs populaires et sociales oubliées
Le PSG bat l’Inter Milan en finale et réussi à imposer son modèle financier, Doha agit alors comme État-stratège. La question devient omniprésente : que reste-t-il de l’équité sportive quand les clubs deviennent des outils d’influence étatique ?
Cela invite à repenser en profondeur la vocation historiquement populaire du football. Derrière le succès du PSG version qatarie, se cache un coût social et culturel important. Le Parc des Princes, lieu emblématique du football parisien, s’est rapidement transformé en un espace élitiste. En effet, les prix des billets se sont envolés et les tribunes populaires se sont progressivement vidées, remplacées par un public privilégié, consommateur plus que passionné. Cette transformation a creusé un fossé entre le football de rue, celui des city stades en banlieue, et le football de vitrine, globalisé, coupé des réalités locales. Pour de nombreux jeunes issus de ces quartiers, le club ne représente plus un modèle d’identification ni un rêve accessible, mais un symbole de dépossession. La rupture est tant sociale que symbolique, laissant place à un sentiment d’exclusion dans un espace sportif qui servait autrefois de lieu de reconnaissance et de représentation.
Article signé Myriam Mezahem, Lucie Boissin et Jade Dupond.