Ce mardi soir, à l’occasion des élections présidentielles en Syrie le chorégraphe Rami Hassoun et le CISLD, se sont attelés à interpeller les Lyonnais sur la situation dramatique dans leur pays. L’initiative a porté ses fruits auprès d’un public conquis mais surtout des médias présents sur place. L’activisme artistique prôné par le jeune directeur artistique a bien germé…
Place de la Bastille où place Tahrir, c’est souvent dans ces lieux chargés d’histoire que les émulsions de révolte s’exposent au monde. Il y a du sang mais aussi de la joie, des larmes et des espoirs. Et les lignes s’écrivent dans les livres d’histoires…
La place des Terreaux baignait encore dans un soleil estival alors que les gens regagnaient leurs domiciles ou se prélassaient sur les terrasses des cafés. Une soirée comme une autre mais pas pour une centaine de personnes issues de la communauté syrienne lyonnaise.
C’était le jour des élections présidentielles en Syrie. L’heure était à la honte et à la tristesse car tout le monde connaissait déjà le scrutin et le vainqueur. Bachar Al Assad l’a remporté le lendemain avec 88,7 % des voix devant Hassan Al Nouri (4,3%) et Maher al-Hajjar (3,2%).
C’était à l’initiative du chorégraphe d’origine Syrienne Rami Hassoun (25 ans) en association avec le CISLD (Comité d’Information pour une Syrie Libre et Démocratique) créé en octobre 2013 qu’avait lieu ce rassemblement artistique destiné à décrier ce scrutin. La membre fondatrice du CISLD, Najwa Sahloul expliquait : « Nous voulions exprimer notre indignation car le pays est à feu et à sang. Lorsque nous avons rencontré la Compagnie Danse Hassoun, nous avons décidé de travailler main dans la main. L’idée était de marquer le refus à l’encontre d’un monde démocratique qui valide cette élection. Notre but est d’avoir une position politique qui affirme son soutien au peuple syrien. »
Exprimer et interpeller par l’art
Quinze acteurs dont trois danseurs âgés de dix huit à trente ans avaient été mobilisés pour jouer un spectacle sur la place des Terreaux porté par une symbolique propre au directeur artistique de la Compagnie Danse Hassoun avec un montage musical d’Adrien Allardon pour instaurer une ambiance de guerre.
Immaculés de sang et maquillés, des citoyens marchaient sous la menace de militaires armés qui devaient les diriger vers un bureau de vote où on lisait l’inscription « Vote Bachar or Die ». Après quelques mouvements de libération et de liesse, ils se trouvaient tous exécutés.
Toutes deux actrices dans cette chorégraphie, Sophia Palombo et Maïré Valmes ont exprimé à travers cette danse la douleur du peuple syrien :
« Rami nous a sollicité et nous avons eu des entraînements et des répétitions. Il est très professionnel et passionné. C’est un spectacle fort car Rami trouve toujours des images marquantes. C’est une belle aventure humaine. Une fois qu’on a travaillé sur ce genre de thématique, on se sent vraiment concerné par le sujet même si de chez nous on ne se rend pas compte de l’intensité de cette violence. »
Des passants curieux mais des photographes fascinés
Le spectacle s’étalant sur presque une demie heure a suscité la curiosité parmi les passants mais surtout l’intérêt des médias prompts à porter l’objectif tout près des corps allongés sur le sol. Rami Hassoun est revenu satisfait de cette manifestation.
« Le message que l’on a voulu transmettre est passé, dit-il. Il y a un grand espace sur la place des Terreaux, idéal pour que les gens voient un spectacle sans bruit privilégiant l’image. Même si certains n’entendaient pas l’ambiance de guerre, on comprenait le message. J’ai expliqué à mes danseurs les différentes parties du spectacle pour les départs, je m’infiltrais parfois à une certaine distance pour les encadrer. Les gens étaient interpellés, l’image des civils exécutés semblait bien les avoir marqués. »