L’EPI * (Espaces Projets Interassociatif) de Vaulx-en-Velin recevait, hier, une délégation d’associations américaines luttant contre les discriminations. Une occasion en or pour s’enrichir mutuellement des pratiques de chacun dans le combat associatif.
« Chez nous, il y a des indiens, des mexicains, des « chicanos », des asiatiques…» Originaire d’Albuquerque, capitale du Nouveau-Mexique, « un état réellement multiculturel » Monica dirige une organisation communautaire. « Près de 600 familles font partie de notre réseau. Ces dernières, de toutes origines confondues, nous font part de leurs problèmes et nous les aidons à mettre en place des stratégies pour trouver des solutions.» Lobby auprès des élus, manifestations pacifiques, prise de conscience de l’importance du droit de vote… autant d’actions qui portent parfois leur fruit. « Cela a été notamment le cas lorsque notre état voulait faire passer une loi pour mettre des forces de police devant les écoles. »
Preuve que les communautés demeurent très organisées aux Etats-Unis, l’exemple de Monica révèle aussi une autre réalité : le contre pouvoir du monde associatif américain. Qu’elles viennent de Floride, de Californie, du Tennessee ou du Nouveau Mexique, aucune d’entre elles n’est financée par les pouvoirs publics. « C’est inimaginable. Nous faisons appel aux dons, au bénévolat, aux entreprises… mais l’argent public ne va pas aux associations. Et d’ailleurs, nous ne le souhaitons pas. Les élus n’en profiteraient-ils pas pour nous dicter nos actions, nous limiter dans nos missions ? Nous tenons à garder notre indépendance » Sur ce point, Pedro, responsable associatif américain d’origine portoricaine explique qu’il a refusé un don de matériel de la chanteuse Gloria Estefan, « trop proche d’un parti politique auquel nous ne souhaitions pas être associés. »
«En France, si nous devons évidemment rendre des comptes aux collectivités qui nous soutiennent, nous sommes libres. Mais au final ce sont bien sûr les politiques qui choisissent de financer, ou non, telle ou telle association », répond Saïd Kebbouche, fondateur de l’EPI.
Au-delà des questions d’argent, qui restent, des deux côtés de l’Atlantique, le « nerf de la guerre », d’autres différences et similitudes sont apparues au cours des débats. Alors qu’aux Etats-Unis, les termes de « racisme » ou encore de « race » sont aisément prononcés, en France, l’on préfère parler de discrimination. Un aspect purement linguistique très vite effacé par la réalité sociale des deux pays. Preuve en est, lorsque Saïd Kebbouche décrit la situation des prisons françaises, (« proportionnellement, il y a plus d’Arabes dans les prisons françaises que dans la société française ») un sourire s’esquisse sur les visages de ses homologues américains. Comment, en effet, ne pas faire le parallèle avec la communauté afro-américaine, majoritaire dans l’univers carcéral américain…
Le jeu des comparaisons prend fin avec une intervention de Pedro, s’adressant à un jeune vaudais, membre du groupe de rap GSX. « Peu importe ce que les gens disent, il faut que tu prennes conscience que le plus important c’est toi ! Tu travailles pour nourrir ta famille, ne t’occupe pas des gens qui te discriminent. Il n’y a que comme ça que tu pourras te dépasser… »
La journée s’est poursuivie par une visite du marché de Vaulx-en-Velin et par une nouvelle rencontre à la Maison des Passages.
*EPI contact : 13 Chemin Auguste Renoir Vaulx-en_Velin, 04.78.79.52.79, espaces–projets–interassociati
Auteur : Pascale Lagahe