Aux racines de Malaka, le duo solaire qui a séduit le Woodstower

Laurina et Sacha Moïsa, 24 et 22 ans, sont sœurs. Les voix des deux Roannaises donnent vie à Malaka, un projet musical qui a germé au cours de l’ennuyeux confinement. Ce 18 avril, elles se sont produites sur la « Scène Rhône » du Festival Woodstower, dont la 26ème édition a troqué le parc Miribel-Jonage pour celui de Gerland. Le tandem afro-soul se livre sur son aventure artistique, quelques heures après avoir salué son public lyonnais.

Retranscription

LBB : Bonjour Sacha, bonjour Laurina. Au Lyon Bondy Blog, on a eu la chance de découvrir Malaka à l’occasion de cette nouvelle édition du Woodstower. Comment décririez-vous votre univers musical à des lectrices ou des lecteurs qui ne vous connaîtraient pas encore ?

Laurina : On est un duo. Un duo de sœurs, je pense que ça compte un peu. On aime dire qu’on fait de la soul, parce qu’on fait une musique qui nous touche vraiment. On la fait avec notre âme, c’est hyper important pour nous. Et en même temps, on fait une musique qui est de plus en plus rythmée, avec des rythmes afro, un batteur, des percussions, etc. On se dit afro-soul.

Sacha : C’est très organique, parce qu’on n’a pas grand-chose sur scène. Il n’y a pas de bande, c’est une musique très sobre.

LBB : Vous l’avez évoqué, vous êtes un duo, mais pas n’importe lequel. Qu’est-ce que le fait d’être sœurs vous apporte artistiquement ? Et comment la musique a-t-elle pu nourrir votre relation ?

Laurina : On est hyper complémentaires sur scène, parce qu’on sait que si l’une est fébrile, l’autre… C’est d’ailleurs toujours le cas, en réalité.

Sacha : Toujours.

Laurina (à Sacha) : Par exemple, hier, je n’étais pas bien, tu allais bien. Aujourd’hui, tu n’allais pas bien, j’allais bien. On se compense.

Sacha : C’est vraiment un équilibre sur scène. On sait où l’autre va aller. On a tellement vécu tout le temps ensemble, on se connaît tellement par cœur, qu’il y a un truc hyper naturel. Il n’y a pas de questions à se poser quand on est toutes les deux. Franchement, je souhaite énormément de courage aux personnes qui sont toutes seules sur scène parce qu’être à deux, c’est tellement simple. Je ne suis jamais seule, personnellement, et ça me donne plein de force. Mais dans la composition, dans l’écriture, on est hyper solitaires. Pour le coup, c’est vraiment chacune de son côté. Là, petit à petit, on commence à composer avec des nouveaux artistes, des compositeurs, donc on commence à apprendre à partager ce moment aussi. C’est plus compliqué, parce que c’est un truc un peu introspectif, mais on s’y plonge, et c’est très cool.

LBB : Sur scène, vous avez mentionné votre père, qui dansait le zouk seul dans votre cuisine. Quelle place prennent l’héritage familial et, plus largement, vos racines antillaises dans votre processus créatif ?

Laurina : On a toujours été très famille.

Sacha : Très, très famille.

Laurina : On adore notre famille, on est tous très proches. D’ailleurs, c’est notre sœur qui gère le management. C’est dans cet univers qu’on a grandi. J’ai l’impression qu’on a grandi dans une maison qui nous a un peu tout appris, dans le sens où on avait toujours de la musique. Notre père joue des percussions, notre mère peint, notre sœur dessine… On a plein d’artistes, qui ne nous ont pas forcément appris la musique, parce que ce n’est pas purement de la musique, mais qui nous ont…

Sacha : Plongées dans un univers.

Laurina : Et qui nous ont amenées à… Qui nous laissaient explorer.

Sacha : Il y a aussi le fait que notre maman est métropolitaine et notre papa Guadeloupéen, puisque tu parlais de racines. Nous, on est nées en Guadeloupe, mais on est rentrées très tôt. On a vraiment grandi en Métropole, donc on essaye petit à petit, c’est un combat qu’on mène, de retrouver et redécouvrir cette partie de nous qu’on a un peu laissée tomber pendant toutes ces années. On se rend compte qu’il y a énormément à creuser, il y a tellement de choses. On y est retournées en novembre et ça nous a tellement inspirées. Tout dans cette culture est… Ça vient d’en bas, et ça nous procure plein de choses.

Laurina : Puis c’est un peu mystérieux, parce qu’on n’en parle pas en Métropole. On ne connaît pas la culture créole.

Sacha : Tout est à découvrir.

LBB : Justement, « Malaka » est un nom chargé de sens. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur ce choix ?

Laurina : Quand on allait en Guadeloupe en famille, on avait l’habitude de manger ce fruit‑là. C’est comme une petite poire qu’on appelle une pomme d’eau, il y en a dans plusieurs pays tropicaux. On s’était toujours dit, avec notre famille, qu’on ferait un truc avec ce nom « malaka », parce qu’on le trouvait trop beau. Et quand on a décidé de faire de la musique, on l’a pris.

LBB : Et la danse, dans tout ça ? En quoi l’intégrer à vos concerts fait sens pour vous ? Est-ce quelque chose que vous voulez continuer de proposer à votre public ?

Laurina : Au plus possible, oui.

Sacha : Oui. La danse, personnellement, c’est vraiment ma…

Laurina : Ton moyen de communication.

Sacha : C’est ça, c’est mon moyen de communication. J’ai commencé à danser sur de l’Aya Nakamura, elle m’a vraiment faite bouger dans ma chambre. Et depuis, j’ai tellement envie de retransmettre ça. On a un espace énorme sur scène et… Chanter, c’est toute ma vie, mais je sais que danser, le mouvement du corps, ça va ensemble. C’est ça, la musique. Ça passe de partout. J’ai envie de faire de la musique qui me fasse danser, qui me fasse bouger, et j’ai envie qu’on vibre encore plus.

Laurina : Tout le travail va être de savoir comment on veut avancer, si on veut rester complètement organiques et acoustiques. Mais ça nous limite, parce qu’on est obligées de jouer et on ne peut pas danser. Maintenant, le travail est de savoir ce qu’on est prêtes à laisser.

Sacha : Question d’organisation, mais ça va se faire.

Laurina : Ça va se faire.

LBB : Vous l’avez également évoqué sur scène, vous ne travaillez pas seules. Vous avez à vos côtés votre batteur Timothée Faure. Comment cette connexion avec lui a-t-elle pris forme ?

Sacha : En fait, on s’est rencontrés dans la rue. Ça n’a aucun sens. On était toutes les deux en train de jouer dans un bar, sur un trottoir, avec une guitare. Il avait sa calebasse sur le dos, il s’est arrêté à vélo et il nous a dit « waouh, j’ai envie de faire de la musique avec vous ».

Laurina : C’était il y a cinq ou six ans.

Sacha : On a passé trois ans sans se voir et, un jour, on lui a demandé de venir faire un duo, de poser sur notre son. Depuis, on ne s’est plus lâchés. C’est sûr qu’on est un duo parce qu’on est sœurs et qu’on nous vend comme ça, mais on a vraiment une équipe qui nous entoure. On est avec lui sur scène, on a notre technicien, on a notre sœur. On a des équipes incroyables derrière qui nous boostent énormément. C’est une famille, voilà. On a toujours été très famille et ça se retrouve dans notre équipe, dans notre travail. C’est aussi pour ça qu’on se sent bien.

LBB : Vous avez même récemment fait votre premier featuring. Avec votre single Ulo en collaboration avec Flavia Coelho, vous avez donné à vos auditrices et auditeurs un avant‑goût de Mang, votre deuxième EP, qui sortira en novembre. Quelques mots pour décrire ce projet à venir ?

Sacha : Je dirais « ancré ».

Laurina : Oui, de fou. Moi, j’allais dire « plus profond ». Comme si là on avait… C’est pas un mot du tout, mais c’est comme si notre premier EP était à la surface du sol, et là, avec le deuxième, on va un petit peu plus profond sous la terre. On voit vraiment notre recherche de racines.

Sacha : On revient toujours aux racines.

LBB : Et cette collaboration avec Flavia Coelho, comment s’est-elle passée ?

Sacha : Ça s’est super bien passé. Elle est douce…

Laurina : Elle est incroyable.

Sacha : C’est vraiment un soleil. On avait fait deux de ses premières parties, on s’était rencontrées sur scène et elle était vraiment adorable. On s’est dit que ça pourrait carrément coller avec son univers, donc on lui a proposé, elle a directement accepté. On l’a rencontrée à Paris, on a écrit et c’était trop bien. Soleil du Brésil, soleil de la Guadeloupe… Ça matche vraiment. N’hésitez pas avec ce combo. On est très contentes. Ça fait plaisir, c’est notre premier vrai feat.

Laurina : Premier vrai feat.

Sacha : Si ça commence par Flavia, qu’est-ce qui va nous arriver après ?

LBB : Y a-t-il d’autres artistes avec qui vous aimeriez travailler à l’avenir ? Peut-être même qu’il y a d’autres collaborations dans ce deuxième EP que vous pourriez nous dévoiler.

Laurina : C’est pas un secret, parce qu’on n’en a vraiment pas du tout.

Sacha : Mais on s’est déjà posé cette question.

Laurina : Oui. On sait qu’il y a des artistes avec qui on aimerait collaborer, mais… À cette question, on aime répondre que non. Il y a tellement de gens avec qui on aimerait, mais avec qui ça ne marcherait pas, et tellement de gens avec qui on ne l’imaginerait même pas, mais avec qui ça marcherait. On essaye de ne pas se fixer sur des artistes, juste de se dire que tout ce qui vient est cool. Flavia, ce n’était pas du tout prévu. On nous a dit, un jour, « vous ne voudriez pas faire un feat avec quelqu’un ? ». Si. « Flavia ? ». Oui, carrément. Au final, c’est un truc qui s’est fait hyper naturellement. Et c’est ce qu’on aime, le naturel.

Sacha : Oui, le feeling dans les feats. Le partage. Toutes les personnes qui arrivent sur notre chemin, c’est au bon moment, c’est les bonnes.

Laurina : Tant qu’il y a du feeling et du naturel, c’est cool.

LBB : C’était notre dernière question, merci beaucoup à toutes les deux.

Sacha : Merci à vous !

Laurina : Merci !

Interview réalisée par Jade Dupond et Cecilia Adrián Tonetti, retranscrite par Cecilia Adrián Tonetti.

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