Andrea Kotarac a appelé à voter pour le Rassemblement National en mai. Crédit photo : LBB

Andréa Kotarac : « Tout le monde est le bienvenu dans la France insoumise. »

Politique générale. Aujourd’hui nous recevons Andréa Kotarac, conseiller Régional (PG) et candidat dans le 8ème aux Municipales 2014. Il revient pour nous sur la loi travail, les expulsions locatives, les premiers mois de Wauquiez à la Région et sur la campagne présidentielle à venir.

 

Le gouvernement s’est mis tout le monde à dos avec la loi Travail, des syndicats au Medef en passant par à peu près tous les partis politiques. Le contexte est tendu, c’est le moins qu’on puisse dire…

J’ai du mal à comprendre leur stratégie de se mettre tout le monde à dos à un an des présidentielles. Je pense qu’ils font aussi le ménage chez eux, au PS. Les frondeurs négocient déjà les Législatives. C’est un rapport de force. Je n’attends pas grand-chose de ça.

Pour revenir sur le fond, c’est l’article 2 qui me pose le plus de souci. C’est celui sur lequel il y a eu le plus d’amendements. C’est l’article qui renverse un peu la hiérarchie des normes. Qui dit que l’accord de l’entreprise est supérieur aux accords de branche, et même au Code du travail finalement quand on regarde avec du recul. Donc la loi ne protégera plus les salariés puisque l’accord d’entreprise aura une valeur juridique tellement forte qu’il sera supérieur à l’accord de branche. Là-dessus il y a eu silence radio. Ils ont donc décidé de passer en force. Sur le passage en force, je fais l’analyse suivante : Depuis 2012 nous disons qu’il faut passer à la 6ème République. La preuve nous est faite que le 49.3 et la constitution de la 5ème République explosent les droits des travailleurs. À titre personnel, je suis encore plus convaincu qu’il faut modifier cette constitution et ce système.

Sur la motion de censure, ça ne vaudrait pas le coup de « s’allier » à la droite ?

J’appelle les députés qui sont contre cette loi à voter la motion de censure. Cette loi, et les gens commencent à en prendre conscience, va au-delà du cercle militant. C’est une loi symbolique. La ligne du PS est aujourd’hui complètement libérale, plutôt Bruxelloise. Ils ont fait une réforme des retraites pire que Sarkozy. Il faut être transparent.

Le pacte de responsabilité était dans les tuyaux de Sarkozy, il n’a osé le faire en se disant qu’il aurait tout le monde à dos. Hollande, pas de souci, il le fait en 49.3 (la loi Macron). Le PS a choisi son cap libéral qui va amoindrir le droit des travailleurs.

Cette loi travail, et ses conséquences, ne fait-elle pas ressortir le manque de courage des députés frondeurs ?

Depuis le début je pense que les frondeurs ont leur responsabilité à prendre sur bien des sujets. Mais pas que les frondeurs.

Michele Picard était au Tribunal Administratif pour les expulsions locatives. Vous la soutenez ?

Évidemment qu’on prend largement part pour Michele Picard, qui fait chaque année la même chose. La majorité PC, PG, EELV, MRC et non encarté porte ça. Le préfet démonte à chaque fois les choses. Le parti de gauche et moi soutenons pleinement la démarche. C’est de la communication pour sensibiliser à la cause. La cause, elle, n’avance pas trop puisque ça continue d’année en année. Le problème du logement est un des problèmes, avec la santé et l’éducation, qui sont prioritaires dans notre pays. Malheureusement ça n’avance pas tellement. Mais peut-être qu’Emmanuelle Cosse aura le temps de changer les choses.

« On n’a pas été tendre avec Laurent Wauquiez »

Vous êtes conseiller régional. Le 14 avril dernier, pour le vote du budget, PS PRG PC ont quitté l’hémicycle, le FN aussi. Mais pas le parti de gauche…

Nous, au Parti de gauche, on avait été sollicité pour quitter l’hémicycle avec la gauche. On a eu un sacré débat. Ça ne s’est pas décidé comme ça. Il y avait beaucoup d’associations, puisqu’il y avait des sujets importants comme la forêt de Chambarant, l’A45, le passe contraception, etc. On s’est dit qu’il fallait rester, le combattre, lui dire pleinement ce qu’il y avait à dire dans son budget. On a posé une question préalable avant que tout le monde ne parte pour lui dire que ses documents budgétaires n’étaient pas bons. On lui demandait le report. Il a refusé. On est intervenu sur tous les points des associations qui étaient là. On a même déjeuné avec elles pour se mettre en lien sur le passe contraception, pour les tenir au courant de ce qu’il avait dans les rapports, pour qu’eux nous tiennent au courant sur les réponses qu’ils souhaiteraient avoir, sur leurs peurs, etc.

On a profité de l’interruption pour aller voir les cheminots qui manifestaient devant le siège. On était un peu partout pour combattre la politique de Laurent Wauquiez. On lui a bien fait savoir. On n’a pas été tendre. Les autres sont revenus ensuite quand le débat était terminé. On a essayé de lutter en restant parce qu’on avait préparé les amendements très précis sur ce qu’il fallait faire. On avait budgétisé les choses. On a demandé aux associations si c’était bien d’être resté. Elles nous ont dit que c’était bien puisqu’elles ont eu des réponses sur certains sujets.

 

Sur le dispositif de la bourse au mérite (500 € pour mention TB au bac). C’est particulièrement démago…

Il a fait une campagne très démago (le mérite, les portiques, les attentats, Guantanamo à la Française, interner les fichés S, etc). Il a quand même fait une commission sécurité, alors que ce n’est pas une compétence de la Région. Mais il en a tellement parlé pendant sa campagne qu’il est obligé de la faire.

Par contre, il ne parle pas de la promesse de 100 millions d’euros pour l’A45, des 1,2 million € pour Aubert et Duval, qui est une filiale d’une multinationale cotée en bourse. 50 000 € pour l’UNI, là aussi il n’en parle pas. On lui a demandé un détail complet de ces 50 000 €. Il avait pourtant dit dans sa lettre aux chasseurs que les subventions dogmatiques, politiques, c’était fini.

Donc il est très talentueux en communication, il annonce des choses. On joue notre rôle d’opposition donc on creuse et on voit dans les faits qu’il ne conditionne pas les aides a des multinationales, il ne conditionne pas le Center Parcs, à qui il donne 4 millions d’euros pour un projet illégal au niveau du tribunal. Même le conseil départemental d’Isère, qui est de droite, ne donne plus un euro. Lui donne 4 millions d’euros.

Conditionner les aides aux entreprises

Pensez-vous qu’il soit possible d’instaurer au minimum un rapport de force avec la politique faite par Wauquiez ?

C’est assez compliqué. Quand la gauche, sauf nous, sort de l’Assemblée, c’est le PS qui donne un coup de sifflet. Je considère qu’il faut conditionner les aides aux entreprises. Wauquiez tue l’agriculture paysanne avec ses subventions puisqu’il donne beaucoup moins.

Mon cheval de bataille est de conditionner les aides aux entreprises. Par exemple si une entreprise veut s’installer, on lui demande par exemple 80 % des emplois qui soient locaux. Ça peut être également des conditions environnementales. Ou encore pour les lycées professionnels, des stages obligatoires de 1ère, 2nde et Terminale. Par exemple quand on donne 1,2 million d’euros à Aubert et Duval (en Auvergne) on aurait pu dire il faut embaucher tant de stagiaires. L’entreprise mère de Aubert et Duval a reversé ces dernières années 3 milliards d’euros à ses actionnaires. Déjà leur donner de l’argent n’a plus aucun sens.

Mais pour revenir sur conditionner les aides aux entreprises, ce n’est pas improbable qu’il le mette en œuvre. Ce serait l’occasion pour eux de faire ce que n’a pas fait le PS, puisque Jean-Jack Queyranne a toujours refusé de conditionner les aides aux entreprises. STMicroelectronics (Isère), à qui on a donné 40 millions d’euros, fait un plan de restructuration, dégage tout le monde et ne respecte pas le cahier des charges.

© Blandine Le Cain (licence-Creative-Commons1)
© Blandine Le Cain (licence-Creative-Commons1)

On va revenir sur les présidentielles 2017, vous soutenez Jean-Luc Melenchon, qui est en pleine campagne. Ca se passe bien ?

Aujourd’hui, nous sommes partis en campagne, hors cadre et hors parti. Pour l’instant ça marche bien.

On note un certain changement dans la forme de Jean-Luc Mélenchon, plus apaisé…

C’est vrai que beaucoup de gens, même du PS, me disaient : « Je l’aime beaucoup sur le fond, mais il est trop grognard. »

C’est un très bon orateur, il essaye d’expliquer les choses sans brosser les gens dans le sens du poil. Même Pascal Blache admet que Jean-Luc connait ses dossiers et qu’il est assez sérieux. C’est d’ailleurs le sérieux qui a fait que je l’ai rejoint en 2008. Pour finir sur Mélenchon, des gens l’aiment, d’autres le détestent. Je les invite à aller au-delà. Dans les groupes d’appui (NDLR Pour la campagne), on voit des gens qu’on n’a jamais vus et qui commencent à militer ou en tout cas à avoir un travail politique sur l’intérêt général et la chose publique. Ça fait plaisir.

Aujourd’hui tout le monde connait Mélenchon. Tout le monde sait quelle voix il veut mener : 6ème République, écosocialisme, etc. On a posé sur la table des concepts qui n’existaient pas. On ne veut pas faire plaisir aux gens, mais les faire réfléchir et faire en sorte qu’ils s’engagent avec nous. Tout le monde est le bienvenu dans la France insoumise.

Sebastien Gonzalvez

Journaliste plurimédias. Rédacteur en chef à @BondyBlogLyon @HorsDesClous https://www.facebook.com/horsdes.clous

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