Originaire de la banlieue lyonnaise, Nargesse Bibimoune revient sur le devant de la scène avec la suite de son premier roman Dans la peau d’un thug qui sera publié en décembre 2016 chez IS Edition. Portrait.
Née en 1991, Nargesse Bibimoune a connu la passion des mots dès son enfance grâce à une éducation ouverte sur le monde et la culture. Issue d’une famille religieuse, c’est grâce à son père qu’elle va tout d’abord découvrir les livres dans les bibliothèques et peu à peu s’adonner elle-même à l’écriture en rédigeant ses propres journaux intimes. Après une licence en science politique à l’université Lumière Lyon II, elle poursuit ses études avec un premier master en science politique à Lyon puis un second master en sociologie à Grenoble. Un parcours universitaire qui lui a permis de « développer son esprit critique, d’exister socialement en portant le voile », et d’être reconnue en tant que femme musulmane dans la société.
Elle est également une militante engagée et active dans différents mouvements sociaux visant à promouvoir les droits de la femme ou contre le racisme, comme la marche de la dignité 31 octobre 2015. Ces sujets lui tiennent à cœur. « Ils sont liés à ma vie, à ma famille, ils représentent la réalité des quartiers populaires », confie-t-elle. Toujours avec cette même envie de partager son expérience et son rapport à la lecture, elle organise des ateliers d’écriture auprès des jeunes. « Je leur demande tout d’abord de raconter des histoires à l’oral, c’est plus facile pour eux. Le passage à l’écrit est plus complexe. » Oser se tromper, c’est le message que la jeune femme tente de délivrer à la jeunesse des quartiers populaires, « c’est dans ce processus de valorisation qu’ils doivent être entendus, partagés, sans être jugés ».
Naissance d’un phénomène numérique
Ouvrir sa page Facebook, comme on tourne les pages d’un livre, c’est le défi de quelques chroniqueuses qui mettent en scène des personnages issus des quartiers pour le plus grand plaisir de leurs lecteurs. Nargesse Bibimoune fait partie de cette nouvelle vague numérique. En 2010 elle crée une page Facebook spécialement pour ses chroniques et l’histoire de Youssef, un jeune des banlieues à l’image de n’importe quel autre jeune. « J’ai choisi volontairement un personnage masculin, pour mettre une distance et préserver ma vie personnelle. Ce n’est pas un journal intime, mais une histoire où les classes populaires peuvent se reconnaître dans une situation. » Après avoir partagé ses premières chroniques, elle voit son public s’élargir peu à peu… au point de se transformer en lecteurs assidus. La jeune auteur décide alors de ne pas dévoiler la fin de l’histoire sur le réseau social. Elle propose son manuscrit à différentes maisons d’édition. Son premier roman, Dans la peau d’un thug1, sera publié en 2013, chez IS Edition.
Pourquoi le mot THUG
Baignée dans la culture hip-hop et rap, la romancière confie avoir été touchée par l’histoire du célèbre rappeur américain Tupac dont l’histoire reflète une réalité sans frontière.
Actualité
En septembre 2016, l’auteur se saisit d’un sujet d’actualité en publiant son deuxième roman : Confidences à mon voile2 (toujours chez IS Edition). Un témoignage personnel cette fois-ci, puisque elle reprend ses journaux intimes, replonge dans son passé, pour offrir un regard sur sa propre vie et comprendre le vécu d’une femme qui porte le voile. « Je ne suis pas arrivée à obtenir certains postes à cause de mon voile. Au téléphone tout se passait bien, puis au moment de la rencontre physique je sentais que les regards changeaient, je pouvais lire de la déception », explique-t-elle.
Son prochain livre, à paraître fin décembre 2016, est la suite de Dans la peau d’un Thug.
Rapport au lecteur
« Je suis proche de mon lectorat, je réponds à tout le monde, à tous les messages. Je veux rester accessible », assure la jeune écrivain, qui jouit désormais d’une certaine notoriété. Derrière la barrière des réseaux sociaux, il existe une autre proximité, celle des rencontres réelles avec les lecteurs. « J’ai organisé des pique-niques chroniques à Paris pour connaître mes lectrices, certaines me suivent depuis des années et sont devenues des amies », raconte-t-elle avec passion. Faire tomber les barrières, être proche de ceux qui le souhaitent, être à l’écoute d’une jeunesse désireuse de comprendre et d’offrir à son tour « les mots », c’est tout le combat de Nargesse Bibimoune.
Sonia Ligorred
1) Dans la peau d’un thug, Nargesse Bibimoune, IS Edition, 300 p., 17,90 €
2) Confidences à mon voile, Nargesse Bibimoune, IS Edition, 148 p., 14 €
Une réflexion sur « Nargesse Bibimoune : du béton à la plume »