Visite surprise et course poursuite

Tribunal de Grande Instance de Lyon, comparution immédiate, le 19 mai 2017

Un bon gros œil droit rouge bien gonflé. Voilà ce qui pourrait définir Théo*, à peine la trentaine,  présent aujourd’hui dans le box des prévenus. Tantôt calme, tantôt énervé, ce n’est pourtant pas la première fois qu’il se retrouve ici.

Le 6 mai dernier, Théo a été interpelé dans la nuit pour  diverses infractions. Entre autres intrusion chez quelqu’un, dégradation de plusieurs boîtes aux lettres et de clôtures, tentative de brûler une voiture, violence sans incapacité sur un policier en fonction, résistance face aux forces de l’ordre qui venaient l’arrêter. Le tout en état d’ivresse.  Il arrive encore menotté dans le box, puis une fois libéré par le policier, il se place calmement derrière son avocat, il regarde ses pieds.

Tout a commencé quand Théo a décidé d’aller voir son ex –petite amie. En plein milieu de la nuit, fortement alcoolisé, il s’introduit chez elle en passant par le balcon, elle qui habite au premier. Il entre dans sa chambre, puis la plaque dans son lit, elle se dégage. Les deux se disputent, puis Théo se fait sortir. Il repart, non sans abimer plusieurs boîtes aux lettres sur son chemin. Toujours bien éméché, il enflamme un carton puis le lance sous une voiture voisine.  Son ex-amie qui l’avait suivi, a appelé la police. Deux représentants des forces de l’ordre arrivent peu après, mais pas de Théo en vue. Jusqu’au moment où ils l’aperçoivent à quelques dizaines de mètres, mais celui-ci s’enfuit. Et là, une course poursuite dans le noir commence. Théo s’élance à travers les jardinets des habitations, dégradants au passage plusieurs clôtures. Les policiers, équipés de leurs lampes, le perdent néanmoins de vue. Et soudain, au détour d’une ruelle, le jeune homme se jette sur un des policiers, l’attaquant par surprise avec sans doute la volonté de le mettre au sol.  Mais en se défendant, le policier a asséné un coup de lampe au visage de Théo, d’où sa blessure à l’œil droit. Les policiers l’arrêtent et l’emmènent, mais celui-ci se démène sauvagement et crie y compris dans la voiture qui le ramène au poste de police. Sur le chemin du poste, Théo se comporte plus en sauvage qu’en être humain doué de raison, et crache sur un des policiers.

Quand le président lui demande s’il veut être jugé tout de suite ou plus tard, Théo bafouille nerveusement. Il veut que son avocat décide, à ce que le président répond que c’est à lui de faire choix. Et là, Théo s’emporte : « Jugez-moi maintenant, qu’on en finisse et que je retrouve l’autre pélo qui m’a fait ça»,  en parlant de son œil. Il ne serait pas bon de relâcher le jeune homme tout de suite apparemment.  Les faits de son inculpation sont évoqués, et on apprend plusieurs choses. Théo possède onze mentions dans son casier judiciaire, et ce depuis 2008. C’est donc un habitué des situations comme celle-ci. Le policier victime du crachat ne porte pas plainte contre Théo, mais celui-ci est déterminé à poursuivre le policier qui l’a blessé en justice. Ce qui est son droit, rappelle le président. Pour sa défense, Théo évoque « ne pas se souvenir de toute la soirée ». Quant à la voiture, c’est un accident. En quittant les lieux de vie de son ex-petite amie, Théo s’est allumé une cigarette, puis l’a jetée dans une poubelle. Un carton qui s’y trouvait aurait pris feu, Théo aurait eu le réflexe de s’en saisir et de le « balancer ». Pour son grand dam, ce dernier se serait retrouvé sous une voiture, mais ne provoquant aucun dommage grave, heureusement pour lui. Le jeune homme serait sans domicile connu, logeant chez un ami, et à la recherche d’un emploi. Quelques jours avant l’audience, il aurait été pris en essai comme serveur, mais vite renvoyé par son employeur qui le trouvait « trop lent et trop mou ».

Son avocat tente de le défendre en jouant sur son état d’ébriété, son parcours difficile, son agressivité qui ne serait  que de la frustration, mais personne ne semble convaincu. Le procureur requiert à son encontre 12 mois de prisons ferme et plusieurs en temps partiel, une obligation de soins, l’interdiction de prendre contact avec son ex-petite amie, et l’obligation de dédommager toutes les personnes victimes des assauts sur boîtes aux lettres et aux clôtures dévastés.  Une peine appliquée, et c’est de la même manière qu’à  son arrivée qu’il repart : menotté. Comme quoi ce n’est jamais très bon de s’inviter chez une personne sans son accord, encore moins de nuit.

Affaire suivante.

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