Élections fédérales – interview de Murielle Laurent : « refonder et rassembler les militants qui ont plus que besoin d’une boussole » est le rôle du premier secrétaire.

Dans le cadre des élections fédérales du Parti Socialiste du Rhône, nous nous sommes entretenus avec trois candidats : Murielle Laurent, Christiane Constant et Jules Joassard.

Murielle Laurent est la maire de Feyzin depuis 2017. Elle est candidate aux élections fédérales du Parti Socialiste du Rhône du 23 février. Tandis qu’auparavant elle était vice-présidente du Grand Lyon en charge du patrimoine et des bâtiments, elle est ensuite devenue vice-présidente de la métropole en charge de l’action sociale. Bien qu’elle se soit engagée politiquement dès 2001 en devenant membre de bureau de quartier, c’est en 2010 qu’elle a commencé à être militante pour le Parti Socialiste. « J’aime à dire que je suis une enfant de la démocratie participative car ça a été mon cheminement et qui fait que aujourd’hui je me retrouve maire d’une commune de dix mille habitants.« , explique-t-elle.

(LBB) Comment vous imaginez le poste de première secrétaire fédérale ? 

(ML) C’est un poste qui doit permettre de fédérer les militants. Il doit aussi permettre au parti d’exister, même si aujourd’hui le parti socialiste est dans la difficulté. Aujourd’hui on a trois courants qui ont des similitudes sur le fond. Il y a aussi des divergences sur certains aspects. Pour moi aujourd’hui, le rôle essentiel du premier secrétaire fédéral du Parti Socialiste du Rhône doit refonder et rassembler les militants qui ont plus que besoin d’une boussole. Il va falloir que l’on travaille au niveau local, arriver à recruter de nouveaux militants, arriver à les faire travailler pour nourrir les propositions faites dans les strates nationales. Je propose aussi de mettre en place des états généraux et des sections pour remettre les militants au travail. 

Allez-vous continuer de travailler dans la NUPES ? 

On nous reproche souvent d’être contre l’union de la gauche mais en fait ce n’est pas ça. Notre fondement c’est l’union de la gauche mais pas telle qu’elle a été construite par la NUPES. Il faut une union de la gauche qui respecte les différentes formations politiques et une union de la gauche qui ne soit pas au bénéfice de places chez certains d’entre nous. Bien sur, si demain je suis première fédérale, il y a des discussions qui s’engageront avec le parti communiste, avec les verts, avec la France Insoumise. Donc il y a une union de la gauche à reconstruire mais sur un programme, sur le fond et non pas sur des postes et des personnes. C’est ce qu’il manque aujourd’hui.

Ce que je reproche à la NUPES c’est d’avoir été formée en trois semaines de temps, sans consulter les militants. C’est quand même un gros changement et un axe sur lequel il aurait fallu les consulter. Pour avoir échangé avec Olivier Faure quand il est venu à Villeurbanne au mois de janvier, il m’a dit que l’on n’avait pas le temps. On a toujours le temps en politique, aussi court soit-il. On vit les échéances au quotidien. Parfois il ne va rien se passer pendant longtemps et puis, sur quelques jours, il va falloir prendre des décisions. Mobiliser des fédérations et des sections sur un changement et une orientation aussi importante, ça aurait valu le coup de le faire, je pense. 

Pourtant, le parti socialiste a été le dernier à rejoindre la NUPES 

Oui, mais peut-être qu’il aurait fallu le faire autrement. On nous reproche d’être nostalgiques mais je pense que ceux qui sont passés avant nous ont quand même bien inscrits un cadre pour la construction des alliances. Même si les choses ont évolué, il y a des choses à adapter, c’est sûr. Il y a quand même de bonnes bases posées dans l’histoire du parti. Il faut s’appuyer là-dessus. Ce n’est quand même pas rien ce que Jospin a fait, et d’autres avant lui, même Mitterand. Voilà, il y a des choses qui pourraient nous servir dans notre histoire plutôt que de faire des accords comme ça, à la va-vite. 

Comment on fait quand on est maire pour intéresser les jeunes des banlieues à la politique ? 

C’est une grosse difficulté. Il y a des choses à construire avec eux. Sur les politiques jeunesses des communes, on a du mal à rendre nos politiques publiques communales attractives. C’est un combat du quotidien donc les emmener sur le terrain politique c’est une difficulté supplémentaire. 

Vous arrivez à recruter de nouvelles forces et de nouvelles têtes ? 

Oui on y arrive. Dans mon conseil municipal, il y a certaines personnes qui étaient société civile qui sont venues et qui réfléchissent aujourd’hui à intégrer le PS malgré le contexte compliqué. 

Vous allez les chercher ou ce sont eux qui viennent ? 

Avec mes élus je parle de ce qu’il se passe au sein du parti socialiste car ça interroge. Il y a des échanges. On propose à certains élus de venir participer à certaines réunions de section. Dans le contexte complexe dans lequel on les a fait venir, on a essayé de ne pas parler uniquement de la situation du PS mais de ce que le PS pouvait également apporter à Feyzin. 

En 2024 et en 2026, de grosses échéances arrivent. La première secrétaire fédérale du Rhône aura-t-elle son mot à dire pour ces élections ? 

Il faudra. C’est un travail qui commence maintenant. Les liens avec les forces politiques de gauche doivent commencer presque dès le 24 février (ndlr : le lendemain de l’élection fédérale). 

Quand on est première fédérale du Rhône, comment on donne de la visibilité à cette fédération ? 

Il y a un gros travail de communication à faire, un gros travail de pédagogie aussi. Dans les choses qu’on propose dans le projet fédéral, ce que l’on a travaillé avec les camarades du texte d’orientation d’un projet fédéral, il y a toute cette phase de communication pour rendre le PS plus visible dans l’action des élus. Il y a quand même trois maires, des forces de gauche. J’ai la chance d’être sur un territoire sur lequel il y a des maires qui ne sont pas encartés ailleurs mais qui développent des politiques publiques de gauche.

Il y a donc aussi tout un travail de promotion des élus qui font partie de la gauche, qui soient communistes ou sans étiquette politique. Il y a tout ce travail de valorisation d’action de terrain. Le travail que fait Hélène Geoffroy à Vaulx-en-Velin a besoin d’être mis en valeur, de même pour Cédric Van Styvendael et le mien également (rires). Voilà, c’est toute cette promotion via les réseaux sociaux. Je pense d’ailleurs que l’on n’existe pas assez sur les réseaux sociaux. On n’existe plus sur les rencontres que l’on peut faire. Il faut en provoquer plus. On faisait des choses avant que l’on ne fait plus maintenant. C’est un énorme travail. 

Quelles sont les thématiques sur lesquelles vous pouvez travailler avec les jeunes ? 

Le sujet environnemental, l’écologie. Depuis un an, un an et demi, je le vois avec les jeunes que l’on côtoie que cette question environnementale les percute. Je le vois aussi avec mes enfants. Mon ainé va avoir 18 ans et c’est vraiment un sujet qui le titille. Donc je pense que si on leur parle environnement sans le faire de manière punitive mais avec tout un travail pédagogique, ça peut être intéressant. Ce travail doit se faire aussi avec toutes les tranches d’âge pour rendre les choses plus attrayantes.

Il y a la question de la jeunesse, de l’éducation sur laquelle il y a un gros travail à faire. Je regrette le temps, même si ce sont plus des mesures de l’état, où la réforme des rythmes scolaires a été mis en place. Localement on avait fait un gros travail de proposition d’activités pour les enfants et aujourd’hui on aurait besoin de ces moyens. En plus, il y a quand même des questions financières qui sont présentes et aujourd’hui les dotations baissent énormément. J’étais obligée de venir à un rythme scolaire normal parce que je n’étais pas en capacité d’assumer financièrement les propositions et les activités qui avaient été mises en place.

Au-delà de l’éducation, il y a la question de la tranquillité publique. Là-dessus, je trouve que le Parti Socialiste ne fait pas assez de propositions. Ce sont des choses qu’on ne peut pas laisser à la droite et à l’extrême droite. Je pense que les trois maires socialistes du Rhône y sont confrontés dans leur quotidien. On ne peut pas ne rien dire. 

Concernant le bilan de Madame Constant, quelle est votre analyse ? 

Je n’aurais pas pris les priorités dans le même ordre, ni de la même manière dont elle les a prises. Il y a un aspect sur lequel nous ne sommes pas d’accord, c’est la question de l’audit financier. Ça fait partie des choses que je souhaite remettre en place car je pense qu’aujourd’hui il y a un sujet finance, d’autant plus que toutes les sections sont sous la « tutelle » de la fédération financièrement.

Il y a un manque de transparence. Il y a eu des travaux qui ont été faits pour faire en sorte qu’une partie des locaux puissent être loués. Je ne l’aurais pas mené comme ça non plus. Il y avait peut-être des choses à faire autrement. Après c’est surtout sur la méthode. Je trouve aussi que les militants, au sortir du congrès de Villeurbanne, avaient aussi besoin qu’un esprit de camaraderie soit remis en place, qu’on les fasse travailler. Ça n’a pas été le cas. 

Vous trouvez que les militants ont été oubliés ?

D’une certaine manière oui car il y a eu d’autres préoccupations. Après il y a eu des échéances électorales. Ils se sont exprimés sur certains territoires. On n’a pas forcément écouté leur expression mais ça c’est devenu coutumier depuis quelques années. Les militants votent et on ne respecte pas leur choix. Oui, il y a des accords nationaux sur des élections législatives, mais comment on explique ça aux militants ? Il faut leur parler. 

Est-ce que vous pourriez imaginer qu’en 2026 le/la prochain(e) président(e) de la métropole soit socialiste ? 

Alors je n’irais pas jusque-là parce que ce serait être dans le déni de la situation du PS aujourd’hui mais que nous puissions avoir un candidat ça me parait probable. Je n’ai pas l’ambition de prétendre que ce sera moi, je ne peux pas vous donner de nom (rires). On est en 2023, il peut s’en passer des choses. Que le PS fasse parti des discussions et que l’on ait un candidat, pourquoi pas. Dans mes rêves les plus profonds, le prochain président de la métropole serait socialiste oui. Ça pourrait être possible mais alors dès le 24 février il faut s’y mettre !

Il y a un gros travail en interne à mener mais au mois de mars il y aura des échanges et des rencontres engagées. Il faut vite commencer à faire un état des lieux du territoire car je sais que des choses commencent à se travailler ailleurs donc il ne faut pas traîner !

Avez-vous quelque chose à ajouter ? 

Ce qui m’importe vraiment aujourd’hui vis-à-vis de cette élection, au-delà des aspects politiciens, il faut arriver à rassembler et retravailler cette dynamique autour des militants, avec et pour eux. C’est ce dont on manque aujourd’hui. On voit bien que nos sections se vident même celles qui sont un peu fortes. J’insiste, ce sera une de mes grandes motivations : remettre le militant à sa place au sein de cette fédération.

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