Une semaine après la fameuse « affaire » de la marseillaise sifflée au Stade de France lors du match France-Tunisie, le soufflet médiatique est enfin retombé. Le Lyon Bondy Blog a quand même souhaité recueillir deux opinions complémentaires, celle d’Aïcha Chérif, présidente de l’association culturelle franco-tunisienne d’Oullins, et celle de Farid, 30 ans, fan de foot d’origine algérienne.
Au lendemain du match France-Tunisie, beaucoup semblaient avoir oublié la crise financière. Une autre « affaire » pas très claire, avait envahi la sphère médiatique : l’hymne national sifflé lors d’un match de foot amical, en France et par des Français. Les plus prévoyants se délectaient déjà d’un « Je l’avais bien dit que ça ne passerait comme ça ! »Et les plus opportunistes d’un « Il aurait fallu quitter le stade ! » Aicha Cherif et Farid se rejoignent sur deux points : « Non, ces comportements sont inexcusables » et « Oui, la récupération politique de l’incident est inacceptable. »
Aicha Chérif : « J’en veux aux responsables de ne pas avoir pris le micro avant le début du match pour dire stop. Il y avait les moyens de le faire sur le moment. Ce n’était pas question de suspendre le match mais simplement de faire un rappel à l’ordre. Peut-être que les managers, les entraineurs, les responsables de la fédération de foot auraient pu intervenir. »
Farid : « Cette récupération politique m’enrage réellement. Il faudrait plutôt essayer d’entamer un dialogue avec tous ces gens qui sifflent la marseillaise, comprendre pourquoi, et cela quel que soit leur âge et leur nationalité. Je me rappelle de matchs Angleterre-France (en 99), Italie-France, Israël-France… où la marseillaise avait été lourdement sifflée. Quel que soit les motivations, siffler un hymne, c’est aussi dire à un pays « Je te fais la gueule »
L’incident du match France-Tunisie a aussi été l’occasion d’aborder une nouvelle fois la question de la place des jeunes d’origines maghrébines dans les banlieues. Là aussi, Aicha Cherif et Farid ont un avis bien clair sur la question. « Ce qui est totalement paradoxal, c’est ce que ces mêmes jeunes qui sifflent la marseillaise et l’équipe de France sont les mêmes qui vont encourager la France quand la Tunisie est éliminée d’une compétition internationale. Mais siffler un hymne national, c’est avant tout un manque d’éducation. Il est clair qu’il y a eu une grande effervescence autour de cette rencontre. C’était vraiment une ambiance de fête. Malheureusement, ça a dérapé, peut-être à cause d’un mauvais encadrement. Certains ont voulu se faire remarquer, et voilà comment on en arrive à de telles incivilités. », s’attriste Aicha.
« C’est sûr qu’il y a de l’hostilité, de l’aigreur chez ces personnes, explique Farid. Mais je dirais quand même que beaucoup l’ont fait pour délirer, faire les cons. Sans vraiment comprendre ce que cet hymne représente pour de nombreuses personnes. En tout cas, si ces jeunes ont des choses à dire, il faut qu’il soit acteur de leur société. Il y a d’autres manifestations où ils peuvent s’exprimer »
Politique, sociologie, histoire, respect… l’incident a donné lieu à toute sorte de commentaires et d’analyses. Mais si le cœur du sujet était bien plus simple que cela ? Si le cœur du sujet était tout simplement footballistique. D’ailleurs, si Nicolas Sarkozy souhaite aujourd’hui que tous les matches où l’hymne français est sifflé soient suspendus, ce n’est pas à lui qu’appartient la décision mais à la FIFA.
Aicha : « Lors de ce match, il y avait aussi un peu de dépit pour les équipes nationales de France comme peut-être de la Tunisie, qui n’est pas extraordinaire en ce moment. Quoi qu’il en soit, tous ces problèmes d’incivilités dans les stades doivent être réglés par la ligue Internationale de Foot. »
Farid : «Les sifflets représentent un manque de fair-play. C’est aussi cela, malheureusement, le football : l’agressivité, la pression du public, la connerie. C’est triste car, pour moi, depuis 98, l’équipe de France est un symbole fort. Elle représente l’élite des joueurs, qu’ils soient black, blanc, beur. »
On attend toujours que l’arbitre siffle la fin de l’affaire…
Auteur : Pascale Lagahe