Suite à une reconsidération du travail, les sénateurs centristes ont déposé le vendredi 25 avril 2025, avec l’appui du gouvernement, une proposition de loi pour autoriser certaines corporations du secteur du service tel que les boulangers ou les fleuristes à travailler le jour de la fête du Travail.
Ces derniers jours, les boulangers et les fleuristes ont élevé la voix afin d’obtenir la permission d’employer leurs salariés le 1er mai, une pratique normalement proscrite par la législation. D’après le Code du travail, le premier mai constitue en effet l’unique jour férié durant lequel le repos est obligatoire pour l’ensemble des employés, sans diminution de salaire. En cas d’infraction à cette règle, l’employeur s’expose à une amende de 750 euros par salarié concerné, montant qui peut atteindre 1 500 euros si le travailleur est mineur.
En 2024, un artisan boulanger de Paris s’est vu infliger une sanction de 80 000 € pour avoir tenté d’ouvrir ses trois établissements lors de la journée du 1er mai. Une situation similaire s’est produite en 2021 pour cinq boulangeries en Vendée : après examen de leur dossier par le tribunal administratif, les boulangers ont finalement été acquittés et n’auront pas à s’acquitter de l’amende de 4 500 € qui leur était initialement réclamée. Par ailleurs, la Fédération française des artisans fleuristes a interpellé la sénatrice centriste de Vendée, Annick Billon, au sujet d’une incohérence qu’elle juge absurde : les fleuristes se voient interdire d’ouvrir le 1er mai, tandis que la vente de muguet sur la voie publique demeure autorisée.
Une loi qui reste floue
Si, en principe, aucune entreprise ne devrait exercer d’activité le 1er mai conformément à la législation, certaines exceptions existent néanmoins. Certaines structures, en raison de la spécificité de leur mission, sont autorisées à maintenir leur fonctionnement et à employer du personnel ce jour-là. Cela concerne notamment des secteurs comme les hôpitaux ou les transports publics, pour lesquels la continuité du service est jugée indispensable. Cependant, la réglementation demeure ambiguë sur la liste exacte des entreprises considérées comme ne pouvant suspendre leur activité le 1er mai.
La Confédération nationale des boulangers estime par exemple qu’une boulangerie assurant des livraisons à des hôpitaux, des établissements pénitentiaires ou des Ehpad pourrait être incluse dans ces dérogations. De même, la seule boulangerie-pâtisserie d’une commune pourrait, selon elle, bénéficier de ce statut particulier. En-dehors de ces cas, seuls les chefs d’entreprise, ou éventuellement des membres de leur famille non salariés, sont autorisés à travailler ce jour-là.
Un projet de loi permettant plus de liberté
Le 25 avril, la sénatrice Annick Billon, accompagnée du président du groupe centriste Hervé Marseille, a déposé une proposition de loi visant à autoriser les salariés de certaines entreprises à travailler le 1er mai. Cette initiative, soutenue par le gouvernement, cible en particulier les fleuristes et les boulangers, professions qui réclament depuis longtemps une clarification du cadre légal afin de permettre l’emploi de salariés lors de cette journée traditionnellement chômée. L’objectif affiché par les auteurs de ce texte est de combler un vide juridique et de sécuriser la situation des professionnels concernés, sans pour autant remettre en cause le statut férié et chômé du 1er mai.
La CGT, par la voix de sa secrétaire générale, Sophie Binet s’y oppose : « Il y a 364 autres jours pour ouvrir. Le 1er mai, les patrons peuvent travailler s’ils le souhaitent, mais, pour les travailleurs, c’est férié et chômé. C’est un acquis de la lutte. Cela fait 80 ans que ça dure et cela ne pose pas de difficultés particulières », a-t-elle fait valoir sur LCI.
Le gouvernement quant à lui soutient cette proposition de loi. La ministre Catherine Vautrin (Travail, Santé, Solidarités) a déclarée à l’AFP que « le gouvernement soutiendra cette initiative, car elle vient sécuriser notre droit et répondre aux attentes des boulangers, mais aussi de tous ceux dont l’activité est indispensable », « dans le respect absolu du volontariat » des salariés. Cette prise de position n’étonne guère, puisqu’elle s’inscrit dans la logique d’ « ubérisation » encouragée par le président de la république Emmanuel Macron, qui privilégie le développement des plateformes numériques et la flexibilisation du travail, parfois au détriment des droits des salariés traditionnels.
Article rédigé par Pierre RAYMOND.