Alors que les clubs amateurs masculins ont pu retrouver le terrain avec la Coupe de France, la compétition féminine est toujours au point mort. Un sentiment d’abandon est partagé par les acteurs du foot féminin lyonnais, qui réclament plus de considération de la part de la Fédération Française de Football (FFF) pour tendre vers une équité entre les hommes et les femmes.
Le 17 décembre, un ouf de soulagement parcourt l’ensemble des clubs amateurs de l’Hexagone : la coupe de France se jouera, annonce la FFF dans un communiqué. Un nouveau format est mis en place pour les éditions masculines et féminines. Les clubs professionnels et amateurs joueront chacun de leur côté et ne s’affronteront qu’à partir des 16èmes de finale. Le ministère des sports annonce par la suite la reprise des entraînements collectifs pour les équipes masculines encore en lice pour les matchs des 5 et 6ème tours prévus le week-end du 30 et 31 janvier. Une aubaine pour le FC Vénissieux et l’AS Saint-Priest, les deux clubs de la banlieue lyonnaise encore qualifiés à l’époque. Les clubs de la division 1 féminine, pour la grande majorité professionnels, se sont également affrontés le même week-end pour les 16èmes de finale. En revanche, du côté du foot féminin amateur, c’est le silence total. Aucune date de reprise n’est prononcée.
« On ne sait rien »
Ce manque de communication agace les deux clubs de la métropole lyonnaise encore en lice dans la compétition féminine. « Au niveau des pros, les garçons et les filles jouent mais après pour le foot amateur, les garçons ont pu faire la coupe de France et nous on est en attente d’avoir des instructions. En fait, on ne sait rien », se désole Gabriel Reolid, manager général et coach de l’équipe 1 senior du Caluire Football Féminin 1968 (CFF 1968). Le club est qualifié pour le dernier tour régional et doit jouer contre L’Etrat la Tour, mais aucune date n’est encore fixée.
Même son de cloche pour le Chassieu Décines Football Club (CDFC), qui est censé affronter le club savoyard de l’Étoile Sportive de Chilly dans le cadre du 4ème tour. « Pour l’instant, on est en attente en espérant bien évidemment reprendre la coupe de France », explique Fabien Dequesne, le directeur technique du CDFC. Il tempère néanmoins sur une éventuelle différence de traitement entre les garçons et les filles, en invoquant des raisons organisationnelles. « Pour la coupe de France féminine, c’est normal parce que chez les garçons, il y a plus de tours à faire que chez les filles par rapport aux nombres de clubs. » Le club de l’est lyonnais a reçu un communiqué de la FFF qui explique que les filles entreraient après les deux prochains tours des hommes, sans préciser de date.
Des dotations dérisoires
Les deux dirigeants s’accordent sur une chose : le foot féminin amateur est encore trop peu considéré par les instances par rapport à son homologue masculin. L’exemple le plus marquant se trouve du côté des dotations. A partir du 7ème tour en Coupe de France masculine, les clubs reçoivent une indemnité de la part de la Fédération. Elle démarre à 7500 euros pour atteindre 1,5 millions d’euros au profit du vainqueur. Du côté des filles, les chiffres ne sont pas communiqués par la FFF, peut-être en raison de leur montant dérisoire. Selon Foot Amateur, en 2017, seuls les clubs atteignant les demi-finalistes pouvaient toucher une dotation de 20 000 euros, qui atteint 40 000 euros pour le finaliste et seulement 60 000 euros pour le vainqueur. « Il n’y a pas de dotations chez les filles hormis si vous allez loin. L’année dernière, on avait fini au premier tour fédéral contre Nice mais on a rien eu. À notre niveau, il n’ y a pas forcément de recettes pour la coupe de France féminine mais que des frais engagés », détaille Fabien Dequesne.
Un cas de figure qui peut pousser les clubs amateurs à privilégier les équipes masculines à celles féminines. « Je suis passé par des clubs mixtes et au bout d’un moment, quand il y avait un choix à faire, la priorité était donnée aux garçons et pas aux filles », déplore Gabriel Reolid. Pour lui, les instances ont raté une occasion de montrer qu’elles s’engageaient réellement vers une égalité entre les sexes. « Les mêmes personnes qui prônent la mixité dans le sport ont pris des décisions complètement différentes pour le monde amateur garçon et le monde amateur fille. Il ne faudrait pas qu’il y ait des situations similaires dans le futur. On sent que c’est un coup de frein pour le développement du football féminin. »
Pour autant, Gabriel Reolid invoque des motifs d’espoir. « Je pense que le foot féminin a énormément progressé dans les instances nationales, fédérales et mêmes départementales. Après, le monde ne se fait pas un jour. » Son club, le CFF 1968, 100 % féminin depuis 2010, chose très rare dans l’Hexagone, a connu un boom de licenciées depuis la Coupe du monde en France en 2019. « C’est vraiment un sport qui prend de plus en plus forme et qui génère de plus en plus d’intérêt ».
Victor Labrousse-Vergier