Tribunal de Grande Instance de Lyon, comparution immédiate, le 12 mai 2017
La victime a décidé de ne pas être représentée par un avocat. C’est son droit, les preuves sont assez accablantes pour s’en passer. Il a 23 ans , il est en master pour avoir son diplôme de commerce. Il se retrouve un soir avec des amis, se dit que c’est une soirée comme les autres, qu’il est temps de laisser les livres de coté pour respirer. Il riait, discutait, choisissait les discutions de son choix avec ses amis bien qu’il ne soit pas en accord avec eux sur tous les sujets. Qu’importe, le temps d’un moment il s’échappait d’un cercle scolaire qu’il aimerait oublier pour profiter d’une soirée chaude de mai. Pourtant rien n’allait se passer comme Michael* l’avait prévu.
Il est avec son groupe d’ami lorsque deux individus alcoolisés, Roncho et Poncho sont venus à sa rencontre. Le ton monte entre les trois hommes mais Michael préfère en rester là et s’en aller. Manque de chance, ou certainement de neurones, Roncho assène une gifle quand, par surprise, Poncho, lui éclate une bouteille de Vodka sur le visage. 30 jours d’ITT pour la victime. « J’ai trouvé une alternance, mais vous pensez bien qu’avec un visage comme le mien il m’est impossible de me présenter face aux clients ». Nez cassé, plancher orbital brisé, les deux yeux gonflés. Michael porte les stigmates de la capacité incroyable qu’on certaines personnes à emmerder le monde.
Le procès se poursuit, Michael se serait bien passé de ce moment désagréable surtout qu’une « opération chirurgicale va devoir être prévue pour remettre mon nez en place ». Mais qui sont Roncho et Poncho ? Ces deux grenouilles assis sur le banc des accusés.
Roncho se dit « toujours honnête », « je respecte toujours les gens, c’est juste une erreur de parcours. J’assume la gifle que je lui ai mise mais il m’a manqué de respect ». Ce à quoi le juge répond « mais enfin monsieur, si on mettait une gifle à chaque personne qui manque de respect vous pensez bien qu’on ne s’en sortirait pas ? ». Il est vrai que la main serait légèrement rouge. Roncho est connu de la police pour quelques délits mineurs et des faits de violences. Un respect en dent de scie… Lors de son interpellation dans le quartier de Saint Jean celui-ci « était fort alcoolisé mais s’est relativement laissé faire par les agents de police ». Dans ce groupe des forces de l’ordre venus procéder à son interpellation il y avait une femme. Et monsieur Poncho n’a pas l’air d’apprécier le sexe opposé.
A la vue de cette dernière le poète s’exprime joliment « Qu’est ce qu’elle a la pétasse ? ». Propos sans nul doute très apprécié des dames. C’est dans la voiture qu’il va continuer à joindre les gestes à la poésie, « arrête de faire ça avec ta bouche, je vais te violer », quand elle écrira dans son rapport « il se laissait glisser vers moi dans la voiture ». « Violer« , verbe qui lui tient à cœur puisqu’il récitera tel un pleutre ce qui semble arrête son recueil de poème : « Viens à coté de moi je vais te violer ». Mais Roncho est un romantique et ne demande qu’une chose, les clés de l’amour, « fait moi un smack », en vain. La littérature française n’a qu’à bien se tenir.
Mais qu’en t-il de Poncho ? L’homme à la bouteille. Cas légèrement plus grave. 28 condamnations, 20 lorsqu’il était mineur. Rapide retour sur sa vie de délinquant : Abus de confiance, recel de bien issu d’un vol, menaces, violences, conduite sans permis, outrages à agent, destruction de biens d’autrui, vols en réunion, vols aggravés etc. Des condamnations plus ou moins lourdes. Un mois, deux mois, 18 mois et on en passe… Contrairement à son acolyte, ce dernier réfute en bloc tous les faits dont l’accuse la victime, allant même jusqu’à nier connaître Roncho…
Malheureusement pour lui, à l’heure du progrès et des nouvelles technologies, les caméras de surveillance sont partout. Pas de bol, on le reconnaît relativement bien sur les images. Il va plaider son état d’ébriété l’empêchant d’être maître de lui. Qu’il se rassure : s’il ne sait pas ce qu’il fait lors de ses beuveries, le juge saura lui faire comprendre la conséquence de ses actes.
Les deux accusés finiront par se disputer dans leur aquarium ajoutant un peu plus de stupidité à leur situation : « Fais ta vie je fais la mienne. On se connait pas je m’en bas les couilles de toi » vitupère Roncho. Michael confirmera que ce sont eux les coupables et qu’il « regrette la gratuités des actes ».
Les avocats de Roncho et Poncho essaieront de défendre l’impardonnable…Pour le premier « une gifle n’a pas causé de telles séquelles. Monsieur Roncho n’a aucune volonté de commettre de violences ». Le second avocat insistera sur le passé difficile de son client « placé jeune en foyer il a subit une fracture familiale évidente… »
Roncho sera condamné à 3 mois de prison ferme avec 300 euros d’amende pour la policière insultée. Poncho aura 15 mois de prison dont 6 avec sursis. 24 mois sous contrôle judiciaire. Les deux protagonistes doivent s’acquitter d’un dédommagement d’une valeur de 1000 euros auprès de Michael.
Je cherche une morale à cette histoire mais je finirai seulement par un point non final. Les deux coupables se retrouveront sûrement dans ce même box d’ici quelques mois.
Affaire suivante.
*Les noms ont été modifiés.