Ce matin, des milliers * de Lyonnais ont chômé pour manifester. Sous une pluie torrentielle, ils ont exprimé avec sourire et énergie leur mécontentement face à la réforme des retraites 2010.
« Regardez cette pluie, c’est Sarkozy qui pleure ! », hurle à tue-tête un pompier de la caserne de la Croix Rousse. Ce dernier, plus motivé que jamais, chante avec vigueur les meilleurs tube de manif dont le célèbre « Sarkozy, si tu savais, ta réforme où »…. Il est alors 13h passé. Le gros du cortège est arrivé place Bellecour, après une marche de deux heures depuis la Manufacture des Tabacs. A l’arrivée, la pluie laisse un peu de répis aux marcheurs.
Le temps de ranger nos parapluies et d’aller à la rencontre de Louis. L’homme de 45 ans, salarié (syndiqué et délégué du personnel) chez un assureur réputé, s’est mis à l’abri, sous la devanture d’un commerce. Il regarde avec bienveillance, le cortège avancer devant ses yeux. « Vous ne manifestez pas ? » -« Ah mais si ! Je viens de finir. Là je me pose un peu, mes pieds commencent à chauffer ! » – « Vous êtes venus manifester seul » -« J’ai réussi à faire venir 2 collègues. Mais c’est vrai que ce n’est pas facile de motiver son entourage. Surtout les jeunes… » – « C’est quoi votre message ce matin ? » -« Je suis là aujourd’hui car je n’ai pas envie de travailler jusqu’à 80 ans ! » – « Et quelles seraient vos préconisations pour continuer à financer les retraites ? » -« Eh bien, il faut commencer par favoriser l’emploi et taxer davantage le capital ! »
Entre temps, la pluie s’est remise à faire des siennes. Plus forte que jamais, elle n’enlève en rien le sourire aux manifestants. Blogueuses courageuses et surtout trempées, nous poursuivons notre route à la rencontre d’autres manifestants heureux et en colère. Un petit groupe de salariés du secteur hospitalier nous fait part de sa conviction. « Ce n’est qu’un début. Nous allons continuer, vous verrez ! ». Beaucoup fustigent avec ironie Nicolas Sarkozy. Peu prononce le nom de Eric Woerth ou de François Fillon. David et Pascal, eux, veulent enfoncer le clou. « L’avancée de l’humanité se fait par le progrès et la solidarité. Cette réforme, ce n’est qu’une idéologie. Rien de plus ! Ce qu’il faut surtout pour faire des réformes, c’est prendre en compte la réalité sociale de la France ».
Alors qu’une sono ambulante balance du Jean Ferrat, un jeune d’une vingtaine d’années (l’un des plus jeunes que nous avons eu l’occasion de croiser) marche, à hauteur du cortège, écouteurs vissés dans les oreilles. Manifestant ? Pas manifestant ? Nous allons très vite le savoir. « Excuse-nous. Nous faisons un petit reportage sur la manifestation de ce matin et nous voulions savoir si tu faisais partie du cortège ? »-« Ah non. »-« Tu voudrais nous donner ton sentiment sur cet événement ? »- « J’ai même pas envie d’en parler, cela leur donnerait trop d’importance. ». Pour Jean, 20 ans, « les manifestants mettent des bâtons dans les roues à un gouvernement qui tente d’appliquer des réformes justes ». « Si tu devais manifester aujourd’hui, ce serait pour quoi ? » -« Pour rien. L’Etat doit tourner comme il tourne en ce moment. »