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Il y a eu de nombreux cas de décrochages scolaires, conséquence de la pandémie et du télétravail, que faire pour ces élèves qui dérochent ?
C’est une vraie catastrophe, ce décrochage, c’est pour ça d’ailleurs que le gouvernement a tenu pendant si longtemps à rouvrir les écoles, malgré les risques que ça représentait. Que faire pour ces élèves ? Je pense qu’il faut flexibiliser le rattrapage, si je peux m’exprimer ainsi, c’est-à-dire qu’on ne le stigmatise pas, car il est souvent mal vu. Peut-être devons-nous rajouter de la flexibilité au système, et trouver des nouvelles manières de faire, comme une « terminale et demie » pour permettre aux élèves de rattraper leur retard. Si nous n’y parvenons pas avec ces méthodes-là, nous pouvons encourager l’assistance scolaire, sous forme de stages. La région a les lycées sous son autorité, bien qu’administrés par l’Éducation nationale. Nous pouvons peut-être les ouvrir pendant l’été et proposer aux élèves des formations avec des professeurs volontaires. Concernant le financement, on peut trouver une mécanique avec l’État, il y a des choses à faire. Par exemple, si un élève s’est lancé dans une formation scientifique et qu’au final ça ne lui plaît pas, on doit lui offrir gratuitement, et non pas en payant, des possibilités de rattrapage scolaire. Cela ferait partie d’un projet à mettre en place très vite, dans le cadre des 30 jours, pour éviter ce décrochage. Bien sûr, il y aura des ratés. Ça veut dire qu’il faut accepter que cette crise ait impacté de nombreuses personnes. Il faut surtout encourager les gens, et il y aura des aides pour ça. C’est un traumatisme important dans la vie de ces élèves, alors il faut les aider.
Il y a tout l’accompagnement psychologique sur lequel on va faire des propositions très concrètes. J’ai commencé à en faire dès cet après-midi. Ça sera pour les gens qui ont été touchés par le Covid long, c’est-à-dire des gens qui sont en grande méforme physique et psychologique. La région doit vraiment les aider. Et on prévoit également des accompagnements psychologiques, notamment pour les élèves, il va falloir trouver des solutions. Concrètement, si je devais donner une marche à suivre, ce serait rouvrir les lycées pendant l’été, faire des cours en groupe, sous une forme de volontariat, et gratuitement évidemment.
Concernant le financement, vous prônez l’alliance du secteur public et du privé. Pour l’éducation aussi ?
Je pense qu’il ne faut pas d’idéologie là-dessus. Il faut mettre la priorité sur le mérite, tout le monde doit y avoir accès. Mais tout le monde doit travailler pour arriver au bout. C’est un droit qui va avec des devoirs. Il faut trouver des systèmes dans lesquels il n’y a aucune barrière à l’entrée. On ne doit pas faire le tri sélectif des élèves par rapport à leurs capacités financières. C’est la première chose. La deuxième, c’est qu’on peut avoir un programme national qui est totalement public, qui a une rigidité absolue en termes de compétences à acquérir, certes, mais on peut lui donner de la flexibilité sur la participation à ce programme par des structures privées. Pour moi, les deux sont compatibles. Et encore une fois, ce n’est pas un totem de gauche ou un totem de droite. L’éducation, c’est quelque chose d’essentiel pour le pays, donc tous les moyens sont bons. Et arrêtons le fantasme d’influence qu’on peut avoir sur les élèves. Moi, je m’aperçois aujourd’hui que c’est plutôt eux qui nous influencent en termes de politique.
La culture est à l’arrêt depuis plus d’un an maintenant, que faire pour ce secteur, fortement impacté par la crise sanitaire ?
C’est le problème des 30 jours. Il faut soutenir la culture dès que l’on pourra rouvrir les lieux culturels. Je suis pour le soutien via des achats de tickets, pour offrir également aux gens la possibilité de jouir de la culture, que je soutiendrai par des subventions. Ce serait plutôt ma stratégie. Ce qui est important pour la culture, c’est de ramener les gens dans les salles de spectacles, dans les cinémas, dans les festivals. On peut donner de l’argent comme ça, mais si les spectateurs ne sont pas au rendez-vous, en se disant qu’il est trop tôt pour retourner dans un lieu culturel, cela nous ferait perdre encore 6 ou 8 mois, ce n’est pas possible. Donc, il faut vraiment faire un exercice double, qui est de soutenir un certain nombre d’organisations culturelles qui veulent faire des projets, et encourager les gens à y aller sous forme de tickets, ou de réservations. Il va falloir jouer sur les deux. Emmener des gens vers la culture, et les accueillir. S’il y a une chose qu’il ne faut pas faire, c’est faire de l’arbitrage idéologique de la culture. Moi, je ne m’autorise pas à savoir si telle culture est mieux que l’autre. Et là, il va falloir trouver des systèmes équitables, beaucoup plus équitables que ceux qui sont aujourd’hui en place. Il va falloir trouver une mécanique qui soit, finalement, beaucoup plus standardisée, mais au bon sens du terme, équitable pour tout le monde. On va arrêter de faire de la distinction.
Il y a des leviers à activer pour aider la culture, c’est certain. Par exemple, le ticket pour que les gens soient incités à y aller. Ça peut être décidé que si l’on prend en charge 50% un ticket pour donner accès à des festivals, à des théâtres, le reste pourrait être fait par les gens eux-mêmes. On fait un petit effet de levier, car on donne 50%, mais les gens apporteront les 50% restants.
Ça, c’est une piste. L’autre piste, c’est de mettre en place à l’intérieur de la région une plateforme pour aider, par exemple, à repérer des sponsors ou des soutiens. Si vous passez par cette plateforme, on vous garantit une visibilité sur tant de festivals. Encore une fois, ce sont des méthodes finalement assez simples d’utilisation de l’argent. Mon objectif, ce n’est pas de démultiplier l’argent, c’est de mieux utiliser cet argent. C’est l’idée de la campagne. La région mérite mieux. Il faut que, systématiquement, avec « 1 », on cherche à faire « 3 ». Je sais que ça peut paraître compliqué, mais c’est comme ça que les grandes entreprises font aujourd’hui, quand elles font de la gestion. Au lieu de faire de simples investissements, il faut trouver des investissements à plusieurs, plus gros.
Sur la thématique du sport, et plus précisément l’insertion par le sport, quels sont vos projets ?
L’insertion par le sport, c’est quelque chose de bien, c’est certain. Le sport, il faut le mettre en avant. Je pense qu’il faut bien distinguer ce qui est du domaine du sport professionnel : Jean-Michel Aulas, Tony Parker, le LOU, ils se débrouillent très bien sans nous. Par contre, il faut que le sport dit amateur soit, pour des raisons de prévention physique, psychologique, pour le sens de la collectivité et de l’union, mis en avant au moins autant que la culture. Le sport féminin est un excellent exemple, les femmes peuvent montrer à tout le monde qu’il n’y a pas de secteurs réservés aux hommes, quand on voit la performance des championnes lyonnaises. J’ai envie qu’elles soient beaucoup plus exposées, notamment sur le plan global. Ce n’est pas moi qui fais le programme télé, et je regrette qu’on ne voit pas plus de sport féminin à la télé ou dans les médias en général. Ce serait une manière de rétablir un peu plus l’égalité homme-femme. C’est une manière d’avoir des gens de différentes origines qui se parlent dans un langage commun, qui est un ballon ou un filet. C’est un liant de société important. Il faudra soutenir de façon déterminée le sport. Il y a déjà beaucoup de choses qui sont faites. Je reviens à ce que je disais plus tôt. Pas question d’arrêter les subventions. Par contre, réfléchissons à leur utilisation.
Toujours sur le sport, lorsque l’on préparait la liste, on avait eu une idée en pensant aux jeux olympiques. Nous avons songé à faire des jeux olympiques régionaux. Sans ambition démesurée, bien sûr, mais plutôt pour faire découvrir aux gens les sports qu’il y a dans leur propre région, et qu’on souligne l’idée qu’il y a des sports, des compétences régionales qui sont intéressantes à voir, et qu’il ne faut pas rester dans sa bulle de sport. Et puis, c’est intéressant de voir, qu’à quelques centaines de kilomètres, quelques dizaines de kilomètres, il y a d’autres sports avec des champions, et on n’en parle pas encore assez sur le plan intra régional. C’est ça que je voulais dire par l’olympisme local.
On arrive sur la fin de cette interview, comment souhaitez-vous conclure ?
Je finirais en disant qu’il y en a assez d’une politique qui change le pansement en fonction des couleurs : on est à droite, puis on est à gauche, alors on change le pansement. Moi, je voudrais plutôt penser le changement. C’est-à-dire qu’il est l’heure d’avoir une attitude politique sur nos préoccupations quotidiennes, et la région c’est une préoccupation quotidienne. C’est le transport, c’est l’éducation. On l’a dit, c’est le sport, c’est la culture. Ce sont des choses qui nous touchent directement et on a l’impression que l’on veut nous imposer des options politiques. Mais moi, je n’en ai pas grand-chose à faire de ça. Moi, je suis un de ces hommes politiques que je définis comme hybride, j’ai 40 ans d’entreprise et 4 ans de politique. Et je ne pense pas uniquement en politique. Je pense en « vraie vie », en me disant « comment je ferais ? ». Nous n’avons pas parlé d’un sujet très important : la carte scolaire, c’est national. Je suis père de famille, lorsque l’on m’oblige, par carte scolaire, à aller dans un collège, je me pose la question de la réputation du collège. Quand je m’aperçois qu’il y a des dérives dans certains collèges, je change de casquette, c’est le devoir du politique, et je me demande « comment fait-on pour que le collège n’ait plus cette réputation ? », car les parents vont trouver des situations pour fuir. La vraie politique, c’est s’intéresser aux problèmes des vrais gens.