Etudiants étrangers : l’urgence de l’emploi

Signée le 31 mai dernier, la circulaire Guéant-Bertrand (respectivement ministre de l’Intérieur et ministre du travail) a pour principal but de faire baisser le nombre de travailleurs étrangers en France (« Le nombre d’étrangers entrant en France pour motif professionnel (…) doit diminuer, conformément à l’objectif national annoncé récemment »). Outre le fait de rappeler que le taux de chômage des travailleurs étrangers reste élevé, elle fait le point sur les conditions d’obtention des titres de séjour, visas et autorisations de travail… Julia a rencontré un de ces jeunes sortant de ses études en France, qui doit pouvoir justifier d’un CDI en 35h hebdomadaires afin de pouvoir rester en France.

Sous couvert d’une récapitulation générale de la législation en ce qui concerne le travail (contrats, conditions de travail…), cette circulaire pointe du doigt le fait que la main d’œuvre étrangère ne doit être employée que s’il n’existe pas de main d’œuvre française pour un poste équivalent (« En principe, le recours à la main d’œuvre étrangère se justifie uniquement quand l’offre d’emploi ne peut être satisfaisante par des demandeurs d’emplois présents sur le marché du travail et qui possèdent les compétences voulues »).

Plus loin on peut lire un paragraphe concernant le changement du statut d’étudiant vers le statut de salarié : ici encore la circulaire insiste sur le fait que ce changement de statut constitue la part la plus importante du flux migratoire et que les étudiants « ont prioritairement vocation, à l’issue de leur séjour d’études en France, à regagner leur pays pour y mettre en œuvre les connaissances acquises« . Ce changement de statut ne sera donc en fait d’aucune facilité pour leur renouvellement de leur titre de séjour.

Cette circulaire fait débat, notamment au sein des responsables de gauche d’Ile-de-France qui demandent le retrait pur et simple du texte. Ils pensent qu’au contraire les étudiants étrangers représentent une réelle richesse pour la France d’un point de vue culturel et intellectuel. Ils dénoncent donc cette politique de diminution de l’immigration professionnelle en refusant des autorisations de travail.
De nombreux étudiants étrangers au parcours prestigieux (tel que HEC ou Science Po) sont eux aussi en première ligne pour demander le retrait de la circulaire.
Afin d’y voir un peu plus clair nous avons posé quelques questions à un étudiant étranger, Alesson, résidant en France depuis plusieurs années et qui n’envisage pas sa vie future dans un autre pays.

Tu es étudiant étranger originaire d’où ?

Difficile de dire que je suis étranger pour un pays que je connais aussi bien que la France, mais selon le morceau de papiers qu’on m’a donné, je suis né au Brésil.

Quelle est ta filière et dans quelle université as-tu étudié ici à Lyon?

J’ai fait un master en lettres moderne à Lyon 3, ensuite un master 2 en communication web et finalement un master 2 pro en lettres appliquées à la rédaction professionnelle à Lyon 2.

Pourquoi avoir choisi la France?

J’ai fait des études en littérature, j’étais très jeune lorsque j’ai accédé à l’université (16 ans) et je lisais beaucoup de littérature et philosophie française (Sartre, Camus, Derrida etc) et également les écoles littéraires et philosophiques françaises, du coup je me suis dit pourquoi pas les lire en français. C’est là où j’ai décidé d’apprendre le français, chose qui a été très facile, car en 6 mois je le parlais parfaitement.

Quelle a été ta réaction par rapport à la nouvelle circulaire Guéant qui a pour but de limiter les séjours longs des étudiants étrangers après leurs études, les encourageant à retourner dans leur pays?

Cette circulaire fait partie de la politique xénophobe et stupide de Nicolas Sarkozy. Xénophobe car elle expulse les cerveaux formés en France et stupide car la France m’a payé mes études, ma sécurité sociale, on m’a donné des tas d’aides sociales que je ne pourrais même pas chiffrer et aujourd’hui au lieu de me dire « il est temps de payer Alesson, vous allez bosser, payer des impôts pour régler nos comptes », le gouvernement (et pas la France) préfère me dire de m’en aller.

Je suis censé coûter moins cher pour l’entreprise (car je suis jeune diplômé) et en même temps leur apporter une très bonne valeur ajoutée. Je ne suis pas en train de demander de l’aide au gouvernement, je veux travailler, participer à l’économie et à la consommation de ce pays qui est en difficulté. »

Penses-tu qu’en partant du fait que nous sommes tous citoyens du monde il ne devrait pas y avoir de restrictions par rapport à la volonté de rester travailler dans le pays de notre choix?

Je pense qu’à partir du moment où l’on peut être « utile » à la société, on devrait avoir le droit d’être là où l’on veut. D’autres lois plus intelligentes telles qu’un impôt supérieur aux étrangers permettraient à l’État d’avoir de meilleurs chercheurs (la plupart des chercheurs Américains sont des étrangers devenus Américains), des professionnels plus hétérogènes (au Québec le gouvernement donne la possibilité aux étudiants de rester jusqu’à 2 ans, il les invite à rester sur place), et tout cela permettrait au pays de redevenir compétitif. »

La rédaction

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